China 9, Liberty 37
Titre original: Amore, piombo e furore
Genre: Euro-Western (hors spagh) , Western spaghetti
Année: 1978
Pays d'origine: Italie / Espagne
Réalisateur: Monte Hellman (& Tony Brandt)
Casting:
Fabio Testi, Warren Oates, Jenny Agutter, Isabel Mestres, Franco Interlenghi, Sam Peckinpah, Gianrico Tondinelli, Romano Puppo, Richard C. Adams...
 

Clayton (Fabio Testi) est un tueur à gages qui se voit offrir une chance d'échapper à la peine de mort : pour cela il doit tuer le rancher Matthew (Warren Oates). L'affrontement a bien lieu, mais pas tout à fait comme prévu puisque Clayton s'enfuit avec la femme de sa cible (Jenny Agutter). Une femme qui se retrouve du coup à la fois scindée en deux, attachée à l'un, aimantée par l'autre. Seulement Matthew, blessé mais pas tué, n'a pas dit son dernier mot...

 

 

Écrit par Jerry Harvey et Douglas Venturelli, China 9, Liberty 37 (inscription reprise d'un véritable panneau de signalisation au Texas) est un drôle de western à bien des égards. On dirait qu'il tente de solder définitivement les comptes et ressemble à un appel à la reddition. Il y transparaît comme une volonté de laisser tomber les armes, à la fois de guerre lasse mais aussi parce que le western moderne, après avoir ôté sa part de romantisme au mythe hollywoodien de l'Ouest américain, a remis les pendules à l'heure et que, du coup, dorénavant, les deux peuvent cohabiter, en paix et dans la même histoire.
D'où un récit finalement très symbolique à cet égard, et dans lequel deux personnes vouées à s'entretuer et qui - de manière romantique justement - cherchent la même chose, vont apprendre à se respecter. Un respect acquis après avoir emprunté des sentiers sinueux, de ceux qui suivent quelques batailles frontales ayant laissé des morts en chemin. Des victimes collatérales.

 

 

Cette coproduction de Monte Hellman se révèle attachante, moins aride que son triptyque à base de quête et de dépouillement que forment "L'Ouragan de la vengeance", The Shooting et "Cockfighter" et fait même preuve d'une simplicité et d'une générosité assez étonnantes.

On remarque bien entendu la présence de Sam Peckinpah - quasi dans son propre rôle - qui y déclare "avoir livré la vérité". Il n'est ici pas seulement présent comme mentor, mais aussi et surtout comme témoin d'une vision au sein d'une histoire et d'une industrie qui a muté. Jenny Agutter représente de son côté le tiraillement entre deux visions, mais aussi un lien fort et probablement durable : celui qui réunit deux façons de voir qui semblaient incompatibles de prime abord. Fabio Testi comme Warren Oates, eux-mêmes de couleur "grise", dénués de tous les archétypes du bien et du mal, du bon et du méchant, sont pour Monte Hellman les matériaux de sa synthèse. En quelque sorte ils sont les films, les représentations de l'Ouest américain qui, après avoir livré bataille, peuvent vivre ensemble ou séparément mais, quoi qu'il en soit, ont fini par s'exprimer chacun leur tour. Il est temps de s'accepter !

 

 

Même la provenance de sa production, italo-espagnole, ainsi que son titre original (Amour, plomb et fureur) indiquent à la fois les racines d'un "révisionnisme" historique, souvent voué au naturalisme, mais également les contradictions, tant dans les perceptions humaines que dans les illustrations faites au fil des décennies : la fureur et l'amour ont finalement toujours fusionné, souvent par fascination pour les pères et pour la légende, mais en passant par le plomb, c'est-à-dire par l'excès, lui-même issu d'une volonté de contradiction, presque morale finalement. Comme quoi l'iconoclasme souvent perçu puis mis en avant par le spectateur et le critique n'était pas tant le fait de détruire un mythe destiné à se nourrir de lui-même, celui du western américain, mais aussi et surtout de remettre un H au mot Histoire, tandis que la vérité se situe probablement entre les deux, et peut-être même un peu ailleurs, aussi.
En tout cas China 9, Liberty 37 est un joli film qui tombe à l'aube du crépuscule total d'un genre qui va bientôt tomber en désuétude, en Europe comme aux États-Unis, et il constitue, à sa manière, un post-scriptum à la mise en abyme opérée par "Mon nom est Personne", tout en puisant de façon formelle à la source d'un Budd Boetticher.

 

 

Mallox

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