mallox Super héros Toxic
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Posté le: Ven Oct 05, 2018 4:38 am Sujet du message: [M] [Critique] Meurtre pour un homme seul (1976) |
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Meurtre pour un homme seul - 1976
(The Next Man)
Origine : États-Unis
Genre : Thriller / Espionnage / Action / Film noir
Réalisé par Richard C. Sarafian
Avec Sean Connery, Cornelia Sharpe, Albert Paulsen, Marco St. John, Ted Beniades, Adolfo Celi, Charles Cioffi, Patrick Bedford...
Autres titres : Piège pour un homme seul / Le Grand Pari / L'Homme qui venait du désert / (The) Arab Conspiracy / Double Hit / El Arabe
En plein conflit du Moyen-Orient, Khalil Abdul Muhsen, Ministre des affaires étrangères de l'Arabie saoudite, essaye d'y apporter la paix. Les gouvernements en place ne sont pas du tout d'accord sur ses intentions et décident d'envoyer Nicole Scott, un agent "dressed to kill", afin de l'éliminer...
Meurtre pour un homme seul bénéficie d'une étonnante et très sèche mise en place. Ce n'est pas Sean Connery, alors au firmament de son statut de star, qui nous est présenté, mais son assassin potentiel.
Une mystérieuse organisation fait part de l'émergence économique de trois grands magnats de la finance en matière de pétrochimie, issus de L'OPEP. Des gens jugés économiquement dangereux et donc à éliminer. De là, ils se font tuer les uns après les autres et ce, dans divers pays. L'un d'eux, Al Sharif (Adolfo Celi) est tué à Nice, dans une chambre d'hôtel, par Nicole Scott (Cornelia Sharpe), l'un des agents au service de l'organisation, accessoirement tueuse à gages faisant froid dans le dos.
Entre alors en jeu son successeur en tant que ministre saoudien (Sean Connery) qui se lance dans une déclaration tonitruante à la tribune des Nations Unies : il conviendrait selon lui de faire la paix avec Israël pour renforcer la cohésion nationale, refonder l'OPEP et, ainsi, réserver la majeure partie des exportations pétrolières aux pays du tiers-monde.
De là, l'idylle peut commencer puisque Nicole Scott va bien entendu séduire un Khalil Abdul Muhsen qui lui, ne se laisse pas facilement impressionner.
Le temps d'une chanson d'amour triste interprétée en français (la musique est signée Michael Kamen, dont c'est le premier crédit au cinéma comme compositeur mais ce thème - "Nicole" - est chanté par un certain F.R. David ; d'origine tunisienne, il a principalement laissé "trace" en composant le thème principal de la série des "Joy".), s'ensuit un intermède romantique aux Bahamas mettant en scène notre chat(h) et notre souris. Des tueurs semblent débouler du monde entier, de nuit, de jour, couteau ou mitraillette à la main, envoyés par l'OLP (ou pas). La relation entre l'idéaliste et la femme fatale fonctionne plutôt, et si l'impression qui est donnée est de botter un peu en touche (on ne sait de quels pays viennent les tueurs et par qui ils sont payés) afin d'aborder trop frontalement des sujets fâcheux, voire carrément brûlants, Meurtre pour un homme seul peut se targuer, probablement de manière involontaire, de rester d'actualité. Le discours formulé est grosso modo celui-ci : le monde arabe détient les matières premières, Israël la technologie la plus avancée à un niveau mondial. Une assistance mutuelle est donc prônée avec Israël en partenaire égal. Un grand pas vers un Moyen-Orient libre de toutes influences politiques et économiques destructives, exercées par les grands pouvoirs de l'Est et de l'Ouest, lesquels ont intérêt, pour poursuivre leur guerre froide, de se servir des pays de l'OPEP et continuer à diviser les pays arabes d'Israël. Drôle de message, le film étant du reste émaillé d'attentats tendant à émousser cette volonté de paix. Une volonté de paix qui ressemble ici à un défi, limite à une déclaration de guerre aux pays souhaitant s'opposer à cette politique nouvelle.
Richard C. Sarafian est devenu le temps passant une sorte d’icône du Nouvel Hollywood, et un cinéaste qui n'a décidément pas toujours choisi la facilité, ni fait, à cette époque en tout cas, beaucoup de concessions. Mais ses films, de Fragment of Fear à "Vanishing Point", du "Convoi sauvage" à "Lolly-Madonna XXX", du "Fantôme de Cat Dancing" au plus tardif et plus léger L'Œil du tigre (cf critique), The Next Man étant bien entendu à rajouter à cette liste non exhaustive, peuvent se targuer quoi qu'il en soit de posséder un vrai pouvoir de tension ainsi qu'un sacré sens du spectacle. Leurs fins, régulièrement désillusionnées, y viennent, à l'instar de celle d'un Kowalski fonçant dans des bulldozers, contrecarrer un idéal : vivre libre ou mourir. Ce n'est en tout cas pas cet étonnant Piège pour un homme seul qui viendra contredire cela et Cornelia Sharpe se fait ici l'écho de Charlotte Rampling dans ce fameux plan de "Vanishing Point", coupé au montage, où elle incarnait plus qu'une auto-stoppeuse : la mort. Du reste, Sarafian n'est pas que cinéaste, il est aussi cinéphile et ce n'est pas un hasard si, le temps d'une scène, "King Kong" est cité. Les colosses, aussi forts soient-ils, finissent également par tomber...
Méconnu (il est sorti en France uniquement en province en avril 1978 sous le titre Piège pour un homme seul et durait initialement 107 minutes au lieu des 92, voire 87 actuelles pour des éditions réputées au rabais *), The Next Man est donc un film géopolitiquement visionnaire (il précède par exemple les accords de Camp David, extrêmement impopulaires dans le monde arabe et musulman) ou tout du moins toujours d'actualité, mais aussi un peu absurde, encore que cela prête à discussion ; assez peu convaincant également au niveau du message humaniste distillé, il s'avère cependant parfaitement rythmé et sa réalisation en fait un thriller aussi abracadabrant que prenant. Son réalisateur remettra cependant le couvert juste après dans le genre thriller politique à tendance paranoïaque avec "Sunburn", versant lui aussi dans l'action complotiste et mettant en scène un couple d'enquêteurs (Charles Grodin en détective de seconde zone et Farrah Fawcett en mannequin) devenant gênants à flirter avec la découverte du pot-aux-roses. Cette fois-ci, le ton y sera plus léger et l'on peut du coup considérer Meurtre pour un homme seul comme étant le dernier opus véritablement mélancolique de la carrière de son réalisateur, contraint dès lors à la concession.
Cornelia Sharpe (Les Casseurs de gangs, Venin...), qui sort de l'éprouvant Open Season, s'y montre étonnante en veuve noire "impénétrable" et Sean Connery fait le job avec vigueur pour un pari loin d'être gagné d'avance. Le couple-vedette est secondé par de solides second plans (Charles Cioffi en porte-parole syrien, Albert Paulsen en conseiller et chef de sécurité de l'électron libre saoudien, Adolfo Celi, la tête dans le sac, on y croise même le jeune Lance Henriksen en agent fédéral et Richard C. Sarafian fait une courte apparition...).
Bref, pour toutes ces bonnes (et mauvaises) raisons, The Next Man reste à découvrir !
En rapport avec le film :
* À découvrir "The Next Man", bien que ce serait à vérifier dans les hautes sphères cinématographiques ainsi que dans les arcanes du pouvoir politico-culturel, il est fort à parier que son parti-pris gêna au point, qu'à ce jour, il demeure quasi impossible de mettre la main sur une édition à la fois complète au niveau de la durée en même temps que de qualité plus correcte qu'un simple transfert vhs. Non pas que prôner la paix entre la diplomatie arabe et l'état d'Israël soit plus fâcheux que ça, mais les raisons pour lesquelles cette paix est prônée a pu faire hérisser quelques poils occidentaux.
- Les versions annonçant 110 minutes, a priori trouvables en VHS, en France, dont une chez Manhattan Video sortie en 1982 , une autre chez Carrère Vidéo contiennent pourtant toutes deux une version du film d'une durée effective de 86 minutes.
Manque dont pas loin de 20 minutes. On peut également supputer que les commanditaires des assassinats illustrés étaient peut-être plus explicitement désignés dans la version d'origine. Cela expliquerait pas mal de choses, en premier lieu l'aspect un peu nébuleux de "The Next Man".
- Un bootleg est sorti en 2011, une autre édition nomme le film "The Arab Conspiracy", de quoi alimenter certaines thèses ayant cours sur le propos raciste du film, ce qu'il n'est en aucun cas.
- "The Next Man" apparaît via sa VHS dans "Video Nasties: Moral Panic, Censorship & Videotape", sorti en 2010.
- Enfin, même sur wikipedia, "The Next Man" a fini par être crédité d'une durée de 86 minutes.
An Occidental Conspiracy ?
# Selon Encyclociné, "The Next Man" aurait également connu une sortie en vidéo sous le titre "L'Homme qui venait du désert" ; si tel est le cas, il s'agissait probablement de profiter du succès récent de "Le Lion et le vent" de John Milius dans lequel Sean Connery interprétait un chef berbère (ainsi que de fusionner avec la notoriété du moment de David Bowie en étranger de l'espace).
Un autre titre français de sortie mentionné serait "Le Grand Pari". Sans doute une allusion au Yom Kippour (jour du "Grand Pardon", le jour le plus saint pour les Juifs) et à la Guerre du Kippour.
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Dernière édition par mallox le Sam Fév 16, 2019 2:34 pm; édité 1 fois |
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