Fables : 1001 nuits de Neige
Genre: Fantastique , Féerie , Comics , Contes de fées
Année: 2008
Pays d'origine: Etats-Unis
Editeur: Panini Comics
Collection: Vertigo Deluxe
Scénario:
Bill Willingham
Dessin:
Esao Andrews, Brian Bolland, John Bolton, Mark Buckingham, James Jean, Micheal Wm Kaluta, Derek Kirk Kim, Tara McPherson, Jill Thompson, Charles Vess, Mark Wheatley
 

Décidément, le hasard veut que ma manière d'aborder "Fables" soit désordonnée. Après avoir commencé par les tome 5 et 6 et alors qu'il me reste encore à revenir vers les premiers tomes, voilà que ce 1001 nuits de Neige me tombe dans les mains. Heureusement, il s'agit d'un hors-série qui peut très bien se lire en dehors de la série-mère, que je connais tout de même un peu.

L'album se compose d'une dizaine d'histoires courtes de longueurs diverses (certaines ne font que deux planches, les plus longues une trentaine), illustrées à chaque fois par un dessinateur différent dont le style est en harmonie avec le ton de chaque récit, et qui toutes se situent dans le décor des contes de fées et mettent en scène certains Fables que le lecteur de la série connaît déjà. Ces contes sont précédés d'une introduction qui voit Blanche Neige se rendre en Orient pour négocier une alliance entre Fableville et les royaumes du sultan Shahryar contre l'Adversaire.

Mais Blanche ne tarde pas à se retrouver prisonnière et être la victime prochaine d'un rituel où chaque femme ayant passé la nuit avec le sultan est condamnée à être exécutée dès l'aube. Toutefois, Blanche n'est pas le genre de femme à se laisser impressionner et, fine mouche, propose au sultan de lui raconter une histoire provenant des Royaumes des Fables afin de retarder le sort qui l'attend. Tel Shéhérazade dans les Contes des Milles et Une Nuits, elle parvient à si bien intéresser le sultan que celui-ci redemande chaque nuit une nouvelle histoire, reportant toujours plus loin une exécution qui devient de plus en plus hypothétique.

 

Comme dans tous les recueils de ce genre, les histoires imaginées par le scénariste de toute la série des "Fables", Bill Willingham, sont d'un intérêt variable (de même que le style de chaque illustrateur) mais toutes ont en commun le détournement souvent bien inspiré, subtil et iconoclaste, de certains éléments de contes célèbres que Willingham propose pour le plus grand plaisir du lecteur adulte et en inventant certains détails, comme donner un passé à certains personnages (la sorcière du conte d'Hansel et Gretel par exemple).

Dans Les leçons d'escrime, une jeune femme récemment mariée au seigneur d'un royaume demande à son époux de lui prodiguer des leçons d'escrime. Parallèlement, plusieurs nains aux moeurs débauchées se font massacrer en quelques semaines (ils seront sept en tout, tiens... tiens...) et la tension monte entre les humains de la surface et les nains vivant sous terre. Une guerre semble imminente si le seigneur ne parvient pas à arrêter le coupable. La conclusion de cette histoire à la fois raffinée et cruelle, tout en non-dits, ne manque pas de piquant. Quand aux illustrations de John Bolton, elles se distinguent par leur aspect peinture et une mise en couleurs directe d'un joli effet.

Ce qui n'est pas le cas, hélas, dans "Les tourtes de Noël", une petite histoire sympathique où se distingue une fois encore la ruse de Renart mais gâchée par des couleurs trop criardes servant bien mal le dessin de Mark Buckingham (le dessinateur attitré de la série Fables depuis le tome 3, quelle ironie !). Dans le registre de l'humour, Sous l'oeil du crapaud est très plaisante. A partir du postulat bien connu de crapaud changé en prince suite à un baiser de la belle, le scénariste s'amuse à y ajouter une conséquence imprévue et cocasse : le prince redevient crapaud à chaque fois qu'il est gagné par la peur, l'excitation ou l'anxiété. A charge alors pour son épouse de l'embrasser à nouveau pour rétablir la situation. Modèle réduit est une histoire qui intéressera particulièrement ceux qui connaissent déjà la série car elle s'attache à nous montrer la naissance et l'enfance de Bigby, futur shérif de Fableville. Un Bigby qui donne ici toute l'ampleur de sa sauvagerie dans son époque Grand Méchant Loup. Le dessin de Mark Weathley, au style qui a la spontanéité un peu brouillonne des esquisses et un trait assez épais, ne m'a pas spécialement conquis mais il sert bien l'âpreté de cette histoire.

"Diaspora" est, avec la première et la dernière, une des meilleures du recueil et sa présentation est un peu particulière car elle insère un flash-back illustré par un second dessinateur au style très différent de celui qui introduit le conte et le conclu. Fuyant les armées de l'Adversaire, Blanche et Rose se réfugient dans une forêt et rencontre la sorcière de la Maison en Pain d'Epice en bien fâcheuse posture. Celle-ci leur racontera son passé et les circonstances qui l'ont amenée à se retirer du monde.

Alors que le dessin de Tara McPherson est d'un style volontiers naïf et lisse (mais élégant) et la mise en couleurs froide, celui de Esao Andrews est au contraire plus rugueux et servi par des couleurs très chaudes qui embrasent littéralement les planches de cet intermède instructif.

Je citerai encore "Partage équitable", une charmante histoire, quoique très classique, qui montre toute la générosité du roi Cole (futur maire de Fableville) et dont les planches colorées où s'agitent gaiement toute une ménagerie d'animaux parlants autour du roi bonhomme distille une gaieté communicative.

 

Maintenant, si 1001 nuits de Neige est un excellent recueil qui s'intègre agréablement dans la série Fables mais pourra aussi séduire ceux qui ne l'ont jamais lue, j'émettrai tout de même quelques réserves. Je n'y ai pas retrouvé l'originalité, la fantaisie et la richesse des intrigues multiples dans lesquels se débattent les protagonistes de la série-mère (et pourtant je n'en ai lu que deux tomes pour le moment !). Ni surtout ce qui fait, pour moi, l'intérêt majeur de "Fables" : la transplantation et la modernisation de personnages de contes bien connus dans le cadre réaliste et contemporain de notre monde. Car c'est justement le contraste entre le cadre a priori restrictif et les fantaisies importées par les Fables (la magie, les transformations, les créatures de la Ferme) qui rend cette série délicieusement hétéroclite et décalée.

En revanche, lorsque les Fables se trouvent dans leur "élément naturel" comme ici et malgré les efforts du scénariste, nous restons malgré tout dans un recueil de contes assez classique et tout de même plus anecdotique. Bref, c'est autre chose. Ni meilleur, ni pire. Simplement différent.

Mais il faut sans doute voir aussi dans mon sentiment un peu mitigé ma préférence pour les albums de bandes dessinées qui proposent une seule longue histoire plutôt qu'une succession de petites.

Que cela ne vous empêche pas pour autant de déguster cet album qui reste très recommandable et intéressera particulièrement les amateurs de contes.

Pour ma part, j'ai surtout hâte de découvrir les autres tomes de la série Fables.

 

Note : 7,5/10

 

Raggle Gumm

 

A propos de ce comics :

 

- Site de l'éditeur : http://www.paninicomics.fr/

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