Scotland Yard contre le Masque
Titre original: Die Bande des Schreckens
Genre: Krimi
Année: 1960
Pays d'origine: Allemagne (RFA)
Réalisateur: Harald Reinl
Casting:
Joachim Fuchsberger, Karin Dor, Elisabeth Flickenschildt, Dieter Eppler, Ulrich Beiger, Karin Kernke, Fritz Rasp, Karl-Georg Saebisch, Eddi Arent, Ernst Fritz Fürbringer...
Aka: The Terrible People
 

Londres - Un petit vieux en chapeau melon se rend au guichet d'une banque. Ce gentleman un peu excentrique est en fait Clay Shelton, faussaire, maitre chanteur et assassin, spécialisé dans le racket des banquiers, mais l'inspecteur Long de Scotland Yard l'attend. S'ensuit une arrestation particulièrement mouvementée où l'intervention du banquier Monkford s'avère décisive.
Plus tard - A quelques minutes de son exécution, aux responsables de son arrestation et de sa condamnation, venus le voir pour respecter ses dernières volontés, Shelton annonce qu'il se vengera par-delà la mort et que la main de la potence (sic) viendra frapper tous ceux qu'il a convoqué ici, bourreau compris. Long et la plupart des personnes présentes prennent ses déclarations sur le ton de la plaisanterie, mais peu de temps après Long échappe à une tentative d'assassinat, son agresseur étant mystérieusement abattu. Le soir même, le procureur qui a plaidé contre Shelton meurt dans un accident de voiture assez louche. Une silhouette ressemblant à Shelton est même vue près des lieux du drame. Shelton étant réputé pour n'avoir eu aucun complice, assiste-t-on a une vengeance post-mortem perpétrée par son spectre ?

 

 

Après le succès de La grenouille attaque Scotland Yard et Scotland Yard contre Cercle rouge, Preben Philipsen (le P.D.G. de la Rialto et de Prisma-Film) et son alter ego allemand Waldfried Barthel (directeur et copropriétaire avec Philipsen de Constantin-Film) mettent sur pied un plan de production pour les adaptations d'Edgar Wallace.
Concrètement, cela ne concerne dans un premier temps que quatre romans, soit chronologiquement "The Terrible People" (en allemand "Die Bande des Schreckens") qui donnera le présent film (Scotland Yard contre le Masque), The Green Archer (en allemand "Der grüne Bogenschütze") qui donnera L'archer vert, "The Dark Eyes of London" (en allemand "Die toten Augen von London") qui donnera Les mystères de Londres et enfin, "The Daffodil Mystery" (en allemand "Das Geheimnis der gelben Narzissen") qui donnera "Le Narcisse Jaune intrigue Scotland Yard".
Le plan prévu suit une curieuse organisation alternée, sans doute due au fait que Philipsen est impliqué dans deux réseaux de distribution (Prisma-Film donc et Constantin-Film), organisation mise en place d'ailleurs dès les deux premiers films et qui devait donc se poursuivre avec les quatre métrages cités plus haut à un rythme plus soutenu, d'environ un film tous les quatre/cinq mois. Dans cette organisation devaient alterner, ce que j’appellerais de façon purement arbitraire Krimis de premier choix, distribués par la Constantin-Film et dirigés par Harald Reinl avec Joachim Fuchsberger en vedette, et Krimis de second choix distribués par la Prisma-Film et dirigés par Jürgen Roland avec Klausjürgen Wussow en vedette.

 

 

Les circonstances vont faire que cette belle planification ne se mettra jamais réellement en place. La sortie d'un Edgar Wallace concurrent (Le vengeur défie Scotland Yard - "Der Rächer") obligeant la Rialto à distribuer Scotland Yard contre le Masque en avance sur les prévisions. Puis, Philipsen se rendant compte que posséder deux compagnies de distribution dans un même pays n'était ni efficace ni économiquement viable, la Prisma-Film fermera ses portes aux débuts de l'année 1961.
D'un autre côté, les résultats décevants de L'archer vert mettront un terme à la collaboration de Roland et Wussow avec la Rialto. Par ailleurs, Reinl sera provisoirement débauché par Brauner pour succéder à Fritz Lang pour la réalisation des "Docteur Mabuse" de la CCC. S'il travaillera par la suite pour les deux firmes concurrentes (Rialto et CCC pour ceux qui, au fond de la classe, ne suivent pas), il ne reviendra qu'épisodiquement aux Krimi, Horst Wendlandt préférant l'employer pour les sauerkraut westerns. Enfin (last but not least), l'arrivée de Wendlandt à la tête de la branche allemande de la Rialto (Philipsen abandonnant la production effective de films pour se consacrer à la gestion de la société) conduira à une production plus pragmatique et moins planifiée, mais aussi plus intensive, des Krimis, et conduira surtout à l'arrivée de Vohrer en tant que réalisateur principal (des Krimis Rialto) et, plus tard, d'Heinz Drache en tant qu'alternative crédible à Fuchsberger.

 

 

Bon, maintenant parlons du film en lui-même. Après les épisodes Roland et Anton qui livrèrent des métrages sympathiques mais plutôt dans la moyenne basse du genre, Reinl (de retour aux affaires) nous offre un film dans la lignée de La grenouille attaque Scotland Yard, rythmé et bien dosé en meurtres, suspense et humour.
Afin de ne pas me répéter et sembler faire un copier-coller de la critique de "Der Frosch mit der Maske", je me contenterai de souligner ce qui diffère dans les deux films ; mais on dira que dans l'ensemble leurs qualités et leurs défauts sont identiques et les qualités l'emportent largement sur les défauts. Certes, ici "le méchant" est moins original et charismatique que dans le film précédent de Reinl. La "bande des secrets" du titre a beau être terrible en version anglaise, elle est bien moins impressionnante que celle de la grenouille. Les meurtres sont moins "graphiques" mais plus imaginatifs et la violence plus feutrée. L'intrigue est elle plus compréhensible que la moyenne (des Krimis) et les faiblesses de celle-ci sont compensées par le sens du rythme de Reinl. D'un autre côté, le personnage comique incarné par Eddi Arent paraît encore plus artificiellement plaqué à l'histoire que d'habitude.
Mais là où Scotland Yard contre le Masque l'emporte sur son illustre ainé, c'est au niveau du casting féminin. Si côté masculin on retrouve, entourant Fuchsberger, à peu de chose près les mêmes acteurs que dans les deux précédents opus de la Rialto, nous avons ici les premières participations dans le Krimi des, toutes deux sublimes à leurs manières, Karin Dor et Elisabeth Flickenschildt. La belle et la bête en quelque sorte.

 

 

Pour ne pas sombrer dans un lyrisme trop lourd, je ne dirai pas ici tout le bien que je pense de ces deux actrices, physiquement (et même au niveau de leur jeu) aux antipodes. Je me contenterai donc d'écrire que Dor (épouse à l'époque de Reinl, précision qu'apprécieront les lecteurs de Voici et autres magazines culturels) et Fuchsberger (marié à Gundula, vous avez bien lu, sa manager et impresario, autre précision à destination du même public) forment un très beau couple, particulièrement bien assorti, sans doute "le" couple du Krimi. Et Elisabeth Flickenschildt est très bien assortie avec l'horloge maorie du film. Notons qu'ici, à défaut de "bête humaine", on retrouve deux autres incontournables des Edgar-Wallace-Filme, la machinerie infernale (ou le bricolage couillonnesque, suivant la façon de voir les choses) et l'ascenseur (oui l'ascenseur) ici en panne.
Pour l'anecdote, précisons que Scotland Yard contre le Masque est le premier Krimi Rialto entièrement tourné en Allemagne, bien que pas très loin de la frontière danoise puisque au Schleswig-Holstein et à Hambourg. Les extérieurs du manoir de Sir Godley, le père de Long (respectivement Fritz Rasp et Joachim Fuchsberger), ont été tournés dans la cour intérieure renaissance de la mairie de Hambourg, raison pour laquelle on ne la voit que dans des scènes nocturnes. Autre anecdote, le personnage de Fuchsberger porte un surnom, "Blacky", qui deviendra celui de l'acteur.
Scotland Yard contre le Masque fut très bien reçu par la critique et le public allemand.

 

 

Sigtuna

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