Godzilla - (Montage original)
Titre original: Gojira
Genre: Drame , Kaiju Eiga
Année: 1954
Pays d'origine: Japon
Réalisateur: Ishirô Honda
Casting:
Takashi Shimura, Momoko Kochi, Akira Takarada, Akihiko Hirata, Sachio Sakai, Fuyuki Murakami, Ren Yamamoto...
 

Suite à des essais nucléaires, un dinosaure de l'époque du jurassique est réveillé dans les eaux du Japon. Monstre radioacif malgré lui, Godzilla s'avèrera vite très dangereux pour les environs. Ce dernier ne peut en effet pas faire un pas sur terre sans faucher un quelconque bâtiment. D'un côté, il y aura les professeurs, l'un d'entre eux souhaitant étudier le spécimen rare que représente Gojira, un autre détenant le secret pour le détruire grâce à une arme bien plus puissante que la bombe atomique ; de l'autre, les politiciens, souhaitant dissimuler la cause des événements, et par là le peuple, désirant en informer le monde entier... Un gigantesque débat remettant en cause l'humanité précèdera un déploiement de force de taille pour lutter contre notre terreur et l'anéantir...

 


Après avoir suivi des études d'art à l'université, Ishiro Honda devient assistant-réalisateur, côtoyant et apprenant auprès des plus grands (Akira Kurosawa ou encore Sadao Yamanaka). En pleine ascension, sa carrière sera malheureusement interrompue par son départ dans l'armée. C'est donc huit ans plus tard, à son retour des contrées chinoises, qu'il se spécialisera dans les effets spéciaux aux côtés d'Eiji Tsuburaya. Marqué par le choc que provoquèrent les désastres d'Hiroshima et Nagasaki, il donnera naissance, moins d'une décennie après les événements, à Godzilla, fleuron des monstres au cinéma.

Ce dernier, attention, n'est néanmoins ni le nanar pour lequel certains de ses descendants pourraient bien sans le vouloir le faire passer, ni un film puéril et anodin pour petits monstres en culottes courtes. Non, Godzilla est l'hommage à visée collective que porte le cinéma fantastique aux victimes des catastrophes nucléaires. Il est à la fois la métaphore des craintes et des dommages causés par l'arrivée de ces bombes, mais aussi le premier film, sans en être réellement un, de Keiju Eiga.

 


Godzilla est plus sombre et pessimiste qu'il ne laisse paraître ; ses effets spéciaux cheap et naïfs ne faisant que renforcer chez le spectateur actuel une certaine nostalgie, (pas) en mal de respect, vis à vis de ce qui était fait avant. Notre dinosaure radioactif apparaîtra donc tout d'abord deux fois, discrètement et jamais dans toute sa grandeur, comme timide face à l'idée de se dévoiler. Serait-il la peur et la honte cumulées des hommes responsables des méfaits atomiques? Possible, mais ces sentiments ne dureront qu'un temps. Il s'amènera en effet une bonne fois pour toute, dans un somptueux vacarme électrique et fantastique, afin de se tracer maladroitement son petit chemin dans la ville. Ici, tout contribuera à une apparition réussie : plans embarqués, d'ensemble, de panique, d'une noirceur et d'une violence absolue... Bref, un véritable condensé de film catastrophe pour un film monstre. 1 000 000 de dollars y ont d'ailleurs été investis, et, soyons honnête, même s'il en résulte de superbes tableaux et qu'il a dû mouiller plus d'une culotte en son temps, le film impressionne beaucoup moins à présent. Enfin, Godzilla n'a pourtant rien de méchant... il est juste un peu brut. On lui trouvera même un certain charme, et il sera tant bien que mal difficile de ne pas se sentir concerné par le sort qui lui est réservé.

Tout de même, il reste assez difficile d'accepter tout cela comme un simple keiju-eiga, qui plus est, se trouve être le premier du nom. Non, son approche semi-documentaire nous en empêche et indique clairement les intentions de son réalisateur : montrer aux grands comme aux petits, par le biais de ses maquettes géantes et autres jouets électroniques, que l'on récolte ce que l'on sème, que les hommes ne sont souvent que trop incapables de contrôler ce qu'ils inventent, générant des choses affreuses (Godzilla, par contre, est classe, je tiens à le préciser), et surtout, clamer au monde entier les malheurs causés par la bombe atomique. Il se présente alors comme le porte-parole d'une population, Godzilla en étant le plus humble des apôtres. Ce dernier, oui, est bien l'une des grosses bébètes les plus humaines que l'on puisse trouver au ciné, à côté de son cher et tendre, King Kong.

 


N'étant pas un "vrai" film de monstre, Godzilla a été censuré aux USA en étant affreusement remonté, avec des scènes incluant un certain Raymond Burr (L'homme de fer...). Ce n'est que dans les années 90, suite à sa sortie en VHS chez HK, que l'on a pu redécouvrir le montage original. Ishrirô Honda aura toujours renié la paternité du film dans sa version sabotée.

On notera aussi une bande originale de qualité d'Akira Ifukube, constituée de violons tendus et harmonieux, ainsi que des acteurs investis on ne peut mieux dans leur boulot. On remarquera la performance des enfants victimes des désastres de Godzilla, proposant une composition d'une crédibilité si forte que l'on croirait voir des extraits de reportage sur l'après bombe atomique. En dépit de cette rigueur et de ce sérieux des plus asiatiques, on fermera les yeux sur quelques longueurs pouvant nuire aux bonnes élancées rythmiques ponctuant le film par instants. Tout cela reste un travail concis et efficace (la scène d'ouverture est un exemple à suivre et s'inspire d'ailleurs de faits réels) qui, sans soucis, hisse le premier épisode d'une immense sage au rang d'œuvre de qualité et de référence.

 

The Hard
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