Ci risiamo, vero Provvidenza ?
Genre: Western spaghetti , Comédie
Année: 1973
Pays d'origine: Italie
Réalisateur: Alberto De Martino
Casting:
Tomas Milian, Gregg Palmer, Carole André, Federico Boido, Luciano Catenacci, Ángel Ortiz, Yu Ming Lun, Manuel Gallardo, Carla Mancini...
Aka: Here We Go Again, Eh Providence ?
 

Providence (Tomas Milian) est un chasseur de primes. Ça ne fait pas de lui, pour autant, un être sans foi ni loi. Aidé de son fidèle comparse chinois, Chao (Yu Ming Lun), il fonce à toute berzingue, à bord - temps modernes obligent - de sa voiture locomotive, conduite par l'asiatique déchaîné. Direction : la salle de tribunal au sein de laquelle son pote Hurricane Kid (Gregg Palmer) s'apprête à être jugé pour détournement de fonds. C'est avec malice et zèle qu'il parvient à le faire libérer, le faisant, pour se faire, passer pour victime. Faut dire que Providence, c'est un peu une danse des p'tits pains permanente à lui seul... Tout comme Charlot, il n'y va pas avec le dos de la cuillère, mais plutôt avec les dents de sa fourchette !
Tout juste Hurricane Kid libéré qu'il tombe par hasard dans une réception bourgeoise, dans laquelle, faim oblige, il s'incruste. Hop, c'est le coup de foudre ! La comtesse Pamela de Ortega (Carole Andre) lui tape dans l'œil en même temps de dépêcher un ange afin de transpercer le cœur de notre Charlot, qui tombe amoureux illico presto. Dès lors, il n'a de cesse de demander sa main à son père (Luciano Catenacci). Petit hic, celle-ci est promise depuis déjà fort longtemps à un officier de l'armée nordiste, le capitaine O'Bannon (Rosario Borelli). Mais l'alternative existe ! Si Providence parvient à trouver un million de dollars dans la semaine, le conte Ortega lui donnera la main de fille...



Voici donc les secondes aventures de notre héros providentiel après le sympathique "On m'appelle Providence", tourné l'année précédente par l'intéressant Giulio Petroni ("Tepepa"/ "La mort était au rendez-vous"), dans lequel on trouvait déjà le joyeux mélange de western et d'hommages burlesques envers le cinéma slapstick muet, mais qui payait également son tribut aux Marx Brothers ou encore à l'esprit déjanté d'un Tex Avery, ou même d'un Blake Edwards (lui-même ayant souvent puisé chez les artistes susnommés). Ce sont encore les même références que l'on retrouve dans ces nouvelles (et trépidantes) aventures, à l'exception notable que l'aspect social y est un tantinet plus développé et conforme aux ‘chaplineries' d'antan, dans lesquelles notre vagabond n'hésitait pas à aller voler le riche pour à la fois donner à la veuve et l'orphelin, mais aussi penser à lui-même de la façon la plus roublarde.
C'est Alberto de Martino qui est sollicité pour venir tourner cette suite. Pour ce faire, celui-ci s'entoure des services du même scénariste, Franco Castellano ("I maniaci", "L'espion qui venait du surgelé"), qui finalement décline tout ce qui se trouvait déjà dans l'original, ainsi que des deux mêmes acteurs principaux, l'incontournable Tomas Milian et Gregg Palmer, acteur pourtant issu de la télévision américaine, puis de westerns avec John Wayne ("Chisum", "Rio Lobo"), qui se fait ici, tout comme dans l'opus précédent, plus ‘Bud Spencerien' que jamais. Les bases étant posées, que dire de cette suite ? Et bien, non seulement elle est réussie, mais parvient à dépasser l'original. En quelque sorte, pour user d'un jeu de mot facile, elle est assez providentielle.



Ce qui marque en premier lieu, c'est le soin apporté aux décors, et, à cet égard, il convient de signaler qu'on assiste à une réussite visuelle exemplaire. Il n'y a qu'à citer son splendide et trop méconnu film d'horreur gothique, "Monster/The Blancheville Monster" tourné en 1963 ou encore un "Antéchrist" à venir, qui, quoiqu'on en pense, recelait de bien de splendeurs visuelles, pour pouvoir affirmer sans crainte que De Martino est un réalisateur soucieux de la qualité graphique des ses films et s'entoure, pour bien faire, de techniciens au service de ses visions bien souvent barrées. Il est peu dire qu'elles sont dans "Ci risiamo, vero Provvidenza ?" en totale adéquation avec le script délirant de Castellano. Ce à quoi on assiste, c'est à un déferlement de trouvailles plus jouissives et absurdes les unes que les autres, avec des acteurs qui jouent le jeu à fond. Tomas Milian que l'on sait porté, lorsqu'il est en roue libre, vers le cabotinage de bas étage ("Le blanc, le jaune et le noir"), transcende complètement ce trip psychédélique, par un cabotinage ici absolument justifié. Il trouve un rôle à sa démesure et c'est avec un entrain et un dynamisme indécrottables qu'il se déchaîne dans un véritable festival. Il faut dire que les situations ne manquent pas...

 

Celui-ci se rase en plein tribunal, envoyant sa mousse à raser dans l'œil de son comparse afin de le rendre plus triste, puis, lors de ses multiples aventures afin d'acquérir le million convoité, use de tous les stratagèmes les plus ‘hénaurmes'. On passe d'une scène de salle de jeu où il sort un aimant géant afin de truquer la direction de la bille pour l'amener vers le numéro joué par Hurricane Kid, à d'autres, toutes aussi farfelues. Alors que nos comparses sont faits prisonniers par des indiens minés par la sécheresse (donc le chef arborera des couleurs de guerre ressemblant à un jeu de morpion), celui-ci, grâce à son parapluie, déclenche un orage vigoureux et passera alors non pas pour un sourcier, mais comme vous vous en doutez, pour un sorcier. Plus tard, tandis qu'il s'apprêtera à se faire exécuter par le peloton de soldats nordistes, il se transformera en pigeon pour attirer une meute d'oiseaux venant déféquer sur ce même peloton, ce qui, comme chaque fois, lui permettra de s'en sortir. L'une des scènes les plus délirantes demeure celle où Hurricane et Providence construisent une fausse banque avec des legos géants afin de récupérer ensuite l'argent des habitants de la ville. Dépossédé de son pistolet, Providence réapparaîtra sans discontinuer, au grand dépit du capitaine O'Bannon, ce, avant de tenter d'attaquer un train rempli d'or, dont le même capitaine est en charge. Plus tard encore, il comprendra que le père de la comtesse n'est autre que Cian-ku-là, le dangereux criminel chinois recherché, et, dans une gigantesque partie de kung-fu contre ses hommes de main, jouera au trampoline tandis que son ami Chao (excellent Yu Ming Lun que l'on ne reverra au cinéma que dans "Journal intime" de Nanni Moretti), se déchaînera comme tout vrai chinois qui se respecte. Il y aura également un ballon dirigeable et un paquet d'autres aventures que je ne dévoilerai pas pour laisser au lecteur les joies de la découverte.

 

Même si la plupart du temps, Gregg Palmer sert plus de faire-valoir à Milian qu'autre chose, on pourra également penser qu'il remplace avantageusement un Bud Spencer dans un rôle qui semblait revenir à ce dernier. Il est vrai aussi que le tandem qu'il forme avec Tomas Chaplin fait fortement penser au duo que le gros Bud a (trop) souvent formé avec le sympathique Terence Hill. Carolé André ("Le dernier face à face") est, il est vrai, assez peu exploitée sinon comme prétexte. Pour faire bref, nous dirons que c'est tant mieux car c'est au profit d'un rythme burlesque, propre aux slapsticks (quelques images accélérées viendront émailler certaines séquences), un rythme à la fois, vif, rapide et très expressif, le tout dans des décors somptueux, qui contribue à faire avancer à un train d'enfer la drôle de locomotive de nos trois loustics complètement allumés. N'oublions pas de citer au passage l'apparition de Carla Mancini en nonne, laquelle s'occupe de quelques simplets répondant aux doux noms de Trinita, Sartana et Ringo. La partition de Morricone ne gâche rien à la fête, elle est en totale adéquation avec l'esprit du film, un brin concassée et comme explosée de l'intérieur par de petits lutins. L'ensemble, vous l'aurez compris, est une véritable convocation des sens.
Pour conclure, disons que "Ci risiamo, vero Provvidenza ?" est un film original, totalement foutraque et par moments jubilatoire ; un mélange incontestablement réussi quoiqu'inégal, autant qu'un hommage assez majestueux au cinéma comique muet. Une sortie dvd avec des sous-titres français serait de bon aloi.

 

Mallox

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