Extrême Préjudice
Titre original: Extreme Prejudice
Genre: Western , Polar
Année: 1987
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Walter Hill
Casting:
Nick Nolte, Powers Boothe, Michael Ironside, María Conchita Alonso, Rip Torn, Clancy Brown, William Forsythe...
 

Une ville frontière près du Mexique engage Jack Benteen, un Texas Ranger, pour y remettre de l'ordre et lutter contre les trafiquants de drogue. Mais Cash Bailey, l'un d'eux, est aussi un ami d'enfance de Jack. Le seul lien qu'ils aient encore est Sarita, la petite amie de Jack, qui va se rendre d'elle même comme otage à Cash et ainsi être assurée que Jack ne viendra pas menacer les petites affaires de Cash...

 

 

Bizarrement, si certains réalisateurs bénéficient de leur vivant ou après leur mort d'une quelconque reconnaissance (méritée ou non), d'autres tombent inexplicablement dans un oubli poli. C'est le cas du brave Walter Hill qui fut, il ne faudrait pas l'oublier, un des piliers du film d'action "couillu" des années 70/80. "Le Bagarreur", "Le gang des frères James", "Driver", "48h", Sans Retour, "Les rues de feu"... des films certes pas toujours réussis mais qui ont marqué leur époque et toute une génération de cinéphiles et de futurs cinéastes. Son style brut et efficace, Walter le doit à ses maîtres (Howard Hawks, Raoul Walsh...), dont un certain Sam Peckinpah pour qui il travaillera sur le scénario de "Guet-Apens". Sam était le cinéaste des excès avec ses personnages typés et sa violence graphique ; en digne fils spirituel, Hill suivra sa route et n'en déviera pas d'un iota, ce qui lui aliénera une partie de la critique lui reprochant un cinéma trop hiératique, comparé à ses confrères de l'époque comme Spielberg ou Coppola. En 1987, il décide de réaliser Extrême Préjudice, véritable hommage au grand Sam et à son chef d'oeuvre La Horde Sauvage, le désert brûlant, les flingues qui brillent, un Mexique picaresque, des personnages aux caractères trempés liés par une amitié virile et un respect réciproque, et des impacts de balles de la taille d'une tasse à thé... difficile de nier l'influence du maître.

 

 

Le scénario est simple et présente deux amis d'enfance que la vie a séparé : d'un côté le Texas Ranger Jack Benteen, un bourlingueur qui, de retour chez lui, s'est engagé du côté de la loi ; en face, son meilleur ami Cash Bailey, devenu le plus gros trafiquant à la frontière du Mexique. Leur point commun : la belle Sarita, ex-maîtresse de l'un, devenue la compagne de l'autre. Ajoutez une joyeuse bande de baroudeurs dont la mission semble des plus obscures et vous obtiendrez un mélange plus détonnant qu'une bouteille de tequila restée au soleil. Comme la rivière contourne l'obstacle, les hommes évitent les difficultés, ce qui explique les fleuves tortueux et les hommes corrompus. Ce petit laïus, récité par Rip Torn à son protégé Jack, résume parfaitement le caractère du personnage de Cash Bailey, trafiquant ayant choisi la facilité. Face à lui, le personnage de Nick Nolte, un Texas Ranger complètement anachronique par sa loyauté, issu des influences du brave Walter (et de John Milius son scénariste, rock'n'roll & surf), influence qui se remarque jusque dans les plus petits détails comme le poster de Jayne Mansfield accroché dans le commissariat, au lieu d'une quelconque Pamela (distinguée) Anderson. De ses aînés, Hill hérite d'une technique implacable, d'un sens du cadre aujourd'hui oublié et des caractères stéréotypés à l'extrême mais toujours interprété avec talent par une brochette d'acteurs (souvent sous estimés) qui incarnent littéralement leurs personnages. Le tout mis au goût du jour par une vision cynique et pessimiste de la société américaine typiquement post Vietnam, sans oublier les excès de violence contemporaine décortiqués à l'excès, angles multiples et ralentis, influences qui seront dégurgitées par le cinéma d'action destructuré et bordélique que nous connaissons aujourd'hui. Car il ne faut pas oublier que Walter Hill fait partie de ces réalisateurs qui ont fait le trait d'union entre le cinéma classique et viril des années 60 et la nouvelle vague parkinsonienne des années 90, une nouvelle vague qui semble avoir mal digéré cet héritage, ne retenant que l'aspect visuel et tape à l'oeil.

 

 

Pour réaliser son film Hill, va s'entourer de quelques fidèles et de "mavericks" habitués au cinéma d'action américain, les heureux producteurs de "Rambo", le scénariste / réalisateur John Milius (le béret vert du cinéma américain), le génial compositeur Jerry Goldsmith qui signe encore une partition inoubliable, et Matthew F. Leonetti, directeur artistique, qui réussit à restituer la chaleur oppressante et brûlante du Texas, lui aussi un habitué des films d'action comme "Red Heat", "Action Jackson", "Commando", "Another 48h",... Comme dans la plupart de ses films, Hill s'appuie ici sur un solide casting de gueules et de durs à cuire, avec en tête le duo Nick Nolte / Powers Boothe que le réalisateur connaît bien pour avoir dirigé le premier dans "48h" et le second dans Sans Retour. A leurs côtés, on retrouve un véritable festival de seconds couteaux : Michael Ironside ("Scanner", "V", "Total Recall"), Rip Torn (The Beastmaster, "Men in Black"), Clancy Brown ("Highlander") et William Forsythe ("Dick Tracy", "Dead Bang"). Une seule femme au casting : la piquante Maria Conchita Alonso, une actrice cubaine qui, à l'époque, est apparue dans quelques films d'action ("Predator 2", "New York 2h du matin", "The Running Man", "Mc Bain"...) et dont la chevelure noire et le regard de braise ont hanté les nuits de pas mal de pistoleros des deux côté du Pecos, caramba !
Tout ce beau monde (méchants et gentils) va s'affronter, s'aimer, se haïr, se réconcilier, se trahir ou se sacrifier pour finalement se retrouver lors du règlement de compte final qui fera le tri par le vide. Peut-être un peu paralysé par l'enjeu/hommage de son film, Walter Hill signe un film un peu trop liturgique mais dont l'intégrité n'est pas à mettre en doute, à tel point que certains pourraient être déçus. En fait, c'est le genre de film qu'il faut visionner plusieurs fois pour bien l'apprécier.

 

 

Le film fut un échec cuisant au box office, en partie dû à une campagne de promotion complètement à côté de son sujet. En effet, le film fut vendu par Carolco (producteur des Rambo) comme un ersatz de "Rambo 2" ; visionnez un peu le teaser pour constater l'étendue des dégâts. C'est aussi pour Walter l'un de ses derniers films majeurs avant d'entamer les années 90 et de tirer ses dernières cartouches ("Les Pilleurs", "Dernier Recours"). Aujourd'hui, Walter Hill s'est tourné vers la télévision, où il est consultant de l'une des meilleures séries du milieu des années 2000 , "Deadwood", dont il réalisera un épisode qui lui vaudra un Emmy Awards pour sa réalisation. Au fait, la série est un western ! Longue vie, Walter !

The Omega Man

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