Madame Mirage 1
Titre tome: Ecran de fumée
Genre: Comics , Super-héros
Année: 2009
Editeur: Delcourt
Collection: Contrebande
Scénario:
Paul Dini
Dessin:
Kenneth Rocafort
Couleurs:
Kenneth Rocafort
Traduction:
Alex Nikolavitch
 

Dans un futur proche, la méga-technologie dont usaient et abusaient les super-héros et leurs némésis maléfiques a été décrétée interdite par les gouvernements. Et pendant que les défenseurs de la loi et l'ordre les plus réfractaires à cette nouvelle situation croupissent dans des prisons de haute sécurité, les super-vilains se sont nettement mieux adaptés, troquant sans problème leur costume extravagant de bad guy de comics books contre un costard Armani et une couverture sociale en béton. L'organisation criminelle Agressive Solutions International (ASI) est de ceux-là, proposant en toute discrétion leurs tueurs en gage au plus offrant. Terrorisme, corruption, trafics divers et meurtres n'ont jamais aussi bien proliférés.

Face à cette situation apparaît subitement une mystérieuse et insaissisable jeune femme, Mirage, qui semble bien décidée à liquider un à un tous les membres de l'ASI. Mais sa motivation profonde est davantage guidée par la vengeance que par l'envie de rendre le monde meilleur. Encore que les deux ne soient pas inconciliables...

 

 

Ne vous fiez pas aux apparences ! Cet avertissement salutaire bien connu convient parfaitement à cet album non seulement de par son contenu et ses surprises scénaristiques auxquelles mon pitch ci-dessus ne rend pas justice, mais aussi par une couverture qui pouvait laisser craindre un comics superficiel pour amateurs d'anatomies avantageuses. Que nenni ! Contre toute attente, Madame Mirage se révèle à la lecture une bonne surprise, au scénario bien moins futile que je le craignais et également relativement plus original. J'ajoute une précision appréciable selon mon point de vue : ce tome 1 propose déjà une conclusion satisfaisante. Il ne vous faudra donc pas attendre un an pour avoir la suite de l'histoire.

Bien sûr, on y retrouve tous les codes classiques du comics super-héroïque (même si ceux-ci sont censés avoir laissé tomber le costume) : une apparente justicière aux capacités hors-normes qui serait une sorte de version féminine du Shadow, une galerie de méchants qu'elle expédie les uns après les autres, un contexte de déliquescence morale, une vengeance avec un grand V et, bien sûr, une solide dose d'action et d'affrontements physiques.

Bref, de ce côté-là, c'est du formaté. Et j'ajouterais en plus que, personnellement, j'apprécie peu les super-héros et leurs exploits répétitifs et vaguement puérils.

Seulement voilà : Madame Mirage bénéficie, outre un graphisme de hauts vols de la part de Kenneth Rocafort et d'un découpage attractif, de quelques atouts supplémentaires qui font toute la différence.

J'évoquais les trompeuses apparences et, sans vouloir trop en révéler, disons pour commencer que Madame Mirage mérite bien son nom de scène. Chacun le sait : les super-héros possède deux visages et deux identités, une duplicité garante de leur anonymat. Mirage ne fait pas exception à la règle, mais ce n'est pas l'élément le moins troublant pour le lecteur d'apprendre assez vite que cette élégante justicière n'est pas vraiment ce qu'elle paraît être. Ou pour le dire plus précisément : elle est le résultat d'une expérience scientifique ayant un rapport avec cette fameuse méga-technologie pourtant interdite mais qu'une jeune scientifique de génie a "donner corps" pour ainsi dire et qui en est devenu l'alter-ego. Rien d'étonnant donc à ce que cette plantureuse créature aussi habile dans le maniement du flingue que dans celui des armes blanches se révèle aussi insaisissable, mais possède aussi la capacité bien pratique de prendre l'apparence de n'importe qui, en véritable caméléon qui rappelle un peu la Mystic des X-Men.

Les auteurs nous convient donc, en plus d'une intrigue classique mais bien ficelée, divertissante et efficace, à un tour de prestidigitation rendu possible grâce à la science... et la magie de la fiction spéculative.

 

On ne pourra pourtant pas dire que Madame Mirage manque de consistance pour autant. Alliant une élégance permanente à un sens de la répartie privilégiant l'humour à froid, un aplomb jamais démenti à une intelligence de l'a-propos, cette dame est presque trop parfaite. Pour elle, tout semble facile, évident, et même ses plus redoutables adversaires paraissent pathétiques devant cette icône qui a en plus l'avantage de l'esquive métamorphique.

On pourrait alors craindre que cette facilité avec laquelle la belle opère sa vendetta rendrait la lecture un poil ennuyeuse mais...non. J'ai suivi ses aventures avec un intérêt soutenu, grâce à la fois à la manière dont les scènes sont amenées et une série de révélations bienvenues sur son passé ou plutôt celle de la scientifique qui la contrôle et nous éclaire peu à peu sur ses agissements. Et si cette dernière, aussi blonde que Mirage est brune, a l'humilité d'accepter d'être éclipsée par sa création pour des raisons toutes stratégiques (pouvoir de l'illusion, encore et toujours !), elle est pourtant bien l'âme de cette histoire et ne se privera pas de le montrer par la suite.

Il faut aussi ajouter ce contexte intéressant (bien que déjà utilisé dans le film de Pixar Les Indestructibles) des super-héros mis sur la touche et devenus hors-la-loi, décision peu judicieuse d'un gouvernement qui, d'une certaine manière, réitère l'erreur de la Prohibition des années 20 et ses conséquences au retournement ironique : une escalade de la violence et du grand banditisme que l'Etat cherchait bien maladroitement à juguler.

Enfin, je terminerai par rassurer les amateurs de Marvel, DC Comics et autres : si les justiciers ont tombé le masque, l'ASI a bien gardé son contingent de super-vilains au look pittoresque et aux patronymes qui ne le sont pas moins et auraient pu trouver leur place dans un certain Gotham : le chafouin Piège-à-Souris, le pachydermique Pachy-Doom, Le Saule-Pleureur (une garce au look goth arborant des cheveux vivants), Aphrodisiac (devinez quel est son talent !), L'Araignée Recluse et ses ongles empoisonnés, Joe Yeux-de-Coton (un téléporteur) ou encore La Couleuvre et son haleine toxique. Sans parler du boss, bien sûr.

Une belle brochette de crapules dont le lecteur pourra goûter les spécialités avant qu'ils ne servent de descentes de lits à notre chère Madame Mirage.

Je serais assez preneur pour un second volet, la qualité de cet album étant loin d'être illusoire.

 

Note : 8/10

 

Vorpalin

 

A propos de ce comics :

 

- Site de Kenneth Rocafort : http://therocafortfiles.blogspot.com/

- Site de l'éditeur : http://www.editions-delcourt.fr/

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