Licorne 4, La
Titre tome: Le jour du baptême
Genre: Fantastique , BD européennes
Pays d'origine: France
Editeur: Delcourt
Collection: Conquistador
Scénario:
Mathieu Gabella
Dessin:
Anthony Jean
Couleurs:
Anthony Jean
 

L'expédition de Venise s'est achevée sur un terrible échec. Une pandémie va bientôt ravager le continent... puis le monde. L'humanité entière devra bientôt plier devant l'Eglise pour obtenir le seul remède existant. Une seule créature est désormais assez puissante pour retourner la situation, mais elle est prisonnière d'une forteresse imprenable, aux mains du Chasseur. Pour Ambroise et ses amis, c'est l'heure de la dernière chance. Ils doivent délivrer la Licorne

 

 

Après trois tomes aux nombreuses qualités, il restait à espérer que le dernier ne déçoive pas et propose un final à la hauteur de ce qui a suivi. Autant dire tout de suite que c'est le cas et que l'album a même été au-delà de mes attentes, faisant donc de cette série, en ce qui me concerne, une des plus brillantes et marquantes du genre fantastique en BD de ces dernières années.
Voici un avis qui pourrait sembler très (trop ?) dithyrambique et qui garde évidemment sa part de subjectivité mais l'on peut tout de même constater l'évidence, maintenant qu'elle est terminée, et considérer la série dans son ensemble : un dessin et une colorisation de toute beauté (et on peut déjà constater l'étonnante maîtrise et la maturité dès le tome 1, au point que l'évolution - même si elle est visible - n'en est pas pour autant très flagrante comme chez bon nombre de dessinateurs) tant dans la représentation documentée de la Renaissance que dans celle, plus libre, de l'imagination fantastique.
Ensuite, un scénario qui me donne envie d'aligner les adjectifs, non pas tant par facilité que pour ne pas être trop long : original, ambitieux, inventif, astucieux, iconoclaste, dense, érudit, réfléchi, maîtrisé, prenant, équilibré. S'apparentant au fantastique, on pourrait parler plus spécifiquement à son sujet d'"évolution-fiction" qui fait mine d'ignorer le fait que l'anatomie humaine à toujours été ce qu'elle est et que ce sont les connaissances scientifiques qui ont fait évoluer notre perception de l'ingénierie organique. Gabella a eu l'idée a priori saugrenue (et, avouons-le, invraisemblable) mais finalement très séduisante de tout inverser pour construire son intrigue sur une sois-disant modification de l'humain grâce à l'intervention de microbes, faisant passer "l'homme humoral" et soumis aux astres à "l'homme mycrobios". Etonnant.
On constatera qu'en matière de fantastique, plus de 90 % des BD du genre se contentent de recycler, avec pertinence ou non, les vieux thèmes (vampires, garous, spiritisme, sorcellerie, etc...). Plus rares sont les auteurs qui osent s'aventurer au-delà.
La Licorne se démarque en proposant un matériau qui sort des sentiers battus et l'on n'a aucun mal à croire Gabella lorsqu'il avoue, en annexe du tome 3, que sa gestation fut très longue, plus encore pour parvenir à lier les idées de départ et leur donner une cohérence, imbriquer les thèmes de la médecine et du fantastique, etc... (sic !) que pour l'écriture des scénarios eux-mêmes.
Bref, on sent que cette série a été longuement pensée, élaborée et architecturée, loin de certains oeuvrettes que l'on torche à la vas-vite (et lues tout aussi rapidement) avec une héroïne sexy en danger et une quelconque malédiction.

Venons-en donc maintenant plus particulièrement à ce tome 4 : le moins que l'on puisse dire est que son contenu est à la fois mouvementé et dense en informations/révélations. Là encore, Gabella ne se contente pas de finir une intrigue que l'on croyait déjà, bien à tort, quasiment bouclée dans le tome précédent et dont celui-ci n'aurait pu être qu'une "simple" mission de sauvetage. Au contraire, tout se complexifie encore, les enjeux se révèlent moins simples que prévu, les personnages se retrouvent face à un dilemme assez corsé (l'asservissement ou l'extermination), certains "méchants" ne le sont finalement pas tant que cela alors que d'autres, jouissant déjà de manière symbolique d'un statut angélique, sont bien moins disposés envers le genre humaine qu'on peut le croire. Bref, on évite le manichéisme et les certitudes du lecteur sont bousculées.
La deuxième moitié de l'album (avec un plus grand nombre de pages que les tomes précédents, par ailleurs) est riche en scènes dantesques : sans pour autant oublier l'intelligence de leur propos, Jean et Gabella nous offrent un beau feu d'artifice final, à la fois visuel et narratif.
Seul petit défaut que j'épinglerai tout de même et qui concerne les quatre tomes: les personnages des médecins (ou scientifiques) ne sont pas suffisament caractérisés, si on excepte Ambroise Paré et à la rigueur Paracelse. La preuve d'ailleurs : leurs adversaires les évoquent souvent sous le terme générique "les médecins" et on a en effet un peu l'impression d'avoir davantage affaire à une sorte d'entité collective affrontant le Complot plutôt que des personnages possédant chacun une identité propre. J'aurai aimé que Gabella leur donne une manie, un tic, un défaut à chacun pour les singulariser autrement que par leur physique ou leur spécialité savante.
Mais soit... l'essentiel reste malgré tout l'histoire, le contexte original et des Primordiaux mémorables, créatures mythologiques du bestiaire grec classique dont Anthony Jean donne une représentation étonnante (écorchées et modulables) et dont Gabella a su tirer parti des aptitudes respectives.
Une oeuvre que beaucoup trouveront sans doute "simplement" réussie mais qui, pour ma part, a déjà rejoint mon petit panthéon personnel.

Note : 10/10

 

 

Vorpalin

 

A propos de ce livre :

 

- Site de l'auteur : http://plumedebarbu.blogspot.fr/

- Site de l'illustrateur : http://anthonyjean.canalblog.com/

- site de l'éditeur : http://www.editions-delcourt.fr/

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