Marais de la haine, Les - Artus Films
Écrit par The Omega Man   

 

Titre original : Gator Bait

Région : Zone 2 PAL


Editeur : Artus Films
Pays : France

Sortie film cinéma : 13 juillet 1977
Sortie dvd : 2 octobre 2018

Durée : 84 minutes
Image : 16:9 compatible 4/3 format d'origine respecté 1.37:1, couleur
Audio : Français & anglais Dolby 2.0

Langues : français, anglais
Sous-titres : français


Bonus :
- Rednecks et survival, par Maxime Lachaud (auteur du livre Redneck Movies) - 44'
- Making of original - 18 min
- Une visite chez Ferd et Beverly Sebastian - 11'
- Film-annonce original - 2'32"
- Spot vidéo - 1'32"

 


 

Commentaire : Artus Films inaugure sa "Collection Rednecks" avec deux belles sorties, Gator Bait et sa suite. L'éditeur reprend les titres français d'origine Les Marais de la haine et La Vengeance de la femme au serpent (Gator Bait 2), les deux films ayant connu chez nous une sortie en cassette lors la glorieuse époque de la VHS !
Le Digipack de l'éditeur est une petite merveille. Sa jaquette reprend une photo d'exploitation du film qui a contribué à sa renommée et l'intérieur recèle une autre photo N&B et l'affiche du film
Les Marais de la haine sort dans une copie de qualité qui n'a pourtant pas été remastérisée (cf. les explications sur ce fait dans le making of du film !) et le son est disponible en français et anglais.

 

 

On peut reprocher bien des choses aux Américains mais sûrement pas de ne pas exploiter sans vergogne les tares les plus discutables de leur société. Alors que la belle Amérique se présente comme l'Eldorado ou tout le monde peut réussir, ce quelle que soit sa couleur de peau et sa religion, l'envers du décor est une Amérique rurale refermée sur elle-même, bigote et armée jusqu'aux dents. Mais au-delà de cette ruralité, il y a les "scum", une population de blancs précarisés vivant dans des lieux isolés, très spécifiques, où l'on trouve pêle-mêle les rednecks (prolétaires/fermiers du sud), les yokels (campagne), les hicks (sud/midwest), les trailer trash (vivant dans des mobil-homes, eux-même regroupés dans des parcs à caravanes) ou les crackers/hillbillies (Appalaches/sud). Cette couche de la population vivant en marge de la société véhicule pas mal de légendes urbaines qui viennent ternir une image déjà peu envieuse, voire moquée. Autant dire c'est du pain béni pour le cinéma d'exploitation ! Ainsi le pauvre citadin démocrate, végan, écolo et sans arme, se retrouve a quelques heures de chez lui, en danger permanent sous la menace d'une bande d'autochtone alcooliques obsédés sexuel, voire, dans les cas les plus extrêmes, consanguins et tarés. Voilà sur quels préjugés caricaturaux sont nés la Hicksploitation et le Survival ! Parmi les préférences du public, on dénote une nette propension pour les histoires se déroulant dans les montagnes rocheuses et les marais ; ces derniers, photogéniques à souhait, semble suinter naturellement la purulence et l'avilissement. Du coup, dans un tel contexte, rien de tel que d'y expédier une ou plusieurs demoiselles en détresse. Ainsi dans les années cinquante malgré une censure encore puissante des films comme Swamp Women, "Bayou" Strangler of the Swamp, "The Louisania Hussy" n'hésitent pas à suggérer les pires sévices aux imprudentes. Dans Swamp Women ce bon vieux Roger Corman détourne aux maximum les règles du codes Hays et instaure sournoisement les shorts en jeans moulant et les chemises humides, vêtements légers et affriolants qui serviront dès lors de garde-robe du genre !

 

 

Dans les années 70, alors que le cinéma d'exploitation est à son apogée, les époux Sebastian produisent et réalisent en famille de petite série B. Celle-ci est tournée à l'économie (merci Roger Corman) et est destinée aux drive-in (Delta Fox fait par exemple aussi partie du lot).
Mais le succès viendra un peu plus tard lorsque Paramount distribuera, via CIC vidéo, leur film Gator Bait alias Les Marais de la haine avec la cultissime Claudia Jennings, ancienne réceptionniste, puis playmate, enfin reconvertie actrice. Elle marquera du reste les esprits dans ce Survival ou elle manie le calibre 12 en plus de piloter un hors-bord comme personne. Beverly Sebastian avait, parait-il, écrit le film spécialement pour elle, l'actrice lui ayant demandé un rôle à la mesure de son talent naissant : c'est-à-dire avec peu de dialogues. Elle enchaînera du coup avec des films comme "Sisters of Death", "The Great Texas Dynamite Chase", "Deathsport" ou "Moonshine County Express" ainsi qu'un film assez méconnu de David Cronenberg, "Fast Company" sur les courses automobiles. Cruelle ironie, la pauvre Claudia Jennings se tuera en 1979 dans un accident de voiture.
Les Marais de la haine, conçu à l'époque pour les drive-in n'a pas rencontré un gros succès en son temps mais il pouvait se targuer d'une certaine réputation auprès des amateurs, notamment grâce aux clichés d'exploitation montrant l'actrice accroupie sur un tronc d'arbre, la main posée sur son poignard. Pour sa ressortie, Paramount utilisera ce cliché comme jaquette, procédé qui sera pour beaucoup dans le succès du film en vidéoclub !
Les Marais de la haine est une sympathique petite production, filmée à l'arrache donc, mais dotée d'un sens réel du cadrage. Des qualités récurrentes de la méthode Corman !

 

 

À propos des suppléments proposés par l'éditeur, dans Rednecks et survival (durée : 44 min), Maxime Lachaud, l'auteur du livre "Redneck movies : Ruralité et dégénérescence dans le cinéma américain" (Rouge Profond, 2014) nous fait un historique du "redneck" dans la culture populaire ainsi, de manière plus large, dans le cinéma américain. De l'antagonisme entre les citadins et les ruraux, l'auteur revient avec brio sur les stéréotypes véhiculés, autant de caricatures générées par des légendes urbaines.

 

 

Le second module, intitulé Gator Bait : Celluloid in the Swamp, n'est pas véritablement un making of. Beverly et Fern répondent à des questions posées et envoyées par des fans du film. Mais le document est du coup gavé d'anecdotes : Ferd n'utilise qu'une seule et unique caméra, l'équipe n'avait qu'un seul bateau et c'est grâce à un autochtone qui prêta son bateau que le réalisateur put mettre la scène de poursuite en boite. On ne dévoilera pas tout mais on apprend également que pour la sortie du film en DVD, les Sebastian ont découvert que la Paramount avec conservé une bobine du film dans sa chambre forte, dans un état impeccable et que, du coup, aucune restauration ne fut nécessaire. Le tout, entrecoupé de photos et d'extraits s'avère passionnant !



 

Une visite chez Ferd et Beverly Sebastian est un documentaire que l'on retrouve sur le dvd suivant, celui de La Vengeance de la femme au serpents. Il s'agit d'une petite pépite qui explique les raisons pour lesquelles les deux époux ont décidé de participer à l'élaboration de ce dvd (La version US surtout). La visite débute par la découverte d'un élevage de lévriers, Bervely Sébastian explique qu'ils ont pour vocation d'offrir une seconde chance aux lévriers après leur exploitation pour des courses). La visite est amorcée par son époux et l'on finit par découvrir que papy et mamie sont très portés sur la religion : c'est d'ailleurs en toute simplicité qu'ils ont demandé que ce court métrage soit présent sur les deux éditions, en espérant, disent-ils, ainsi attirer les spectateurs des deux films vers Dieu. Une visite totalement inutile mais complètement "redneck" !
S'ensuivent enfin les bandes-annonces, et le spot vidéo français que l'on pouvait découvrir sur certaines cassette vidéo pour sa sortie chez CIC Vidéo dans les années 80.

Vu le prix des deux films, la qualité des bonus et de leur package, il serait bien dommage de ne pas joindre ces deux bijoux à sa collection !





En rapport avec le dvd :


# La Critique du film


# Quelques captures de plus :

 



# Sur le site de l'éditeur :