Universal War One 1
Titre tome: La genèse
Genre: BD européennes , Guerre , Science-fiction , Space-Opéra
Année: 1998
Pays d'origine: France
Editeur: Soleil
Scénario:
Bajram
Dessin:
Bajram
Couleurs:
Bajram
 

Entre Saturne et Jupiter, au coeur des jeunes Etats les plus prospères de la Fédération des Terres Unies, la troisième flotte de l'United Earthes Force veillait inlassablement sur la périphérie du système solaire.

Elle assurait par son gigantisme un incroyable sentiment de sécurité à ses habitants.

Mais LE MUR est apparu.

Si grand, si sombre.

Insondable.

Ici commence la Première Guerre Universelle.

Depuis plusieurs années, les bédéphiles de ma connaissance ne cessent de me pousser à lire cette série, qu'ils placent au panthéon des chefs-d'oeuvre incontestables de la BD contemporaine et de la SF en particulier. Face à tant d'engouement pouvant aller jusqu'à un péremptoire "si tu ne l'as pas lue, tu n'as rien lu dans le genre !", on se sent à la fois le vilain petit canard du conte, mais aussi un peu méfiant. Pour un peu, on en viendrait même à snober l'oeuvre par pur esprit de contradiction.

Reste que, dans un cas comme dans les autres, mon propre verdict ne pouvait bien évidemment se rendre qu'après l'avoir lue, du moins le début.

En fait, si j'ai mis aussi longtemps à me décider, c'est plutôt parce que je rechignais à plonger à nouveau dans une série de SF guerrière comme il en existe pas mal sur le marché, étant plutôt dans une période "fantastique et fantaisie". Et probablement aussi parce que, dans le genre, je considère l'adaptation en BD par Marvano de La guerre éternelle de Joe Haldeman comme une référence indépassable.

Pris d'une impulsion subite, je me suis mis néanmoins à empoigner la chose dernièrement, me disant qu'il fallait bien commencer un jour.

Ce fut donc le D-Day.

 

 

 

Ce premier album refermé, il me faut bien me rendre à l'évidence : UW1 est une série de SF ambitieuse et très prometteuse, dont le propos dépasse la série B routinière (malgré ses qualités) de science-fiction avec ses agents intergalactiques, ses aventures exotiques et sa faune extraterrestre pittoresque (de Valérian à Orbital, en passant par Star Wars).

Je citais plus haut La guerre éternelle et c'est bien dans cette direction que semble s'acheminer UW1, non seulement par son sujet, mais aussi son ton (éminemment sérieux et dramatique) et son cadre, futuriste, mais réaliste, qui évite toute fantaisie de type "vitesse supraluminique" ou "téléportation, Mr Scotty !". Sans tomber dans la "hard science", Bajram donne une légitimé à son wargame spatial en évoquant par exemple les notions d'espace-temps et la manière dont une technologie suffisamment avancée serait capable d'utiliser certaines de ses propriétés dans un conflit aux dimensions d'un système solaire. Mais n'allons pas trop vite, car nous n'en sommes encore ici qu'au tome 1.

L'apparition du Mur, à la fois point de départ de l'histoire et point de convergence du déroulement des deux premiers opus, rappelle ce que les amateurs de SF nomment parfois, de manière peu flatteuse, le GTS (Grand Truc Stupide) et que je préfère pour ma part nommer moins péjorativement le GMI (Grand Machin Incompréhensible) qui survient inopinément un beau jour et sur lequel l'humanité s'interroge à coups de "quoi ?", "qui ?", "pourquoi ?" et "comment ?". Arthur C. Clarke et, plus récemment, Greg Bear et Robert Charles Wilson, ont déjà plus d'une fois utilisé ce postulat.

Mais le nerf de UW1, contrairement à la SF mystérieuse et messianique d'un Clarke, c'est celui de la guerre, comme son titre l'indique. Une guerre qui ne dit pas encore son nom ni ne déploie toute son ampleur dans ce premier tome introductif qui se penche plutôt sur les membres d'un escadron baptisé "Purgatory" et leurs rapports entre eux, mais aussi ceux, problématiques, qu'ils entretiennent avec la hiérarchie et le reste de la flotte.

Car ces sept pilotes et officiers/sous-officiers sont en réalité passibles de la cour martiale, s'étant chacun rendu coupable d'un délit relativement grave selon les cas. Seule la création de cette unité marginale par une armée plus encline à utiliser tous les soldats disponibles plutôt qu'à les laisser inutilement croupir dans une cellule leur a permis d'échapper à la sentence.

Un des ressorts particulièrement intéressant du scénario est de montrer comment ces hommes et ces femmes antihéroïques cherchent une forme de rédemption à travers leur actes présents, mais aussi la difficulté de domestiquer les vieux démons qui les ont amenés à commettre leurs actes passés : violence incontrôlable, traumatisme suite à un viol, témérité irresponsable ou au contraire lâcheté systématique devant le danger, etc...

Pour autant, ces personnages ne sont pas les "salopards" d'un certain film de guerre célèbre auxquels ma description pourrait faire penser : simplement des gens normaux, parfois brillants (tel que Kalish, le scientifique déchu) avec des failles et des faiblesses qui, dans un contexte militaire forcément rigoureux, les ont amenés à prendre de mauvaises décisions aux conséquences souvent tragiques.

On en arrive donc à éprouver de la sympathie pour eux, à les comprendre (ou du moins essayer) sans pouvoir vraiment les juger. Et leur confrontation à cet étrange Mur autant qu'à un conflit imminent est, pour le moment, l'intérêt principal de ce premier tome d'UW1.

 

La richesse scénaristique, que l'on peut déjà entrapercevoir dans cette genèse d'une série qui n'en est pourtant qu'à ses prémisses, demandait un traitement graphique qui lui fasse honneur. Là encore, Bajram - bédéaste décidément complet - se distingue avec talent : ses planches montrent une volonté d'illustrer le mieux possible un contexte de SF solide, crédible, rigoureux, parfois spectaculaire, mais sans effets gratuits. Et s'il est capable de montrer une flotte de vaisseaux lourdement armés, de navettes slalomant à travers les immensités galactiques ou de hangars d'appontement où pilotes et techniciens s'affairent, il n'est pas moins doué dans les moments plus intimistes, se plaçant alors au plus près de ses personnages, comme cette scène où Mario, rongé par cette lâcheté honteuse qui est le corollaire d'une peur qui ne le quitte jamais, fait face dans son clapier à une corde de pendu qu'il a lui même fixée tout en sachant qu'il manque également de courage pour se suicider.

Je porterai aussi au crédit de Bajram un style de dessin rugueux, assez classique, contrairement à certaines BD de science-fiction au rendu trop lisse.

Un choix cohérent qui renforce encore l'humanité de ses protagonistes et ne donne pas au lecteur la sensation d'avoir affaire à des avatars pixelisés.

 

Note : 9/10

 

Vorpalin

 

A propos de cette BD :

 

- Site de l'auteur : http://www.bajram.com/

- Site de l'éditeur : http://soleilprod.com/

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