Amour et mort dans le jardin des Dieux
Titre original: Amore e morte nel giardino degli dei
Genre: Giallo , Thriller , Drame
Année: 1972
Pays d'origine: Italie
Réalisateur: Sauro Scavolini
Casting:
Erika Blanc, Orchidea De Santis, Peter Lee Lawrence, Rosario Borelli, Ezio Marano, Vittorio Duse, Bruno Boschetti, Carla Mancini...
Aka: Love and Death in the Garden of the Gods / Amour et mort dans le jardin des dieux (traduction littérale)
 

Un ornithologue âgé (Ezio Marano) s’installe dans une villa isolée située à l'intérieur d'un grand parc. Il aimerait mener à bien ses études sur les différents types d'oiseaux. Lors d'une promenade nocturne dans le parc, il tombe par hasard sur des bandes magnétiques chiffonnées.
Intrigué par sa découverte, il se met en tête de les nettoyer puis à les écouter grâce à son magnétophone. Il y découvre différentes séances de psychanalyse. En rembobinant, un peu au hasard, le vieil homme se rend compte petit à petit qu'il tient là une tragédie en cours.

 

 

Elle implique Azzurra (Erika Blanc) qui vient d'être retrouvée morte, assassinée non loin, et son frère Manfredi (Peter Lee Lawrence). On y entend les déclarations d'Azzurra sur sa relation amour-haine quasi-incestueuse avec son frère. Ce dernier n'a jamais supporté son mariage avec Timothy (Rosario Borelli), un musicien de petite envergure qui lui a volé sa sœur. Faut dire que Manfredi ne tourne pas très rond puisqu'il avait feint, un temps, d'être parti en Inde, alors qu'il était cloîtré dans un immeuble non loin à surveiller sa sœur.
Mais ce n'est pas tout... Au fil des écoutes, Azzurra avoue également ses relations hors-normes avec Viola (Orchidea de Santis), laquelle l'a aidé autrefois à sortir de la dépression. Une Viola qui, semble-t-il, ne voit pas elle non plus d’un bon œil le mariage entre Azzurra et Timothy. Tout cela serait déjà suffisamment singulier si ce n'était, qu'au retour d'une de ses promenades dans le parc, l'ornithologue trouve une nouvelle bande. Autant dire qu'elle charriera autant de révélations qu'elle annoncera de nouveaux cadavres...

 

 

Unique film dirigé par Sauro Scavolini (frère du plus illustre Romano Scavolini, notamment pour ses "Exorcisme tragique" et "Cauchemars à Daytona Beach", ici en charge de la photographie), Amore e morte nel giardino degli dei est une oeuvre extrêmement personnelle, introspective, morbide, fascinante, tournée avec goût en plus d'un soin presque méticuleux. Dès les premières images, le rythme se fait langoureux (ou quasiment inexistant, selon affinité, à l'exception du virage en épingle à cheveux direction thriller dans les trente dernières minutes) mais parvient pourtant à séduire, puis à maintenir l'intérêt du spectateur qui longtemps sera baladé. Le scénario, construit autour d'un puzzle qui se reconstitue peu à peu grâce aux investigations du jardinier improvisé enquêteur, est savamment élaboré. Grâce à l'écoute de cette bande sonore trouvée dans le parc, se reconstitue peu à peu une succession de faits ayant mené au drame assassin.
Au spectateur d'évoluer dans une atmosphère mortifère où, en plus de décors désolés, les flashbacks ressemblent à des retours d'entre les morts. Un script malin en diable puisqu'il permet au film d'évoluer dans des eaux plus que troubles et aux abords de plusieurs genres : le drame, le giallo, puis enfin le pur thriller à tendance psycho-killer.

 

 

Puisant évidemment dans le "Blow-Up" d'Antonioni, Amore e morte nel giardino degli dei fait partie de la famille des suspenses basés sur des conversations surprises ("A 23 pas du mystère" d'Hathaway, Le chat à neuf queues) dans lesquels les résidus (ici des bandes magnétiques) mènent à une piste. S'ensuit un mystère, lequel en amène d'autres ; parfois, au contraire, des réponses qui, par fragments, permettent de remonter la piste. Le film de Sauro Scavolini se compose en trois parties bien distinctes :

La première est faite du meurtre d'Azzurra, de la découverte de son corps, puis des enregistrements par notre botaniste. Celui-ci les écoute par curiosité et se retrouve plongé en plein drame conjugal dont il pressent une fin fatale.
La seconde reprend les codes du giallo, à savoir qu'au fil des découvertes de notre spécialiste en oiseaux sa vie sera mise en danger tandis que des cadavres vont s'amonceler. Ce, disons-le tout de même, de manière si subite et crescendo que ce segment-ci est le plus court.
Le troisième, enfin, plonge le spectateur en pleine course contre la montre après un tueur en série.

 

 

Epousant avec une certaine habilité et un sens du climat les décors à disposition, Sauro Scavolini évoque dans la partie mystérieuse, située en milieu rural, une Italie défraîchie, décrépie, toute faite de ruines, à la fois symbole des rapports de couples ici en déclin ("Stromboli"), mais aussi des moeurs et procédés archaïques qui y règnent. A ce titre, la photographie de Romano Scavolini est remarquable et confère un cachet assez unique qui fait que l’on pense à La longue nuit de l'exorcisme ou bien encore à L'arma, l'ora, il movente qui sera tourné l'année suivante. Les déambulations toutes menaçantes d'Erika Blanc à travers de longues ruelles fantomatiques, quand ce ne sont pas de longs corridors de lieux semblant désaffectés, évoquent fortement les scènes de poursuites psychotiques de Florinda Bolkan dans Le venin de la peur de Lucio Fulci (les flashs sur un cadavre puis un chien en train d'en manger les membres décomposés ne fait qu'accentuer ce sentiment). Elles confèrent une telle atmosphère qu'on aurait tendance à oublier les quelques angles tendance arty, flatteurs pour l'oeil mais un peu vains sinon prétentieux. Mais ils s'avèrent être la pincée d'érotisme et de sensualité qui font appartenir cette déroutante pelloche au courant sexy-giallo, avec éventuelle machination. S’il n’y a point de machination, véritablement, dans Amore e morte nel giardino degli dei, il y a en revanche, vous vous en doutez, anguille sous roche...

 

 

Frôlant de tellement près plusieurs genres au point de leur appartenir, difficilement classable et identifiable néanmoins au premier coup d'oeil, Love and Death in the Garden of the Gods peut se targuer d'être original (soit, sans toujours y parvenir) et d'offrir un casting bien dirigé avec, en premier lieu Erika Blanc, très bien mise en avant. On n'oubliera pas de citer pour autant la présence d’Orchidea De Santis, notamment pour sa belle présence saphique, ainsi que "Satana" qui, même ailleurs que dans un western, aime à empoigner le colt. N'oublions pas la jolie prestation tour à tour lasse et déterminée d'Ezio Marano dans le rôle du botaniste improvisé enquêteur.
Alors soit, Amore e morte nel giardino degli dei n'est ni un grand drame psychologique et psychotique (à ce titre, il n'atteint pas le sommet de Les insatisfaites poupées érotiques du Professeur Hichcock), ni le thriller le plus palpitant que vous verrez dans votre vie. Il n'en demeure pas moins que, légèrement dynamisé par une musique un brin pompière de Giancarlo Chiaramello et égrainant tranquillement mais savamment ses mystères pour finalement surprendre, il mérite d'être découvert.

 

 

Mallox

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