Demonia
Genre: Horreur , Esprits
Année: 1990
Pays d'origine: Italie
Réalisateur: Lucio Fulci
Casting:
Brett Halsey, Meg Register, Lino Salemme, Al Cliver, Christina Engelhardt, Pascal Druant...
 

Nous sommes en 1990 et nous assistons là au chant du cygne de Lucio Fulci qui est loin d'être honteux, même si loin d'être mémorable. Chant du cygne de Fulci, mais chant du cygne, en même temps, d'un genre tombé en désuétude au début des années 80, et qui peine alors à retrouver ses marques. La production horrifique n'est pas la seule touchée du reste, il y aurait une thèse à faire sur les raisons d'une baisse d'inspiration globale du cinéma de genre en particulier, mais du cinéma plus classique en général.
La première moitié des années 80 a vu le commencement de la fin de nombreux grands cinéastes comme Polanski, Coppola, De Palma, Sidney Pollack et d'autres grands noms encore. A cet égard, et avec les nouvelles contraintes et autres enjeux de production, le cinéma de genre semble avoir juste suivi le pas et là ou un Polanski passait d'oeuvres personnelles à des films plus académiques, les artisans du cinéma de genre et d'exploitation semblent s'être retrouvés dans la même position. Ainsi les grands noms du cinéma transalpin, de Martino à Argento, de Castellari à Fulci se sont vu livrer les pires films de leur carrière, alors qu'ils avaient su prouver leurs talents à travers les genres, les vingt années précédentes et même au-delà.

 

 

Quoi de plus normal, dans l'ordre des choses alors, de retrouver Fulci après un passage à vide assez sidérant et sidéral de nullité (Aenigma / Conquest / 2072, les Mercenaires du Futur), de le retrouver ici, en plus d'être malade et vieillissant à la tête d'un film très moyen, mais pas si mauvais qu'on a bien voulu le dire. Bref, voici l'histoire...
En 1486, dans un village de Sicile, trois religieuses sont crucifiées vives dans un couvent par les habitants d'un village voisin, qui les accusent d'avoir pactisé avec le diable. Après le châtiment, ceux-ci scellent le couvent en le murant. Plus de cinq siècles plus tard, quelques archéologues étrangers fouillent les vestiges près du monastère. Dans un même temps, Liza (Meg Register), qui fait partie de l'expédition en tant qu'étudiante, et qui est aussi adepte de spiritisme à ses heures, vient tout juste, lors d'une séance, d'être le témoin de ces événements cruels.
Dans le pays voisin de Saint Rosalia, dès lors que les habitants sont au fait des fouilles en cours, il mettent en garde via le syndicat local, le professeur Evans (Brett Halsey), lui conseillant fortement de laisser enterré le passé. Malgré les conseils Liza entre dans le monastère où elle rencontre Turi (Lino Salemme), le boucher du coin, qui tente alors fortement de la dissuader de continuer les recherches. Liza reste sourde aux conseils de l'homme et défonce un mur, derrière lequel se cache une chambre, puis découvre les restes des soeurs. Mal lui en prend, car dérangées dans leur repos, les sacrifiées reviennent alors rôder aux alentours tandis que Liza découvre petit à petit l'histoire des trois exécutées, puis prend petit à petit conscience des événements saugrenus qui se déroulent alors que les morts commencent à se succéder.

S'il y a bien un détail qui empêche de faire fonctionner ce "Demonia", c'est l'actrice Meg Register, qui joue ici comme une cochonne et que Fulci filme comme un vieux cochon, si bien qu'on devinerait presque son érection derrière la caméra, oubliant en passant de la violenter quelque peu pour qu'elle fasse "vraie", et du coup le film se voit plombé par un personnage (de presque chaque plan dans la première partie) auquel on ne croit pas un seul instant. Et quand bien même Lisa renouvelle grimaces de peur et d'effroi à tout va, on s'en fiche, tant la bête est jolie mais d'une fadeur absolue.
Dommage car par mal de qualités du film pourraient rendre notre regard nostalgique, tant le film renvoie à plusieurs reprises aux grandes réussites que sont "L'Au-delà" ou "Frayeurs", avec même quelques belles échappées oniriques et des morts qui rivalisent de sadisme et d'imagination, d'autant que Lisa renvoie directement à l'actrice Catriona MacColl à laquelle on pensera forcément ici, et l'on s'apercevra combien elle manque. Tout renvoie ici aux oeuvres citées, sauf que tout ici semble arriver quelques bonnes années trop tard.

 

 

Je ne m'étendrai pas trop sur le scénario qui n'est pas loin d'être catastrophique, même si on a vu que le maestro pouvait à l'occasion contourner ce handicap, pour offrir les plus belles peintures de mort qui soient. Et ce qui sauve "Demonia" de son statut annoncé de nanar, pour l'amener vers quelque chose de plus acceptable, ce sont bien toutes les scènes d'atmosphère au sein du couvent et de ses catacombes, avec une très belle photographie, ainsi que quelques magnifiques détours vers un onirisme déjà évoqué, notamment lors de scènes représentant les rêves de Lisa, où celle-ci se retrouve seule au milieu d'une arène désertée, d'une beauté pas loin d'évoquer le Argento de "Ténèbres" et "Phénomena".
Egalement, les effets spéciaux semblent ne pas avoir évolué depuis la dernière décennie, tant et si bien que le film garde un arrière-goût de "traînard", en retard de quelques bonnes années pour faire vraiment illusion.
Evidemment, de par le postulat de bonnes soeurs, celui qui s'attendra à un nunsploitation en sera gravement pour ses frais. Mais l'amoureux, le vrai, des grands Fulci d'antan, aura une petite pincée nostalgique tant on y retrouve par éclairs les lueurs les plus belles qui semblaient perdues à jamais.
A ce titre, la façon dont Lucio Fulci filme la Sicile, le plus souvent de façon surexposée, est bien vu. Ayant voyagé souvent dans celle île magnifique, c'est vraiment le sentiment que j'en garde chaque fois, celui d'un soleil plombant où les façades des maisons font mal aux yeux, où les paysages y sont à la fois magnifiques et désolés. Tous les travellings à travers les rues du village sont par ailleurs empreints d'une atmosphère trouble, voire inquiétante et pas de doute, à ce niveau là, Fulci n'a pas perdu la main.
Petit plus, la présence du maître dans un personnage important, puisque celui-ci s'est octroyé un rôle relativement conséquent ici, venant enquêter sur les disparitions. C'est comme un petit "au-revoir" qu'il viendrait nous dire, ce qu'il achèvera de faire la même année avec son "Nightmare concert", où il se mettra en scène lui-même, lui et ses démons.
Ce qu'il manque aussi dans "Demonia", c'est la partition d'un Fabio Frizzi qui n'aurait sans doute pas manqué d'emmener le film vers un ailleurs qui n'existe plus ici, et la partition de Giovanni Cristiani ne cesse de renvoyer le film à lui-même, le soulignant de façon assez peu inspirée, voire, insipide, le laissant dans son côté terre à terre qui aurait demandé à être davantage bousculé.

 

 

Rayon morts violentes, on aura droit à une petite panoplie assez horrible, avec un écartèlement, un homme coupé en deux comme un bout de papier (faut y croire quand même) giclant tout son sang sur son fiston assistant à la scène. On aura droit à une double énucléation renvoyant aux bons vieux "Frayeurs" ou autre "Maison près de cimetière", des apparitions spectrales de bonnes soeurs en surexposition, qui ma foi se défendent, ainsi qu'un personnage jouant le boucher se faisant clouer la langue à même le sol après une quasi-attaque de jambons et de carcasses.
Bref, si on le compare aux productions de la fin des années 70, début 80, le film pâlit fortement de la comparaison, faisant même figure de petit retardataire, mais si on le confronte aux autres productions de la même période, malgré quelques tonalités un brin médiocres, "Demonia" offre quelque chose en plus, même si au final, il n'alimente pas vraiment la renommée que le réalisateur romain a su créer avec sa filmographie passée. Malheureusement, ces chroniques Siciliennes de Nonnes réveillées et mal lunées de l'être souffrent du manque évident d'un budget adéquat qui lui aurait peut-être permis d'accéder à une réussite plus conséquente, en lieu et place de ce patchwork inégal à tous points de vue.

 

Note : 5/10

 

Mallox
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