Obsédé malgré lui
Titre original: All'onorevole piacciono le donne
Genre: Sexy Comedie
Année: 1972
Pays d'origine: Italie
Réalisateur: Lucio Fulci
Casting:
Lando Buzzanca, Lionel Stander, Laura Antonelli, Agostina Belli, Anita Strindberg, Francis Blanche...
Aka: Les femmes du député (VHS) / The Eroticist
 

Lucio Fulci est loin d'être manchot et le voici après une excellente Longue nuit de l'exorcisme qui s'attèle à une comédie "sex maniac" grossière mais pas vulgaire, gros sabots mais loin d'être débile, en plus de nous pondre là une sorte de pamphlet libertin et anti-clérical. Rarement le cinéaste dans son onirisme ne s'était autant approché de Federico Fellini et de sa "Cité des femmes" notamment, avec disons un discours sur la création cependant absent ici, mais avec pas mal d'autres choses très intéressantes sur lesquelles je vais revenir.
Le sénateur Gianni Puppis (Lando Buzzanca) vient juste d'être nommé à la tête de son parti dans une future course aux présidentielles. Pas de chance, alors qu'il reçoit la première dame des Indes, ses conseillers s'aperçoivent, analysant le document sur pellicule, qu'une inopinée main au cul est prodiguée à cette dernière, et après quelques hésitations entre un vieillard rabougri et le dit sénateur, n'ont alors plus de doute sur la provenance de cette main baladeuse. Conscient de son état, et devenant de plus en plus dépendant d'une obsession sexuelle qui le dépasse, ce dernier accepte une retraite spirituelle au sein d'un monastère où le Père Scirer (Francis Blanche) est cloîtré avec 22 nonnes allemandes pour seule compagnie. Les ennuis au lieu de s'amoindrir ne font que s'amplifier alors...

 

 

Le film trouve d'entrée une résonance dans une réalité récente et il est difficile de ne pas penser à Bill Clinton ou bien encore à l'ancien membre du Congrès John LaFalce, en même temps d'être une réelle satire politique sophistiquée portant des accusations très sérieuses notamment dans sa peinture du climat politique italien, régnant à l'époque. Pour faire passer la pilule, Fulci aborde ici alors un sujet chaud, cachant son pamphlet derrière un humour à tendance slapstick, et "erotico-vaudevillesque", le tout parsemé de rêves et d'hallucinations oniriques et surréalistes de toute beauté.
Brûlant même pourrait-on dire, puisqu'une fois de plus, son metteur en scène en plus d'évoquer quelques scandales qu'on a voulu cachés et qui firent grand bruit dans l'Italie des années 70, venant enfoncer là son couteau dans la plaie, en plus de remettre une fois de plus en cause la séparation de l'église et de l'état. En effet, le coquin sénateur est couvert par l'église et par le pape via le personnage du cardinal Maravigli (Lionel Stander), qui fera tout pour cacher la face obscure du prétendant à la présidence. Tout ceci reste dans le contexte de la satire caricaturale à souhait, mais on sent une hargne sous-jacente, ce de manière constante, voire insistante, tout le long de cette méchante farce.

 

 

Un petit mot sur les acteurs, ils y sont excellents. Lionel Stander campe un Cardinal haut en couleur et ses apparitions sont truculentes à souhait. Francis Blanche en moine, et bien on a un plaisir énorme à le retrouver là bien loin de certains nanars français dans lesquels le malheureux fut vers la fin de sa carrière, confiné et assure la partie en parlant un allemand proche de papa Schulz. Laura Antonelli stupéfie également dans le rôle de la nonne de tentatrice qui menace d'amener le sénateur Puppis loin de la politique, et deviendra l'année suivante l'une des incontournables Diva du cinéma transalpin pour son rôle dans "Malizia", reconnaissance on ne peut plus méritée. On cherchera (et trouvera) Anita Strindberg dans une scène érotique courte mais magnifique. De même pour Agostina belli qui ma foi nous offre ses formes ici pour le plus grand plaisir des yeux. Quant à Lando Buzzanca, que l'on retrouvera plus tard dans Young Dracula du même Fulci, avec sa tête antipathique au possible, est parfait, son jeu tout en suées et hallucinations convient parfaitement au ton du film et finit de l'emmener dans un récit hautement picaresque, drôle et féroce et amer à la fois.
Tout ceci est souvent très drôle et le nombre de scènes rigolardes ne manque pas. D'entrée, voir les conseiller disséquer le reportage afin de savoir de qui provient la main au cul, avec les plans qui vont du sénateur au vieillard fait mouche. L'état de Lando Buzzanca ne s'améliorant pas au fil de l'histoire, il faut le voir tenter de se retenir pour céder au final à la tentation, violant au passages 21 nonnes sur 22 (!), et ne parvenant jamais à retirer sa main une fois qu'elle s'est bien accrochée à tous les joufflus qui passeraient par là.

 

 

A ce titre, il faut à nouveau rendre hommage à la mise en scène, et à l'instar du Venin de la peur, les fantasmes et autres rêves de l'homme politiques, en plus d'être drôles, sont absolument splendides, et on a droit à une succession de délires sous acide, où ce dernier se met à manger des pommes géantes qui trônent sur les lits vides des nonnes, voit les statues se transformer en femmes nues, se fait une presque overdose lorsque d'un coup, popotins et lolos se mettent à sortir des murs, se met à conjuguer sexe et argent dans des visions où le sexe des femmes peuvent se transformer en liasse de billets, passe en revue un troupeau de popotins de nonnes, bref, c'est bien chargé à ce niveau, et Lucio Fulci ne dément à aucun moment son talent pour l'onirisme le plus beau qui soit, n'ayant ici vraiment rien à envier au Fellini évoqué plus haut.
Le film est drôle et méchant, donne à réfléchir et qui plus est, empreint de scènes de rêves remarquables, en plus de se terminer de la façon la plus amère qui soit, comme si Fulci nous disait : "Attention, je veux bien déconner, mais je suis sérieux !". Que manque t-il alors ? Pas grand-chose... un rythme un tantinet plus élevé aurait été le bienvenu, quelques redites dont on aurait pu se passer (le message est quelque peu "sur-asséné"), et sans doute un scénario un peu plus consistant, même s'il fonctionne finalement pas trop mal.
Pour finir, à quelque détails prêts, ça aurait pu être un chef-d'oeuvre du genre, mais en l'état, cet Obsédé malgré lui (titre français ?) est une satire sacrément rigolote, cruelle, politiquement très engagée, avec un paquet de scènes érotiques aguichantes et libertines, le tout, mis en scène de façon très inspirée. Une bonne comédie. Voire plus.

 

 

Mallox
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