16 Rue du Repos
Genre: Horreur , Fantastique
Année: 2009
Pays d'origine: France
Editeur: Rivière Blanche
Collection: Noire
Auteur: Philippe Ward
 

16 rue du repos est une adresse bien connue des parisiens et même des touristes. Effectivement au 16 rue du repos, à Paris, que vous poussiez l'une des grandes portes en fonte ou bien l'une des petites portes dérobées, vous allez pénétrer dans 44 hectares dédiés à la mort et vous pourrez marcher à travers environ 70 000 tombes. Et oui, la rue du repos porte bien son nom, car c'est là que se trouve le plus grand cimetière parisien, le cimetière du Père Lachaise. Un lieu à la fois beau, étrange, calme, mythique et mystique. C'est aussi le cadre de ce roman de Philippe Ward, un roman qui mélange horreur et fantastique, et sans doute beaucoup plus encore...


Luc est photographe. Il a tout plaqué, femme et enfant, pour vivre son rêve d'artiste et monter à la capitale. Pour l'instant, il vivote en donnant des cours de photographie. C'est à l'un de ces cours qu'il rencontre Jennyfer, une jeune femme beaucoup plus jeune que lui qui paie ses études en jouant les modèles. Bientôt Luc est fasciné par cette femme et il la choisit comme modèle pour son grand projet : des photos de nu au Père Lachaise. C'est là que tout commence. Oui, le cimetière est joli et oui, il a de quoi inspirer mais bientôt des choses étranges s'y passent, le cimetière semble hypnotiser les gens comme s'il était vivant. Et que dire de ces apparitions démoniaques, de ces séances de spiritisme qui tournent mal et de cette femme accompagnée de ce chat roux qui semble pouvoir séduire les hommes avant de les dévorer ? A moins que ce ne soit le cimetière encore qui les dévore...

Dit ainsi, je vois déjà les amateurs de fantastique, d'étrange ou même tout simplement les amoureux des cimetières parisiens (et oui, il y en a, moi par exemple) se retrousser les babines et être prêt à se jeter férocement sur ce roman. Et vous le pouvez, même si malheureusement 16 rue du repos est loin de ce que je m'imaginais...

Si l'écriture de Philippe Ward est bourrée de qualité, son histoire n'est pourtant pas exempte de défauts, défauts qui m'ont un peu empêché de rentrer complètement dans l'histoire. Tout d'abord il y a le background, ce fameux Père Lachaise. C'est un cimetière que je connais par cœur. Et dans 16 rue du Repos, même si l'on retrouve quelques une des personnalités enterrées dans cette gigantesque Nécropole, comme Allan Kardec par exemple (inventeur du spiritisme pour faire simple)n cela aurait pu être n'importe quel autre cimetière. Je n'ai pas retrouvé dans l'écriture de Philippe Ward ce sentiment que j'ai à chaque fois que je franchis les portes du cimetière. Je n'ai pas retrouvé ce côté "gothique", ce côté étrangement calme, cet aspect que l'on ressent à se sentir entouré du silence de la mort. J'aurais préféré pour ma part des descriptions peut-être moins froides, peut-être plus fouillées, moins rationnelles. Le décor ne devient vraiment intéressant que dans la seconde partie du roman, et encore une fois cela aurait pu être n'importe quel autre cimetière, quand l'auteur introduit avec brio une théorie de radiesthésie : les lignes de leys. Là, le roman devient vraiment passionnant, non plus pour son côté Père Lachaise, et ça c'est dommage, ni même pour son côté fantastique, mais bien plus car l'auteur va nous expliquer et illustrer d'une façon formidable cette théorie des lignes de Ley, grâce entre autres à un personnage très réussi : Maurice Vidal, scientifique solitaire et excentrique. La théorie des Lignes de Ley, pour résumer, explique qu'il existe à la surface du globe, en dessus et au dessous, des lignes "énergétiques", en quelques sortes les veines de la terre, sa puissance (je simplifie bien évidement) circulant selon des lois complexes appartenant autant aux mathématiques qu'à la géométrie, mais aussi notamment à la géologie. C'est là-dessus que Philippe Ward base tout son roman et c'est vrai que c'est passionnant, que c'est intéressant et que c'est très bien mis en scène même si pour ma part j'aurais préféré une autre explication, peut-être plus poétique, moins scientifique, même si ça n'enlève rien au fait que cet aspect reste très intéressant. On pourrait presque dire que 16 rue du repos est un roman de science fantastique.

Oui, il y a quand même du fantastique dans le roman, un fantastique un peu étrange dû entre autre au style très particulier de l'auteur. Ces descriptions sont très froides, très carrés comme pourraient l'être des descriptions d'un roman de SF! Ce qui fait que j'ai quand même eu du mal à rentrer dedans, malgré certains passages absolument époustouflants qui m'ont un peu rappelé Evil Dead avec des corps littéralement mangés par le cimetière!

Mais la grande force de ce roman, n'est pas dans le décor (malheureusement!) ni dans sa "science- fantastique" mais bien plutôt dans le jeu absolument génial de l'Eros et du Thanatos! Philippe Ward met en scène des couples, réels ou fictifs et se permet des pages légèrement érotiques d'une toute beauté!

Il y a d'abord ce premier couple, réel, Jennyfer et Luc. Il y a le décalage de l'âge, le fait que Jennyfer soit encore vierge, les questions que les protagonistes se posent sur l'amour, leur devenir et encore une fois cette différence que les années leur imposent. L'amour est il possible? La mort ne va-t-elle pas les séparer? Si j'ai reproché jusque là à Philippe Ward un style trop carré, trop "brut de décoffrage", dès qu'il se met à disséquer les rapports humains amoureux et ceux du désir, le roman prend une tout autre tournure. C'est une vraie danse qui est mise en scène, une danse dont il faut lire la musique entre les mots, entre les lignes. Une danse entre l'éros et le thanatos dans laquelle s'invite bien sûr le cimetière. Imaginez cette jeune femme dans la fleur de l'âge poser nue dans le gris des tombes, une fleur bien vivante sur le point d'éclore qui parait si belle au milieu des chrysanthèmes fanés! La mort, c'est-à-dire le cimetière, vient lui révéler le désir, la passion, elle est comme envoutée par la mort, cette mort qui quelque part lui donne la vie, le désir... Se forme alors ce couple irréel, cimetière et jeune vierge, à la fois image païenne et image des rapports amoureux nous rappelant que le désir et l'amour sont un jeu dangereux et que la mort n'est jamais loin, point final irrémédiable.


16 rue du Repos est donc loin, très loin de ce que j'attendais. Et je dis même que parfois il vaut mieux ne pas trop attendre d'un roman, ne pas trop s'en faire d'idée avant de le lire. J'aime le Père Lachaise, j'y ai trainé mes guêtres des week end entier et même plus, et je dois dire qu'à ce niveau le roman de Philippe Ward m'a un peu déçu. De même je n'ai pas réussi à y trouver un côté spectaculaire qu'aurait pu imposer à l'auteur les lieux et les personnages mis en scène. Parfois même ça tourne un peu en rond et les apparitions n'ont rien d'effrayantes. J'en aurais voulu un peu plus. Mais, peut-être parce que le sujet de 16 rue du repos n'est pas là. Peut-être faut il y voir avant tout une histoire d'amour et de mort, une histoire sur la Terre et ses mystères, une histoire sombre et tragique où est mis en avant le couple Eros et Thanatos... Peut-être...Toujours est-il qu'au final le roman de Philippe Ward est une bien belle histoire quand même, superbement illustré par Philippe Lemaire, qui est aussi l'auteur de la BD adapté de ce roman, BD qui m'a vraiment l'air pour le coup excellente!

 

Note : 7/10

 

Le Cimmerien

 

A propos de ce Livre :

 

- Site de l'éditeur :  http://www.riviereblanche.com/

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