Au Miroir des Sphinx

 

Editeur : Argemmios éditions 

Collection : Aucune

Auteur : Charlotte Bousquet

Illustrations : Krystal Camprubi

Date de sortie : 2008

Nbre de pages : 222

 

 

Si la vision de ces monstres est insoutenable c'est que mêlant, dans leur faciès, l'humain, le bestial, le minéral, elles sont la figure du chaos […] le visage même de la mort, de la mort qui n'a pas de visage.

 

Jean-Pierre Vernant - L'individu, la mort, l'amour

 

TRINITE


Ce qui meurt, je le dis, ne peut éteindre les désirs

De ce qui vit, non plus l'éternité se réduire,

 Au temps qui change les chevelures.

 

Michel-Ange - Sonnet



Elles étaient trois. Trois sœurs - aussi inséparables, proches et lointaines que le pouvaient être des filles nées du même ventre ; aussi belles et dissemblables, pourtant, que des étrangères. Leur vrai nom s'est perdu dans l'abîme de l'histoire. On leur en a attribué bien d'autres, les uns issus des saintes, les autres des fées ou des diables, au fil du temps. Déesses, démones, simples mortelles - qui sait ? Qui sait la manière dont les mots et les hommes transforment les faits ? Quant à moi, puisque je vais, ce soir, vous chanter leur légende, je les nommerai ainsi que mon maître et le maître de mon maître l'ont fait.

Nefer, Mahet et Nebat. La Belle, la Lionne et la Dorée. Elles vivaient aux abords d'une cité dont les murs ont aujourd'hui disparu, dont le souvenir s'est effacé de la mémoire des vivants. Une cité, sur les rives du fleuve Nil - divinité généreuse dispensatrice de bienfaits.

Nefer, l'aînée, était l'enfant chérie de Râ, dieu du soleil et de la vie : le savoir de la jeune prêtresse était grand, sa magie si puissante qu'elle pouvait d'un seul mot - mais peut-être n'étaient-ce que des rumeurs - commander au vent et aux étoiles.

La cadette, Mahet, une guerrière à la crinière de sable, était une chasseresse, une tueuse implacable. Une guérisseuse, aussi. On la respectait pour ses dons, sa munificence ; on la craignait pour ses colères brutales, dévastatrices.

Quant à Nebat, elle se contentait d'exister et cela satisfaisait tout le monde, tant étaient merveilleuses ses prunelles d'or et ses innocentes chansons, tant étaient doux ses cheveux scintillants et sa peau de cuivre blond, tant étaient gracieuses ses courbes juvéniles et ses rondeurs de femme illuminées par les rayons de l'astre du jour.

Un jour, alors que Mahet était partie traquer quelque gibier et que Nefer était en prières au temple, deux hommes vêtus de pagnes de lin richement brodé - l'un portant à son flanc gauche une courte épée à la garde d'or et d'argent, l'autre simplement armé d'un long bâton d'ébène sculpté - se présentèrent dans la cour de la maison. Demeurée seule, Nebat jouait avec une portée de chatons et riait dans la clarté matutinale. Les deux voyageurs, saisis par sa beauté, s'arrêtèrent un instant sous le portique de pierre blanche, et retinrent leur souffle.

Le guerrier à la chevelure d'or rouge tressée de perles s'avança le premier.

"Puisse le soleil éclairer à jamais vos jours et votre grâce, belle dame ! Souti est mon nom - et voici mon frère, Oussir", déclara-t-il avec une profonde révérence.

Resté en arrière, son aîné, le visage dissimulé par l'ombre d'une longue mèche raide et noire, s'inclina discrètement.

"Nous venons des lointaines montagnes rouges d'Ouejda, en quête d'expérience et d'aventures. Nous accorderez-vous, ô fille resplendissante de ces terres fertiles, l'hospitalité de votre demeure ?

- Je m'appelle Nebat. Ce sera un honneur, pour mes sœurs et moi, de recevoir en notre maisonnée deux illustres voyageurs venus d'un lointain et aride pays, et de partager avec eux nouvelles et souper. Venez, mes seigneurs. Ne restez pas sur le seuil."

Oussir remarqua, au long regard lancé à son cadet, au léger tremblement des longs cils féminins, que Souti ne laissait pas indifférent leur jeune hôtesse. Il en faudrait peu avant qu'il vole son cœur et devienne le maître absolu de son corps.

Ils pénétrèrent dans la maison à la suite de Nebat. La pièce principale, de couleur ocre, ne possédait qu'une minuscule ouverture et conservait ainsi une certaine fraîcheur. Cinq ou six nattes colorées et de gros coussins tissés étaient disposés autour d'une table de bois rose sur le sol de terre battue. Contrairement aux murs nus, dénués de tout ornement, le plafond était exceptionnel : bleu nuit, piqueté de centaines d'étoiles, il évoquait des figures humaines, animales, végétales, d'une grâce et d'une finesse sans pareilles, ainsi que les constellations. Fasciné, Oussir ne s'arracha à la contemplation de cette œuvre fabuleuse que pour s'enquérir de l'identité de l'artiste.

"C'est ma sœur aînée, Nefer, qui a fait cela, révéla la Dorée. Elle est prêtresse au temple de Râ et a été éduquée dans les techniques de la représentation."

Deux esclaves entrèrent, silencieux et discrets. Ils posèrent des fruits séchés, de la bière et du pain sur le plateau de bois, puis repartirent aussi furtivement qu'ils étaient apparus.

"Elle doit être très sage et très instruite, alors, murmura Oussir."


VIES VOLEES


On reconnut alors la présence de la Mort Rouge. Elle était venue comme un voleur de nuit. Et tous les convives tombèrent un à un dans les salles d'orgie inondées d'une rosée sanglante, et chacun mourut dans la posture désespérée de sa chute.

 

 

Edgar Allan Poe - Le masque de la Mort Rouge



Les feuilles mortes forment un tapis épais, éclairé par la clarté argentée de la lune. La clairière est silencieuse, pas un bruissement, pas un souffle de vent. Autour de moi, les ombres des arbres projettent des formes étranges en cette nuit de novembre. Je suis arrivée, en ces lieux éloignés de tout, au crépuscule - un signe, peut-être, du terme de mon existence. Je l'ignore. J'attends. Je l'attends.

Il viendra.

Je l'ai convoqué.

C'est une affaire de volonté. Et de désir. Ces deux éléments sont suffisamment puissants en mon âme et mon cœur pour qu'il ait entendu mon appel.

Il fait froid. Malgré ma lourde cape de laine bleue, ma tunique, mes braies de velours épais et mes bottes fourrées, je frissonne - mais peut-être est-ce seulement la peur. Enfin, un son : le hululement d'une chouette qui part en chasse. Je laisse mon esprit dériver vers l'oiseau nocturne, l'accompagne quelques minutes, planant, immatérielle, à ses côtés. Elle tourne un instant son regard d'or vers moi, en un salut silencieux, puis reprend son vol, plonge, s'empare d'une proie.

Je regagne mon corps, m'étire, ouvre les yeux.

Me fige.

Quelque chose se profile entre les arbres. Une ombre grise, indistincte d'abord, qui s'affine en une haute silhouette humaine. Un profil se découpe à la lueur de l'astre, aussi blanc que la neige.

Il s'approche.

Je n'effectue aucun mouvement - il est trop tard pour fuir, à présent. Trop tard pour regretter. Il n'est plus qu'à quelques mètres. Ses cheveux d'un noir bleuté encadrent ses traits blêmes. Ses yeux, insondables et obscurs, possèdent l'éclat de l'ambre. La couleur écarlate de sa bouche contraste étrangement avec la pâleur de son visage.

"Alors, c'est vous."

Sa voix, profonde, grave, résonne dans le calme des lieux, étonnamment vivante et vibrante pour quelqu'un venu de l'au-delà. Il se recule, me dévisage, m'examine attentivement, fronce ses sourcils de jais.

"Je ne comprends pas vos raisons, madame. Je ne discerne en vous aucun désespoir, aucune volonté de mourir, et pourtant vous désiriez ma venue - cela j'en suis certain."

Il plisse les paupières.

"Devrais-je croire à un piège ? Vous seriez-vous associée avec des Chasseurs, Enfant d'Isis, pour me détruire ?"

Enfant d'Isis. Il connaît notre nom. Les hommes nous appellent sorcières mais nous, qui avons appris les vertus des Mots et des Essences, n'avons jamais oublié qu'elle fut notre mère à toutes.

Je l'observe à mon tour. Ma vision passe la barrière de son corps, plonge vers son âme aux reflets iridescents. Se retire, brûlée vive. Et déçue. Il possède son apparence, son magnétisme, mais c'est tout.

À la place de l'Archange, j'ai devant moi un vampire.

Mes chances de demeurer en vie sont donc encore plus infimes.

"Madame, puis-je me permettre de vous demander de nouveau pourquoi vous m'avez appelé ?"

Pour un monstre buveur de sang, il est plutôt courtois. Autant engager la conversation, cela me permettra peut-être de survivre jusqu'à l'aube.

"Je ne suis l'alliée d'aucun Chasseur, rassurez-vous. Je les fuis comme la peste. À vrai dire, ce n'était pas exactement vous que j'attendais."

Sous son regard mordoré, j'ai l'impression - en plus d'une certaine sensation de ridicule - d'être la proie d'un loup. Et je tremble, mais ce n'est pas le froid. Cette fois, j'en suis sûre.

"Et qu'attendiez-vous - ou, plus exactement, qui attendiez-vous, madame ?

- Uriel."

Il écarquille les yeux.

"Mais je suis Uriel !"

Ceci expliquerait peut-être cette malheureuse et dangereuse méprise.

"Je cherchais à invoquer l'Archange - je suis… désolée. Vraiment. Je… je crois que… je… je vais vous laisser. Je dois rentrer."

À plus de vingt ans, être incapable de trouver autre chose que des excuses pitoyables, et bafouiller ainsi ! Lamentable ! Mais qui ne le serait pas face à un Enfant de la Nuit, face à l'un de ces abominables buveurs de sang ?


LES CONFESSIONS D'UN PARJURE


La Mort m'appelle. Je la sens, tout près de moi, qui observe par-dessus mon épaule et attend, drapée dans sa longue houppelande de ténèbres, que sonne l'heure. Je ne refuserai pas son étreinte. Qu'elle m'emporte ! N'importe où, loin d'ici ! Même si c'est en Enfer ! Mais avant de partir, avant de sombrer, je veux confesser le crime qui a fait de moi un damné.


Ce soir-là, la neige tombait dru. Les flocons tourbillonnaient, épais et resserrés, le vent sifflait sans relâche à mes oreilles. Une bise glacée s'insinuait sous mes vêtements et dardait sur ma peau des épines de glace. Mes pieds s'enfonçant dans l'épaisse couche qui crissait sous mon poids, j'allais sur la route menant à Toulouse, prochaine étape de mon Tour de France. Je n'étais plus très loin - du moins je l'espérais. Mais avec cette voie déserte et ce blizzard, comment le savoir ? Ce que je n'ignorais nullement, en revanche, c'étaient les dangers qui me guettaient : brigands et va-nu-pieds, loups et, surtout, l'épuisement qui poussait les voyageurs égarés à se reposer contre un rocher, au pied d'un arbre, et les plongeait doucement dans le sommeil du trépas.

De loin en loin, j'entendais les hurlements d'une meute en chasse, le hululement d'un rapace nocturne ; fier et déterminé, je refusais de céder à la terreur. Pour me rassurer, je portais régulièrement la main au pommeau de ma rapière - ma première réalisation digne de ce nom - et je m'efforçais de concevoir, par la pensée, le chef-d'œuvre qui ferait de moi un Compagnon accompli. Je me plaisais à imaginer une lame faite de l'alliage le plus fin et le plus solide, une garde aussi délicate que du filigrane, et une poignée de cuir repoussé. Celle que je portais pour l'heure était bien plus simple, mais l'ensemble était équilibré.

Soudain, j'aperçus une masse sombre, juste devant moi. M'approchant, je vis qu'il s'agissait d'une petite chapelle de pierre protégeant une Vierge. La statue, assez ancienne, était habilement sculptée et, en l'examinant de plus près, je vis que de l'eau avait gelé sur ses joues, formant deux grandes traînées de larmes sur sa peau d'ardoise.

Je frissonnai, ému, troublé par cette vision, et murmurai une brève prière.

Quand je me retournai, prêt à reprendre ma route, je vis deux yeux phosphorescents luire dans les ténèbres, à quelques pas de moi. À cet instant, je regrettai de ne pas avoir accepté d'emporter avec moi un pistolet - même si ces armes n'étaient pas très fiables, du moins permettaient-elles d'éviter le corps à corps. Je tirai ma lame du fourreau et m'avançai, bien décidé à vendre chèrement ma peau malgré la crainte sourde qui montait en moi : car c'était un loup qui me faisait face et ces animaux ne se déplacent pas seuls, je ne le savais que trop !

"Arrière !" grondai-je, la main crispée sur la poignée de mon arme.

Le fauve grogna, babines retroussées. De sa fourrure gris-brun je ne distinguais guère plus, à cet instant, que quelques zones pâles dans l'obscurité. Ses prunelles, en revanche, brillaient d'un feu ardent. Ses prunelles… Leurs prunelles ! Je discernais parfaitement, à présent, les féroces silhouettes de la meute. Immobiles, les bêtes attendaient que je tente une sortie désespérée ou que je m'effondre de fatigue.

Je pouvais entendre mon cœur battre à toute allure dans ma poitrine, le sang affluait douloureusement à mes tempes et, malgré la tourmente, je sentais des gouttes de sueur perler sur mon front. Tendu, exténué, apeuré, je me forçai à demeurer alerte ; je songeai même à prier, mais les paroles pourtant familières de l'Ave Maria avaient disparu de ma mémoire. Tremblant de peur et d'effroi, je commençais à me demander s'il ne valait pas mieux, finalement, tenter le tout pour le tout, charger les bêtes, lame au clair, et tomber en combattant… quand les animaux s'écartèrent.

Emmitouflée dans une longue houppelande noire, une haute silhouette, comme surgie de nulle part, brisa le cercle des fauves et avança vers moi.

J'avais entendu nombre d'histoires parlant des meneurs de loups, qui pactisaient avec le Diable et commandaient aux bêtes sauvages. Je connaissais également l'existence de monstres pouvant, les nuits de pleine lune, se transformer en bêtes. Je brandis ma rapière, décidé à vendre chèrement ma peau.

"Ne préférez-vous pas le réconfort d'un toit et d'un repas chaud à la dangereuse précarité de votre actuelle situation?"

C'était la voix d'une femme, basse et un peu rauque.

"Qui… qui êtes-vous ? murmurai-je, baissant lentement ma lame.

- Luna de Lobierac."

Hésitant au départ, j'acceptai néanmoins l'invitation et pris la main gantée de noir qu'elle me tendait. Alors je la vis - et perdis connaissance.


LE DERNIER ULYSSE


Tous ses fidèles compagnons furent perdus,

 

Lui, la houle et le vent l'entraînèrent jusqu'à ces bords ;

Et moi je l'accueillis, je le nourris, je lui promis

De le rendre immortel, et qu'il ne vieillirait jamais...

 

Homère - L'Odyssée



Il avait échoué chez elle, hagard, hébété, vêtu de loques. Blessé au torse et aux jambes, il s'était traîné jusqu'à la grève, avait escaladé, s'écorchant les mains et les genoux, le petit sentier rocailleux et escarpé de la colline, puis avait rampé jusqu'au seuil de sa caverne. Alors, il s'était évanoui. C'était un homme de belle carrure, dans la force de l'âge. Les traits de son visage étaient fermes, bien dessinés ; ils laissaient, sous la crasse et le sang séché, entrevoir une certaine beauté.

Elle vivait seule, sur son île, loin des cœurs des mortels, loin des regards du monde - depuis combien de temps ? Elle l'ignorait. Elle avait vaguement conscience d'avoir reçu, jadis, la visite de voyageurs égarés, mais leur souvenir s'était estompé dans sa mémoire : elle se demandait souvent si ces silhouettes floues, éthérées, avaient été réelles ou n'étaient que le fruit de songes nés de la solitude. Elle se demandait également, parfois, si elle-même n'était pas qu'un rêve évanescent. Seuls le vent sur ses joues, les embruns, la caresse du soleil et les gifles de la pluie portée par la tempête l'assuraient qu'elle était bien réelle.

Elle le recueillit, inanimé, et le coucha sur son lit de mousse, puis, pendant des jours, de l'aube au crépuscule, du crépuscule à l'aube, le soigna et le veilla. Comme si la présence de cet inconnu ouvrait des chemins jusqu'alors dissimulés dans les brumes, elle prit peu à peu conscience de ce qui l'entourait et voulut, pour son réveil, quelque chose d'agréable. Ainsi, les parois nues de la grotte se couvrirent de nacre, de fresques évoquant des créatures marines ; sa couche s'orna de coraux et de coquillages ; elle-même se para de voiles vaporeux nés de la rosée et de l'écume. Il dormait encore mais, déjà, elle se sentait plus vivante en sa présence et, de cela, lui était reconnaissante.

Quand, enfin, il ouvrit les yeux et plongea ses prunelles d'or pâle dans les siennes, elle sentit, pour la première fois depuis bien longtemps, que son cœur battait et que la vie circulait en ses veines.

"Où suis-je ? s'enquit-t-il faiblement. Qui êtes vous ? Et… comment suis-je arrivé en ces lieux ?

- Vous vous êtes évanoui non loin d'ici, alors je vous ai mené auprès de moi et j'ai tenté de guérir vos maux. Vous êtes sur mon île. L'île de Calypso.

- C'est un rêve, assurément… Je dois être pris de délire.

- Votre fièvre est passée depuis longtemps, seigneur, et vous êtes bien éveillé. Mais peut-être avez-vous faim ? Que désirez-vous ?

- Du lait, du vin, des fruits et de la viande", murmura-t-il, éberlué.

Elle se concentra : la mémoire des aliments lui revint comme par enchantement et, aussitôt, des mets apparurent près de lui : mouton rôti, miel, fromage frais, vin, eau, raisin, dattes furent disposés sur un superbe plateau d'argent. Elle le regarda manger en silence, attendant qu'il ait bu la dernière gorgée de sa coupe pour assouvir sa curiosité.

"Comment puis-je vous appeler ? demanda-t-elle enfin.

- Pourquoi pas… Ulysse ? répondit-il avec un léger sourire. Après tout, mon histoire n'est pas si éloignée de la sienne et, comme lui, j'aspire au repos.

- Ulysse ? Ce nom ne m'est pas étranger. Il me semble autrefois avoir connu un héros qui portait le même. Le passé est si flou… Mais venez ! Si vous avez la force de vous lever, nous irons tous deux contempler le coucher de l'astre solaire sur l'océan, et vous me conterez vos aventures."

Réprimant un grognement de douleur, le naufragé se redressa et la suivit à l'extérieur de la grotte. Ils marchèrent jusqu'à la falaise, suivant inconsciemment le rythme des vagues s'écrasant contre les récifs, en contrebas, puis s'arrêtèrent près d'un gros rocher plat et lisse. Le soleil se couchait, dispersant à l'horizon ses rayons rougeoyants et pourpres. Elle l'aida à s'asseoir et se tint auprès de lui, sans oser bouger, peu à peu enivrée par le parfum de sa chair et le doux frôlement de sa peau contre la sienne.

"Alors, Ulysse ? D'où venez-vous ? Qu'est-ce qui vous a conduit jusqu'ici ?

- La guerre, madame. La guerre, qui durant de longues années m'a retenu loin de chez moi, puis le fol espoir de trouver, au-delà des mers, une terre d'accueil, un lieu où je pourrais bâtir une nouvelle vie et gagner suffisamment d'argent pour y entretenir mon épouse et mon petit garçon.

- De l'argent ?

 …



A propos de ce livre :

 

- Chronique  du livre "Au Miroir des Sphinx"

-Site de l'éditeur: http://www.argemmios.com/ 

 

(Copyright Argemmios éditions/Charlotte Bousquet, extrait diffusé avec l'autorisation de l'éditeur)