La Trahison des Dieux
Genre: Romance , Mythologies , Fantasy Historique , Classiques , Guerre
Année: 1991
Pays d'origine: Etats-Unis
Editeur: Le Livre de Poche
Auteur: Marion Zimmer Bradley
Traducteur:
Hubert Tezenas
Sortie VO: 1987
 

J'ai découvert Marion Zimmer Bradley par son mythique ouvrage Les Brumes d'Avalon (ou Dames du lac). Pas très original, me direz-vous, mais a-t-on déjà vu quelqu'un attaquer la montagne Tolkien par le versant Silmarillion ?

La Trahison des dieux fut donc le deuxième roman de l'auteure qui tombait entre mes mains.

Après avoir été bouleversée par ma première expérience au pays des chevaliers de la table ronde, j'ai ouvert le livre avec empressement pour savoir ce que l'auteure avait pu faire avec ce mythe qui avait bercé mon enfance : l'Illiade. Dans ce roman, l'auteure raconte donc l'histoire de la chute de Troie, mais du point de vue des troyens et plus précisément en suivant la vie de Cassandre, la célèbre prophétesse maudite et fille du roi Priam, depuis les temps qui ont précédé la guerre, jusqu'au devenir des survivant(e)s après la défaite des troyens.

 

Autant dire que les débuts furent difficiles. Pour deux raisons majeures :

La première c'est que j‘ai eu le sentiment que l'auteure a fait de l'Illiade exactement ce qu'elle avait fait de la légende arthurienne. Déjà, même principe de reprendre un mythe pour en donner un autre éclairage. Ensuite, même procédé de choisir une narratrice qui sera l'Elue de l'auteure : incarnation de sa pensée, réceptacle de toutes ses faveurs, femme courageuse, rebelle et insoumise, prisonnière d'un terrible destin et rejetée de tous pour sa différence. Même idée aussi d'opposer une religion basée sur la vénération d'une figure féminine reliée à la nature et à l'amour libre, à une religion machiste, contraignante et punitive. Enfin parce que certains archétypes me paraissaient redondants : le patriarche pas méchant mais bourru (Uther/Priam), la jolie fouteuse de merde (Guenièvre/Hélène), la femme prête à tout par amour (Elaine /Briseis), la mère spirituelle de l'Elue, dernière chef d'une culture vouée à disparaître

(Viviane/ Penthésilée), le chevalier servant avec qui l'Elue vit un amour impossible (Lancelot/ Enée), etc etc. Deuxième ouvrage et déjà l'impression de « déjà lu » : on prend les mêmes et on recommence.

La deuxième raison c'est ce sentiment que l'auteure force parfois un peu (beaucoup) le trait pour faire passer son message féministe. Quasiment aucun des représentants de la gente masculine n'est épargné, et l'auteure n'y va pas avec le dos de la c(o)uillère : tous pourris (même papa) ! Et pervers, et ambitieux, et arrogants, et violents, etc. Il s'en prennent plein la tronche ces grands héros de mon enfance !

 

Et pourtant : ça fonctionne. Pourquoi ? Parce que Madame Zimmer-Bradley est un excellent écrivain

… qui possède un très bon sens de l'équilibre entre action, description et émotion,

… dont la plume fluide et forte est agréable à lire,

… qui parvient à offrir un regard neuf et totalement cohérent qui apporte de la nouveauté là

où on ne la pensait pas possible,

… qui maîtrise son sujet. Je n'ai certes pas été vérifier la véracité de tous ses ajouts mais nul doute que même ses digressions avec l'histoire pour le bien de sa cause sont le fruit d'une documentation pointue.

… et qui donne au mythe une odeur de vérité car elle évoque les Hommes et leurs sentiments dans toute leur complexité, leur incohérence, leur imperfection.

Pas de doute l'auteure jongle avec des balles qu'elle maîtrise parfaitement et réussit le tour de force de renouveler un mythe archi connu et totalement éculé, et même d'y inclure une forme de "suspense de lecture" ! On a beau savoir exactement ce qui va se passer on tourne les pages en se demandant de quoi l'autre sera faite.

Et puis à force on y croit, même si quelques passages irritants jalonnent la lecture, certains personnages ou certaines relations se révèlent moins évidentes qu'il n'y paraissait et surtout tout sonne vrai. De même que ce parti pris féministe est tout à fait justifié dans le sens où les femmes sont vraisemblablement les grandes oubliées d'une Histoire et des histoires écrites par et pour des hommes. Comme elle l'exprime en épilogue, l'auteure nous propose une version toute personnelle de l'Illiade, pourtant sa subjectivité assumée n'empêche en rien le lecteur de pénétrer pleinement dans son univers.

A tel point qu'on referme le livre, plus très sûr de soi…. "Pinaise, on m'aurait menti !".

Et que l'on soit pour ou contre tout cela donne à penser , à réfléchir, à ressentir. C'est qu'on ne ressort pas indemne de la lecture d'un livre de Marion Zimmer Bradley.

En somme, lire du Marion Zimmer Bradley c'est comme commander son plat préféré au restaurant : on aura pas la surprise, mais on est sûr de bien manger.



Note : 7,5/10

 

Hëlëne

 

A propos de ce livre :

 

- Site de l'auteur : http://www.mzbworks.com/

- Site de l'éditeur : http://www.livredepoche.com/

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