Exorcisme tragique
Titre original: Un bianco vestito per Marialé
Genre: Giallo , Gothique , Murder party
Année: 1972
Pays d'origine: Italie
Réalisateur: Romano Scavolini
Casting:
Ida Galli, Luigi Pistilli, Ivan Rassimov, Pilar Vilazquez, Ezio Marano, Giancarlo Bonuglia, Shawn Robinson, Gengher Gatti...
Aka: Spirits of Death / A White Dress for Marialé / Exorcisme tragique - les monstres se mettent à table
 

Essentiellement connu pour son thriller horrifique "Cauchemars à Daytona Beach" (Nightmare - 1981), le réalisateur Romano Scavolini (également directeur de la photographie) a tourné au cours de sa carrière une douzaine de longs métrages, dont seulement trois d'entre eux ont franchi nos frontières. Exorcisme tragique est de ceux là. Filmé en 1972, année prolifique pour le thriller italien, Un bianco vestito per Marialé est une sorte de fourre-tout mêlant giallo, étude de moeurs et drame psychologique, le tout dans un cadre gothique avec un huis-clos réunissant le couple propriétaire des lieux (un château retiré), son majordome, et six invités plus ou moins attendus.

Flashback - Dans les années 1940, la petite Marialé, âgée d'à peine dix ans, est témoin du meurtre de sa mère et de l'amant de celle-ci par son père, qui retourne ensuite l'arme contre lui une fois son forfait accompli (fin du flashback).

Retour au début des années '70 - L'orpheline est devenue une belle femme qui s'est mariée avec Paolo, un châtelain désargenté et taciturne. Le couple vit en vase clos avec Osvaldo, l'homme à tout faire, avec une préférence pour les sales besognes.

 

 

Parmi ces dernières, le domestique est chargé de veiller à ce que Marialé prenne bien ses tranquillisants. Il semblerait que la jeune femme, jamais remise des événements passés, soit devenue psychologiquement fragile. Mais Marialé n'est pas de cet avis, et pour elle les raisons de sa dépression sont dues à l'isolement que lui impose Paolo. Aussi, afin de tromper cette solitude qui la ronge, elle invite en secret six personnes, des amis plus ou moins proches, plus ou moins recommandables. Mais peu importe... Marialé ne veut plus vivre cloîtrée, et elle a besoin de se changer les idées.
Par ordre d'arrivée, les six invités ont pour nom Massimo, qui eut dans le passé une liaison avec Marialé, Gustavo et sa dernière conquête (Sémy, superbe noire), Mercedes, et enfin Jo et Sebastiano.
Gustavo a un comportement abject envers Sémy qui, elle, ne rêve que de s'éclater et n'a pas la langue dans sa poche (manifestement, Gustavo n'aime pas les femmes libérées et cherche à soumettre sa maîtresse comme au bon vieux temps de l'esclavage). Jo et Sebastiano vivent ensemble. Le problème est que, si Sebastiano est un homosexuel pur et dur, Jo est quant à lui bisexuel et a en parallèle une liaison avec... Mercedes. Et cette dernière se trouve être bisexuelle également, ce qui lui vaudra de coucher avec Sémy lors de ce week-end orgiaque.

 

 

Oublions le titre français, hors-propos. Un bianco vestito per Marialé culmine au moment où notre héroïne, à la fois maîtresse et prisonnière des lieux, propose à ses convives de se déguiser. Elle-même va se revêtir de la robe blanche que portait sa mère quand elle fut assassinée, un vêtement immaculé ayant cependant conservé deux tâches rouges correspondant aux impacts de balles. Le passé refait surface, et il ne va cesser de planer au cours de cette soirée dans laquelle vont se succéder repas pantagruélique, joutes verbales, scènes orgiaques, et frustration sexuelle pour certains des protagonistes.
D'autres, au contraire, vont se lâcher au niveau de la libido, guidés par le comportement totalement décomplexé de Sémy. A ce propos, il est intéressant de constater qu'à cette époque, le cinéma italien (et notamment le thriller) eut tendance à voir en la femme noire un moteur de l'épanouissement sexuel. Elle sera ainsi le "prototype" de la femme libérée dans plusieurs gialli, comme Beryl Cunningham se livrant à un strip-tease lors d'une soirée mondaine dans "Si douces, si perverses", Carla Brait effectuant un show particulièrement chaud dans Les rendez-vous de Satan ou encore Jane Garret entamant une danse lascive devant son infirmière (Monica Strebel) dans Les insatisfaites poupées érotiques du docteur Hichcock.

 

 

Romano Scavolini a volontairement axé son film sur la psychologie de ses personnages, réduits à neuf dans la plus grande partie de l'intrigue. Chacun est donc passé à la loupe, et pour la majorité d'entre eux la balance ne penche pas en leur faveur. Surtout les hommes, en fait. Ils sont vulgaires, immatures, méprisants, violents ou lâches, souvent pour dissimuler un sentiment de mal être. Massimo (Ivan Rassimov) fait figure d'exception dans ce tableau peu reluisant de l'être humain. On sent qu'il est toujours épris de Marialé, qu'il est prêt à tout pour l'aider, et s'interpose chaque fois que l'un des invités franchit la ligne rouge.
Tel Orphée envers Eurydice, Massimo serait prêt à descendre aux Enfers afin de ramener Marialé dans le monde des vivants.

 

 

Après cette longue exposition, la partie thriller commence tardivement, au bout d'environ une heure. A un premier meurtre, filmé en ombres chinoises, vont se succéder d'autres crimes à un rythme effréné. Le temps n'est plus aux paroles mais aux actes. On notera quelques mises à mort spectaculaires dans le lot, l'une au bord d'une piscine, l'autre dans une allée mettant en lice une meute de chiens féroces.

En ce qui concerne le casting, on retrouve au sein du film quelques habitués du genre, parmi lesquels Ida Galli, Luigi Pistilli ou encore Ivan Rassimov. Sous son nom de scène d'Evelyn Stewart, Ida Galli fut une figure récurrente du cinéma populaire (Hercule contre les vampires, La mansión de la niebla, Concerto per pistola solista, Les sorcières du lac, L'emmurée vivante, Knife of Ice ou encore L'adorable corps de Deborah et "La queue du scorpion", dans lesquels elle jouait déjà avec Luigi Pistilli). Un Pistilli qui a lui aussi crevé le grand écran, à travers le western (La mort était au rendez-vous, Le grand silence), le giallo (Ton vice est une chambre close..., La baie sanglante) et le polar (Milan calibre 9). Enfin, Ivan Rassimov (Djrassimovic de son vrai nom) s'est fait une réputation de bad guy au regard perçant dans les gialli de Sergio Martino, à savoir L'étrange vice de Mme Wardh, L'Alliance invisible et Ton vice est une chambre close.... Il a été un acteur incontournable du thriller à cette époque, jouant également dans Homicide parfait au terme de la loi, Piège pour un tueur ou encore Spasmo. Il tourna de même en deux occasions pour Mario Bava, dans La planète des vampires et Shock.

 

 

N'oublions pas la ravissante Pilar Velazquez, actrice espagnole aperçue dans Il fiore dei petali d'acciaio, Eroticofollia et Le manoir aux filles. Et enfin, Ezio Marano a tourné pour Sauro Scavolini (le frère de Romano) dans Amore e morte nel giardino degli dei, tandis que Gengher Gatti et son faciès patibulaire ont marqué les esprits dans Les vierges de la pleine lune et Le massacre des morts-vivants.
Quelques mots sur la partition musicale, mélodique et empreinte de nostalgie. Elle est due à un duo composé du fameux Bruno Nicolai et de Fiorenzo Carpi, ce dernier ayant travaillé régulièrement pour Luigi Comencini ("Casanova, un adolescent à Venise"), Tinto Brass ("Salon Kitty") ainsi que Patrice Chéreau, notamment pour "La chair de l'orchidée".
On pourra reprocher à cet Exorcisme tragique de ne démarrer les hostilités qu'après une longue exposition des personnages (l'assassin se fait effectivement attendre même si la menace est rapidement palpable), et d'être un patchwork intégrant des éléments empruntés à divers genres : le giallo, le drame psychologique, l'étude de moeurs, le film gothique et la murder party. Un cocktail pas forcément homogène qui pourra rebuter une frange du public, et séduire une autre. A vous de juger !

 

 

Flint



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