Pirate des Caraïbes, Le
Titre original: Swashbuckler
Genre: Aventures , Piraterie
Année: 1976
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: James Goldstone
Casting:
Robert Shaw, James Earl Jones, Peter Boyle, Geneviève Bujold, Beau Bridges, Geoffrey Holder, Avery Schreiber, Tom Clancy, Anjelica Huston, Alfie Wise, Sid Haig...
 

Il était une fois...

Des avant-postes coloniaux des grandes puissances de l'Europe au sein desquels régnaient des gouverneurs tyranniques spoliant la population de sa liberté et ses richesses à des fins personnelles. Tel était alors l'état tragique de la Jamaïque au début du18e siècle, sous le joug de la cruauté de son gouverneur temporaire, Lord Durant (Peter Boyle).

Les cachots de sa forteresse, tous faits de pierres sombres, pleuraient avec les voix de ceux qui osaient s'opposer à son despotisme.

Heureusement, quelques pirates aventureux naviguaient dans les eaux troubles et mouvementées des Caraïbes. Ceux-ci se faisaient souvent les ennemis des tyrans en même temps que les héros du peuple. Le Capitaine Ned Lynch (Robert Shaw) était l'un des plus célèbres de ces swashbucklers...

C'est avec ce commentaire et dans ce contexte que le film commence...

 


Nick Debrett (James Earl Jones) s'apprête à être pendu sur la place publique par le Major Folly (Beau Bridges) faisant dos à la mer. L'œil du condamné s'éclaire bientôt à la vue d'un événement lointain, tout comme la mine du second du Major exprime une subite stupéfaction. Aux abords de la côte, un bateau vient de faire son apparition ! Les canons ne tardent pas à résonne,r venant faire exploser leurs boulets au pied de la potence, et non loin d'un Major zélé qui continuera ensuite à jouer sans cesse de malchance. C'est le chaos, et c'est médusé que Lord Durant assiste à la scène de sa fenêtre, tout comme une énigmatique femme (Anjelica Huston). La caméra nous emmène alors dans les soutes du bateau, avant de remonter lentement vers le bord et son équipage soudé, puis vers le plus haut mât sur lequel campe le fameux Ned Lynch qui se lance à l'abordage de la potence, venant ainsi délivrer le condamné qui n'est autre que son second, et un fidèle ami. Libéré avec fougue et dans la bonne humeur, l'heure est à la rigolade.

Au petit matin, Lady Barnet (Louisa Horton) et sa fille Jane (Geneviève Bujold), sortent de la forteresse pour aller quitter les lieux en diligence. Le Major Folly a reçu des ordres : il doit les escorter. Pas de doute, il s'agit de deux femmes indépendantes et au fort caractère puisque l'officier se verra menacé de se faire couper les couilles s'il s'aventurait à monter dans leur calèche. Celui-ci se résignera à les suivre de loin mais sera vite neutralisé par nos deux aventuriers : Lynch et Debrett. Ceux-ci enlèveront la jeune femme pour demander rançon.

Petit à petit, Jane s'apercevra que, derrière le côté rustre de la bande de flibustiers, se cache d'avantage de noblesse qu'au sein de la cour du gouverneur. Elle se ralliera petit à petit à leur cause et amènera bientôt sa contribution pour protéger enfin la Jamaïque du joug d'un tyran.

 


Produit par les studios Universal, il est étonnant de voir qu'un tel film ait reçu un accueil aussi tiède à l'époque de sa sortie et qu'à ce jour cette petite perle du film de pirates, et plus largement d'aventures, n'ait toujours pas été réévaluée à sa juste place. On le doit à James Goldstone, réalisateur à la fois rompu à l'exercice de mise en scène via un paquet de séries ("Star Trek", "Des agents très spéciaux", "Le fugitif", "Rawhide"...) mais également à quelques œuvres antérieures à cette joyeuse flibusterie. Des films quelque peu oubliés ou occultés eux aussi, à l'instar du sympathique "A Man Called Gannon", quasi-remake avec Anthony Franciosa de "L'homme qui n'a pas d'étoile" de King Vidor, ou encore de "Jigsaw", autre remake d'un Thriller à base d'amnésie signé Edward Dmytryk : "Mirage", avec Gregory Peck. Les années passent et ne semblent pas vouloir retenir Goldstone. "The Gang That Couldn't Shoot Straight" (comédie sur la mafia avec un De Niro encore débutant) puis "They Only Kill Their Masters" thriller canin avec James Gardner, tous semblent à ce jour être passés à la trappe, et finalement c'est encore du moyen "Toboggan de la mort" qu'il tournera en 1977 dont on se souvient le mieux. Quelques diffusions dans nos contrées sur TF1 dans les années 80 n'y sont certainement pas étrangères. C'est d'autant plus dommage qu'entre tous ces films mésestimés, s'il y en a un à retenir et à réhabiliter, c'est bien ce "Pirate des Caraïbes" qui n'a, précisons le tout de même, que peu de rapport et heureusement, avec la série des récents films paquebots de Gore Verbinsky.

 


Il s'agit d'un spectacle enchanteur, revitalisant, réussi à tous niveaux, une sorte d'addition de talents formant une osmose comme on en voit finalement assez peu souvent. Mélange de "Robin des bois" de Curtiz, du "Corsaire rouge" de Robert Siodmak et de "Fanfan la tulipe", on y retrouve la même joie de vivre et de filmer pour la moins communicative. En passant, le tandem Robert Shaw/ James Earl Jones fait fortement penser au tandem Lancaster/Nick Cravat du chef-d'œuvre de Siodmak, et le film parvient à retrouver le même équilibre qui en faisait la réussite. Un mélange d'aventures rondement menées doublé d'un humour omniprésent. Un rythme sans failles reposant sur une dynamique de mise en scène l'étant tout autant, ainsi qu'une expressivité des situations et des acteurs qui font que "Swashbuckler" pourrait bien être un film muet avec quelques cartons ici et là qu'il passerait encore. L'humour, lorsqu'il ne s'agit pas tout simplement de gags, fonctionne sur plusieurs niveaux. Celui des Buddy-Movies avec l'arrivée de Geneviève Bujold qui se battra même en duel contre Ned Lynch, perdant au passage quelques boutons de son corset ; la farce avec des personnages hauts en couleurs comme ce Lord Durant prenant son bain au son de la mandoline et entouré de sa cour par laquelle il se fait pomponner avec une préciosité outrée, le burlesque pur avec Beau Bridges en officier de l'armée tellement maladroit qu'il ne parvient à ôter l'épée de son fourreau dans une diligence trop basse de plafond ; encore du burlesque avec le tandem Shaw/Jones qui, pensant rebondir sur le voilage d'une maison à l'instar des "Flying circus" Lancaster/Cravat, passeront lourdement à travers pour se vautrer la tronche dans un tas de poutrelles. Un soupçon d'humour malicieusement érotique lors d'une scène où Geneviève Bujold se baignant nue se voit rejointe en barque par notre Captain Lynch, lui amenant ses frusques tandis que la caméra se fait sous-marine quelques (trop courtes) secondes durant. Du comique quasi-slapstick avec des batailles rangées entre nos sympathiques et solidaires flibustiers et les forces de l'armée, scènes au sein desquelles on pourrait aisément remplacer les armes blanches par des tartes à la crème. Et puis, outre l'humour, "Le pirate des Caraïbes" offre une impressionnante galerie de personnages hauts en couleurs lorgnant parfois vers le grotesque ou la bande dessinée. Ce Lord Durant qui se fait arracher les poils du dos à la cire tandis que son jeune sbire s'occupe du pauvre officier qui a mal fait son travail, ce à l'aide d'un gant doté de griffes d'acier. Ce même Durant (formidable Peter Boyle !) qui s'exerce à l'épée avec ses esclaves noirs, lesquels seront mis à mort s'ils venaient à le toucher aussi bien corporellement que dans sa gigantesque vanité.

 


Que dire du personnage de Cudjo, alias Geoffrey Holder ("Vivre et laisser mourir"), en guerrier des îles arborant, en guise de collier, une palette de couteaux, sinon que c'est une fois encore un rab de fun et de fantaisie déglinguée dans un film qui n'en manquait déjà pas. On signalera ailleurs une énigmatique Angelica Huston qui ne dit singulièrement aucun mot durant tout le film.

Quant à Geneviève Bujold, elle est parfaite de naturel tandis que l'immense Robert Shaw trouve là l'un des meilleurs rôles de sa carrière, tout en panache, force et décontraction.

Si l'on en revient au rythme trépidant, que l'on rajoute que la réalisation est sans failles, que la partition de John Addison touche au génie et que, tout compte fait, plus qu'à un voyage drôle et mouvementé, c'est carrément à un dépaysement total auquel on a droit, la conclusion qui s'impose est que "Swashbuckler" demeure sans doute le dernier digne héritier des plus grands hits de la cinématographie flibustière ; un classique instantané qui pâtit sans doute à l'époque de sortir en pleine vague de films catastrophe ("La tour infernale", "Tremblement de Terre", "Jaws"...). Quoiqu'il en soit et au minimum, il s'agit d'un spectacle hautement distrayant !

 

 

Mallox
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