Baby Sitter, La
Genre: Thriller
Année: 1975
Pays d'origine: France / Italie / Allemagne
Réalisateur: René Clément
Casting:
Maria Schneider, Sydne Rome, Vic Morrow, Robert Vaughn, Nadja Tiller, Renato Pozzetto, Carl Möhner...
 

A Rome, afin d'arrondir ses fins de mois, Michele (Maria Schneider), une jeune étudiante française en sculpture, fait du baby-sitting pour l'enfant d'un homme riche (Carl Möhner). Un jour, elle se retrouve via une machiavélique machination, impliquée dans le kidnapping du gamin et se retrouve prisonnière entre les mains d'Ann (Sydne Rome), une actrice italienne au chômage et de son complice Vic (Vic Morrow), un homme brutal et imprévisible...

 

 

La Baby Sitter est un drôle de thriller de fin de route signé René Clément. Un réalisateur étonnant, qu'on a (trop) tendance à rattacher au patrimoine du cinéma français avec ses films de début de carrière ("La Bataille du rail", l'outrageusement édulcoré "Le Père tranquille", Jeux interdits, "Gervaise") et qui a très souvent joué le jeu de la coproduction avec divers pays.
Finalement, dès "Quelle joie de vivre" en 1960, film au cynisme anarchisant imprévu au regard de ses œuvres antérieures, il commence à financer ses films avec l'Italie et poursuivra jusqu'à la fin de sa carrière ce procédé réciproque qui, du reste, permettra aux réalisateurs de financer leurs projets mais aussi aux acteurs de tourner.

Quand on regarde sa filmographie, il apparaît comme assez étonnant que ce réalisateur d'apparence classique ait donné autant au genre thriller et pas forcément n'importe quoi : son "Plein soleil" d'après Patricia Highsmith est trouble, fortement réussi et même assez audacieux, surtout par rapport à une nouvelle vague qui, elle aussi, a adapté les romans noirs américains à sa sauce (Truffaut : Tirez sur le pianiste / La sirène du Mississipi, etc...) et a toujours considéré Clément comme un nase alors qu'ils n'ont pas fait mieux de leur côté (ni plus original ou personnel). Sans compter, une fois encore, une thématique sur l'identité perdue, présente dès lors à chaque film : "Le Jour et l'Heure" est un thriller quasi paranoïaque sur fond d'occupation vraiment très bien huilé avec, outre Signoret, la présence étonnante de Stuart Whitman ainsi que celle traumatisante de Reggie Nalder. "Les Félins" est un beau thriller psychanalytique tendant vers le film noir avec encore une star internationale : Jane Fonda (laquelle y croise Marc Mazza) et une zik superbe de Lalo Schifrin.

 

 

Jusque là tout va bien, je passe du reste volontairement sur son "Paris brûle-t-il ?" qui m'a toujours emmerdé de par son côté commémoratif. On arrive alors à une fin de carrière pour le moins étonnante où Clément, un vrai auteur, lui, décline toujours ce même thème de l'identité perdue, soit en faisant intervenir des personnages sans nom (Bronson, "Le Passager de la pluie"), soit en mettant dans une situation en apparence incompréhensible son héros/héroïne : ainsi obtient-on un joli triptyque dans les années 70 avec "La Maison sous les arbres", peu convaincant mais toujours dans la même mouvance - enlèvement, passé d'espion industriel ressurgissant au présent - avec un casting lui aussi étonnant (Faye Dunaway et Frank Langella y croisent Maurice Ronet ainsi que Patrick Dewaere et Romain Bouteille) ; ensuite , c'est une superbe métaphore sur les repères enfantins à trouver et "La Course du lièvre à travers les champs" (Jean-Louis Trintignant, Aldo Ray, Tisa Farrow...), puis ce chant du cygne donc, quasiment oublié aujourd'hui et qui, s'il n'était pas réalisé par Clément, recueillerait nombre de suffrages de cinéphiles bisseux.

 

 

Coprod hardie, montage heurté, seconds couteaux en voie de perdition (convoqués pour le coup) pour un cinéma dit de genre, ambiance décalée (le doublage ou le français parlé par les étrangers aidant - on sait que Robert Ryan a eu beaucoup de mal sur le film d'avant ("La course du lièvre...") et présence de second rôles encore plus étonnants, notamment celle de Carl Möhner au sortir de "Gretchen sans uniforme" d'Erwin C. Dietrich.

Alors tout cela n'est pas toujours convaincant, encore que le film se défende pas mal du tout et que, même lorsqu'on est perdu - à l'instar de son héroïne Maria Schneider, carrément ignorante une bonne partie du film de la machination dont elle fait les frais - l'on ne s'ennuie pas devant (on reste intrigué, à l'affût de nouveaux événements) mais surtout, à enchainer les trois derniers thrillers à forte tendance atmosphérique d'un réalisateur plus compliqué et singulier qu'on eut pu le croire, on se retrouve devant une œuvre véritable, avec de vraies obsessions humaines, ainsi qu'une manière de faire de plus en plus dépouillée, laissant le spectateur parfois très seul avec les mystères de telles bobines et ses puzzles physiques et mentaux à reconstruire.
Quoi qu'il en soit, ce René Clément là, comme les deux autres films cités tournés avant et après, est à réévaluer et à remettre dans le contexte d'une démarche et d'une œuvre tout à fait cohérente. A bien y regarder encore, on s'aperçoit qu'il fut tout bêtement l'un des meilleurs représentants du film noir thrilleresque en France quinze ans durant... Etonnant.

 

 

En tout cas, dans cette Baby Sitter, si Robert Vaughn peine à convaincre, Vic Morrow y est menaçant à souhait et pour tout dire excellent.
Si l'on a du mal à croire également - notamment physiquement - au personnage du petit copain campé par le méconnu Renato Pozzetto ("Gran bollito", "Mélodie meurtrière") lequel prendra pourtant petit à petit une part de plus en plus importante à l'intrigue, il y a ailleurs, une vraie complaisance érotique de la part de Clément à filmer Sidne Rome dans son bain, qu'il soit fait d'eau claire ou maculé de sang...
La Baby Sitter n'est certes pas un grand film mais c'est une pellicule aux fortes allures de giallo-machination qu'on aurait tort de ne pas découvrir un jour, ne serait-ce que pour la remettre elle et son réalisateur à une autre place que celle très réductrice d'un technicien hyper doué.

 

Mallox

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