En Angleterre, dans les années 1920-1930 - Deux étudiants, Talbot et Duller, ont été invités par un ami fréquentant la même université, Mc Fayden, dans un vaste manoir retiré dont il a hérité. Cette propriété a la réputation d'être hantée par l'esprit d'une parente qui avait sombré dans la folie avant de mourir, une quarantaine d'années auparavant. Mc Fayden souhaite avoir l'avis de ses deux camarades, notamment Duller qui s'intéresse de près à l'occultisme. Les trois jeunes hommes se retrouvent ainsi, dans ces circonstances particulières. Dans les jours qui vont suivre, Duller ne va rien remarquer d'anormal, tandis que Talbot va être en proie à des visions qui vont le ramener dans le passé, du temps où le fantôme, Sophy Kwykwer, était encore en vie.
Amateurs de fantastique ébouriffant, passez votre chemin, car Ghost Story entre dans la catégorie des films d'atmosphère, où l'insolite et l'ambiance priment sur le sensationnel. L'oeuvre dont il est ici question n'a rien d'impressionnante, et c'est ailleurs qu'il faut chercher ses qualités.
Nous avons d'ailleurs deux histoires qui se télescopent, l'une se déroulant dans le temps présent, et qui ne concerne que trois personnages : Mc Fayden, Duller et Talbot ; l'autre dans le passé, à la fin du XIXème siècle, à l'époque victorienne, où l'on retrouve les personnages concernés par le drame ayant conduit à faire de Sophy (jouée par Marianne Faithfull) un fantôme. Dans ce récit à deux niveaux, Talbot va être convié malgré lui à faire le trait d'union, ceci par le biais d'une poupée trouvée dans la chambre qu'il occupe et qui va servir de passerelle entre les deux époques.
Il est d'ailleurs intéressant que le personnage choisi pour être le témoin du passé soit Talbot. Celui-ci, dont la tendance à beaucoup parler cache une faible personnalité, est la risée de ses deux comparses, qui ne manquent pas une occasion de se moquer de lui et de le traiter comme un domestique. Mc Fayden se comporte comme l'aristocrate décadent typique, et Duller est un petit bourgeois se donnant plus d'importance qu'il n'en a réellement. Finalement, des trois étudiants, seul Talbot va évoluer en vivant cette expérience avec le surnaturel, gagnant auprès du spectateur un capital sympathie qu'il n'avait pas de prime abord.
Né en 1948 en Angleterre, Stephen Weeks débuta sa carrière de cinéaste par le court-métrage. Il en réalisa sept entre 1965 et 1970. L'année suivante, les productions Amicus font appel à lui pour réaliser "Je suis un monstre" ("I, Monster"), une adaptation de L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde, écrit par Robert Louis Stevenson et publié en 1886.
Weeks, âgé de seulement vingt-trois ans, se voit ainsi attribué la lourde responsabilité de diriger Christopher Lee et Peter Cushing pour son premier long métrage. Une tâche dont il s'acquittera avec les honneurs bien que le film soit en partie décevant.
Par la suite, en dehors de Histoire de fantômes, il ne commettra que deux autres films, tous deux en rapport avec l'univers de la chevalerie et de la fantasy : "Gawain and the Green Knight" (1973) et "L'épée du vaillant" (1984).
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, Ghost Story a été tourné en Inde, la propriété servant de cadre principal à l'intrigue étant le palais de Bangalore. Pas mal de films appartenant au genre Bollywood ont d'ailleurs été filmés là bas, et plusieurs vedettes du monde du rock ou du heavy metal y ont aussi joué des concerts.
En ce qui concerne le casting, les fans de gothique anglo-saxon auront le plaisir de revoir Barbara Shelley dans ce qui fut son dernier rôle pour le cinéma. Elle incarne ici l'assistante du directeur d'un asile d'aliénés, mais son rôle n'est que secondaire. Tout comme celui joué par Marianne Faithfull, même si son personnage de Sophy est le noeud de l'intrigue. La chanteuse s'est fait connaître au cinéma grâce à son interprétation dans La Motocyclette de Jack Cardiff, où elle côtoyait Alain Delon.
Chez les hommes, le personnage clé de Talbot est interprété par Larry Dann, que l'on a pu voir dans "Whirlpool" de José Ramon Larraz et la série des "Carry On" de Gerald Thomas. Toutefois, s'il est un personnage qui éclipse tout le monde dans le film, c'est bien Mc Fayden. La raison tient à la personnalité atypique de son interprète, Murray Melvin. Après des débuts remarqués (et remarquables) en 1961 dans "Un goût de miel", Melvin capte immédiatement l'attention de par son look androgyne et son magnétisme animal. Son physique et son regard le conduisent à obtenir des rôles inoubliables dans Les Diables de Ken Russell, où il joue le fameux Mignon, dans "Lisztomania" du même Russell (il est Hector Berlioz) ou encore dans le "Barry Lindon" de Stanley Kubrick, en révérend. Malgré sa silhouette fragile en apparence, il accapare l'écran à lui tout seul. Sa présence justifie à elle seule la vision du film, autant que l'évasion et la révolte des fous dans l'asile durant la dernière partie du film, assez terrifiante. Et puis, n'oublions pas la poupée, un ustensile récurrent dans le cinéma d'horreur et toujours efficace, même si Stephen Weeks, dans Ghost Story, n'en fait pas un usage exclusivement maléfique.
Le talent de Ghost Story réside avant tout dans l'incontestable qualité de goût et de soin esthétique, et dans un sens visuel remarquable, concluait le journaliste Gilles Colpart dans son compte-rendu pour La Saison Cinématographique 77. Quelques lignes auparavant, il précisait, à propos du film, qu'il s'agissait en fait moins d'un vrai film fantastique, malgré ses apparences, que d'un conte nostalgique.
Une remarque à laquelle il convient effectivement d'adhérer.
Flint
En rapport avec le film :
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