Long Week End
Titre original: Long Weekend
Genre: Horreur , Drame , Agressions animales
Année: 1978
Pays d'origine: Australie
Réalisateur: Colin Eggleston
Casting:
John Hargreaves, Briony Behets, Mike McEwen, Roy Day, Michael Aitkens, Sue Kiss von Soly...
 

SOS couple en péril ! Peter et Marcia, forme un petit couple de yuppies australiens dont les sentiments se sont peu à peu émoussés au fil des ans, désagrégeant leur mariage. Il est temps de tenter de rallumer un peu de flamme. Rien de mieux dans ces cas là d'aller s'isoler dans un cadre paradisiaque afin de mieux se retrouver. Ils décident donc de partir camper près du littoral. Les désaccords sont déjà présents et à n'en pas douter, Marcia aurait préféré se prélasser dans un confortable hôtel avec tout le confort et les services à disposition. Peter malgré ses bonnes intentions n'a depuis longtemps plus conscience de son égoïsme et celui-ci s'enthousiasme à l'idée de jouer les aventuriers, préparant tout son attirail de chasse et de pêche. Malgré les réticences de Maria, le couple est tout de même bien décidé à tenter l'expérience, après tout, ils n'ont plus rien à perdre et ce sera peut-être là une possibilité de renaissance...

Malheureusement le voyage de nuit en voiture commence plutôt mal puisque Peter écrase un Kangourou. Tandis que Marcia dort, il s'arrête dans un petit relais dans lequel les gens n'y sont guère accueillants. Arrivés sur leur lieu de campement, Peter semble agir comme un irresponsable peu a même de respecter la nature. Pour un rien il sort arbalète ou fusil de chasse, tandis que leurs détritus s'amassent autour d'eux. A contrario les détails menaçants commencent à pointer du nez. Voici que les fourmis envahissent leur nourriture, que Peter semble poursuivi en pleine mer alors qu'il fait du surf (il s'avèrera qu'il s'agit d'une pauvre vache des mer qui y passera au fusil de chasse), qu'un aigle se met à l'attaquer... bref, tout prête à penser que la nature leur rend leur pareil et même un peu plus. Autant dire que cela ne va pas aider le couple à se reconstruire d'autant que nos tourtereaux se sentent épiés pour ne pas dire traqués. La paranoïa grandit...

 

 

Pour aller droit au but, il s'agit là d'un grand film. Une œuvre à la portée abyssale, partant pourtant d'un postulat qui aurait pu paraître désuet avec son message écolo à priori limité dans laquelle finalement dame nature, ici dotée de pouvoirs télépathiques, se venge de l'irrespect que lui fait subir l'être humain. Il fallait la conjugaison de plusieurs talents pour parvenir à un tel résultat, troublant, inquiétant et somme toute, implacable. D'abord au scénario, on retrouve l'excellent Everett De Roche qui signa la même année celui de "Patrick", et sera présent dans pas mal de réussites à venir, au sein du cinéma de genre au pays des kangourous wallabies. Ainsi on lui devra les scripts de Harlequin et sa variation sur Raspoutine, mais aussi ceux des estimables Link ou "Razorbak". Celui-ci parvient à livrer une parabole sur la mort d'un couple doublé d'un parallèle sur le respect de l'environnement ce qui ma foi peut paraître culotté et risqué. Un vrai casse-gueule à mettre en scène pour le cinéaste qui s'y attèle. Derrière la caméra, on retrouve donc Colin Eggleston dont la carrière cinématographique est assez peu prolifique autant qu'elle peut paraître singulière puisqu'on lui doit l'année d'avant "Fantasm 2" sous le pseudonyme de Eric Ram. Celui travailla d'avantage pour la télévision que pour le cinéma et on lui devra en 1986 un film de guerre fantastique intéressant mais un peu raté, le bien nommé "Dakota Harris". Jusque là rompu aux séries télévisées, celui-ci se vit un peu miraculeusement offrir sa chance par les producteurs qui semblent avoir eu pour le coup le nez fin. Sa mise en scène est un modèle de sécheresse et demeure en totale harmonie avec le script de De Roche. Difficile à la vision du film, de se dire qu'il aurait pu être tourné par quiconque d'autre tant la maîtrise est ici totale.

 

 

Eggleston, génie ? Sans doute pas. Disons qu'il réussit ici une gageure. Celle de nous passionner dans une intrigue très peu palpable (la vengeance de la nature) avec des personnages antipathiques et aussi peu attachants que possible. Les silences sont ici aussi importants que les dialogues et ceux-ci ont la couleur des non-dits remplis d'amertume. D'entrée nous les reconnaissons comme de petits yuppies qui assument à peine leur petite vie minable. Peter et Marcia préviennent maîtresse et amant, comme si chacun ne se faisait aucune illusion sur le sort de leur couple à l'issue de leur petit camping sauvage. Lorsqu'ils se parlent, difficile de se montrer aimable l'un envers l'autre et de la bouche de chacun, ne sort finalement le plus souvent que vacheries. Un plan génial et muet annonce les sentiments de Peter envers Marcia : Lorsque ce dernier s'apprête à rentrer dans leur maison, il la regarde avant et de l'extérieur, à travers la lunette du fusil qu'il vient juste de s'acheter. Tout est dit. Peter est un être futile et égoïste et vit dans un monde dans lequel l'entourage n'est que libre-service quand il n'est pas une proie. C'est un grand enfant exigeant qui n'a jamais appris à respecter l'autre et continue à jouer au fusil de bois. Quant à Marcia, elle n'est guère mieux puisque sa seule ambition semble être qu'on s'occupe d'elle et que Peter lui ramène luxe et confort, point barre. Difficile de faire moins attachants et plus égoïstes que nos deux protagonistes ! De toute façon, tout est bon pour se quereller, de la vitesse trop grande de Peter sur la route, en passant par la présence non prévue du chien, puis l'emplacement de la tente, bref autant dire qu'ils n'ont plus grand-chose à faire ensemble. A moins que la nature qui commence à s'emballer autour d'eux ne soit le test ultime pour les faire se rapprocher à nouveau...

 

 

Que nenni puisque ce qu'ils feront subir à ladite nature ne sera finalement que l'expression de leur frustration. Aigris, ils préfèrent détruire ce qu'ils ne possèdent pas ou ce qu'ils ne comprennent pas. Ainsi Peter mettra le feu à un bout de forêt en jetant son mégot comme dans un cendrier, et se foutra pas mal du kangourou qu'il écrasera. Finalement il s'inquiétera pour son bien, sa voiture. De même dès l'arrivée au camps, Marcia se mettra en tête de balancer de l'insecticide à tout va à cause de la présence de fourmis qui sont pourtant dans leur milieu naturel. A ce titre, le gros plan sur les fourmis en train de mourir et son traitement sonore est étonnant et peut faire penser que, déjà, la nature n'est pas contente du sort qu'on lui réserve.

Plus tard, c'est une vache des mers qui trinquera. Prise pour un requin, l'animal pourtant inoffensif sera abattu à coup de fusil et laissé au beau milieu de la plage comme de la merde. C'est simple, à l'instar de leur couple, autant Marcia que Peter détruisent ce qu'il ne comprennent pas ou plus, au lieu de faire une démarche de bon sens vers l'inconnu qui ne sera synonyme que du mot peur, renvoyant chacun à son ignorance en même temps que sa propre solitude. Marcia se repliera même dans le camping car dans lequel elle s'adonnera à quelques plaisirs solitaires, ce qui est un comble de paradoxe lorsque l'on sait les raisons de leur venue sur les lieux. Egoïsme et solitude sont les maîtres mots de cette sorte de chef-d'oeuvre, film à l'équilibre plutôt unique au sein du genre. Pessimisme également puisque que le prédateur autant que l'intrus reste l'être humain perdu dans ses tourments futiles et labyrinthiques. Et puis tuer de la sorte un animal en voie de disparition reviendra ici finalement à achever un couple en difficulté...

 

 

Tout en restant une âpre étude de caractère, Everett de Roche et Colin Eggleston parviennent à livrer un vrai film de genre en même temps qu'une réflexion sur le genre. Soit, la paranoïa écologique n'est pas nouvelle dans les années 70 et a déjà été déclinée dans les décennies précédentes, notamment les années 50 et 60, mais elle est très habilement mise au service d'une parabole sur l'homme et son rapport à la nature (et à autrui plus généralement), mais sert ici également d'hommage à quelques classiques bien connus, avec lesquels ceux-ci jouent ici allègrement. On pensera d'ailleurs à plusieurs films. "Frogs" de George McCowan ou encore Day of the Animals de William Girdler pour leurs discours assez proches et leur engagement à la cause écologiste, tandis que d'autres classiques seront aussi convoqués (et même malmenés), comme Les dents de la mer avec l'assassinat de la vache des mer comme élimination de l'inconnu, représentation de la peur, ce avec quoi jouait Spielberg, mais aussi Les oiseaux d'Alfred Hitchcock le temps d'un plan où un aigle royal se met à charger littéralement Peter sans raison apparente...

 

 

Bon inutile de continuer plus longuement et rajoutons simplement que la direction d'acteurs est absolument remarquable. John Hargreaves et Briony Behets sont très crédibles et leur jeu minéral contribue fortement au climat oppressant. Ailleurs signalons également que la photographie de Vincent Monton ("Fanstasm 1 & 2"/ "Day After Halloween") est d'une beauté sauvage inouïe et donne un cachet magnifique au film. Quant à la partition sublime de Michael Carlos, elle achève de faire de Long Week End un grand film trouble, dérangeant, engagé et quasi nihiliste.

 

Mallox
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