Machine à explorer le Temps, La
Titre original: The Time machine
Genre: Voyages dans le temps , Classiques , Science-fiction
Année: 1959
Pays d'origine: Angleterre
Editeur: Gallimard
Collection: Folio SF
Auteur: Herbert George Wells
 

L'espace qui nous entoure est constitué de trois dimensions : la hauteur, la largeur et la profondeur. Mais il nous faut en rajouter une autre : la dimension temps. Si nous pouvons nous mouvoir dans l'espace, il nous est pour l'instant impossible de nous mouvoir dans le temps. Ce temps, nous le subissons. Mais qui n'a jamais rêvé de pouvoir faire ce voyage à travers l'espace temporel ? Vous en avez rêvé, Wells l'a fait ! La machine à explorer le temps est un véritable chef-d'oeuvre car si elle part d'un postulat science-fictif, bientôt l'histoire vire au cauchemar et tend même vers le fantastique, avec une portée philosophique et politique. Wells écrit là un roman superbement palpitant et génialement intelligent.
Un homme donc, qui n'a pas d'autre nom que le voyageur, l'explorateur du temps, réalise une machine qui le propulse dans le futur. Au début tout est beau, tout est mignon. Les hommes sont comme des enfants, le monde est vert, des temples, de grandes bâtisses, un sphinx fabuleux habitent ce monde du futur. Pas de chaos post apocalyptique, pas de guerre des mondes ou je ne sais quoi d'autre. Mais ce calme paisible est peut-être tout aussi atroce que la plupart des catastrophes. L'homme qui n'a plus peur, l'homme qui ne ressent plus le danger, ne ressent pas non plus le besoin de se protéger, d'évoluer, ni d'ailleurs de se reproduire (la reproduction étant une réaction naturelle basée sur la volonté de maintenir son espèce dans le temps), l'être humain devient asexué, à la rigueur même il n'a plus besoin de réfléchir, il suffit qu'il se laisse vivre. Tout le génie de Wells est là . Il n'y a pas besoin d'une grande explosion post-nucléaire pour décrire le danger, le danger est là en l'homme lui-même.

L'explorateur du temps le comprend mais il va faire une découverte encore plus sombre. Quand il s'aperçoit que sa machine a disparu, il commence alors l'exploration de cavités souterraines. Et là , vivent dans la nuit les plus terribles des hommes, ou plutôt les Morlocks, créatures atroces car sans yeux, à la peau blanche puisque ne vivant que dans des grottes et cannibales qui plus est. Si vous avez vu The Descent, c'est exactement les mêmes créatures que l'on retrouve ici, et on ressent cette même claustrophobie en même temps que le narrateur progresse.
Mais le pire est encore à venir car les Morlocks sont comme maintenus en esclavage par ceux du haut. Ils travaillent laborieusement dans des conditions atroces pendant que ceux du haut se laissent aller. Voilà Wells qui se lance alors avec brio dans une critique de la société industrielle et capitaliste, nous montrant combien l'homme est un loup pour l'homme, combien la nature humaine peut être mauvaise et que nous sommes notre pire ennemi. Le vrai progrès bénéfique à l'humanité ne devrait pas être le travail ou bien une machine à voyager dans le temps, mais bien plutôt une machine qui permettrait à l'homme d'être un peu plus juste, un peu moins homme, quoi...
Le discours de Wells est à la fois humaniste et cruel. Mais ne croyez pas qu'il ne s'agit que d'une somme politico-philosophique. La machine à explorer le temps se lit vite et le récit est palpitant, avec des aventures, des rebondissements, un brin d'horreur, des descriptions sublimes et un suspens intéressant.
Wells est un véritable génie, un écrivain qui maîtrise tous les outils et les ficelles de son métier pour nous faire vibrer, pleurer et surtout réfléchir. C'est l'art, tout l'art de cette science-fiction que de nous amener à voir des idées importantes et graves, en ne prenant jamais un ton doctoral, pédant ou ennuyeux...
Si dans La Guerre des mondes la menace était à peine visible, comme semblant venir du haut, du grand ailleurs, elle est ici clairement définie : l'homme et son système de pensée capitaliste qui divise les hommes, les déchire, qui tantôt les rend bêtes et faignants et qui tantôt les rend esclaves et misérables. Non, notre futur n'est pas beau et enfin de compte seule la nature s'en sort bien. C'était déjà elle qui nous sauvait de la guerre des mondes et ici c'est elle la seule qui reste inchangée, marquant notre temps biologique (superbe description de la course du soleil !), nous permettant de trouver un refuge et qui donc peut-être nous sauvera à nouveau. La seule chose dont je suis certain c'est que Wells est un génie, un grand créateur et un grand penseur. Un classique à lire à tout prix, surtout en ce moment si vous voyez ce que je veux dire...

Note : 10/10

Le Cimmerien

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