Daredevils of the red Circle
Genre: Action , Aventures , Serial
Année: 1939
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: William Witney et John English
Casting:
Charles Quigley, Herman Brix, David Sharpe, Charles Middleton, Carole Landis, Miles Mander...
Aka: Les trois diables rouges
 

Pour critiquer ce serial, et pour garder l'esprit de ce genre en soi, j'inaugure la serial critique : non pas une critique en série mais bien une critique étalée dans le temps, au rythme des visions des épisodes dudit serial, qui en compte 12. Et comme il vaut toujours mieux commencer par le commencement, je me pencherai d'abord sur Un complot monstrueux et sur L'ami mystérieux, les 2 premiers volets de cette fenêtre sur l'action et l'aventure...


Les daredevils du titre original sont trois artistes de cirque au maillot blanc marqué d'un cercle rouge. Ces trois "diables" sont d'ailleurs 4 au tout début, le quatrième membre de leur bande étant un enfant, frère de l'un d'entre eux. Pour ces cascadeurs intrépides, se libérer d'une camisole tandis que l'on est tracté par les pieds est un jeu d'enfant, plonger du haut d'une grande échelle dans une piscine minuscule un tour presque facile, tenir une corde avec les dents tandis qu'y glisse l'un de ses partenaires un exploit routinier, bref, chacun excelle dans son genre et rien ne les prédestinait à quitter cette voie toute tracée des épopées circassiennes pour la lutte contre le crime mais le mal incarné par un homme, Harry Crowel, alias 39013 (son numéro de prisonnier sous lequel il se fait couramment appeler), en a décidé autrement...

 

Les gentils sont des gentils (et ça se voit) et le méchant est très méchant (et ça se voit aussi)

 

39013 est mauvais, très mauvais. C'est le méchant du serial et ça se voit rien qu'à sa tête, une vraie vilaine bobine de gars cruel et fourbe dont le crime est la raison d'être et la réalisation des pires méfaits son plus grand plaisir. Cet affreux jojo donc, évadé de prison, ne trouve rien de mieux à faire pour se divertir qu'à s'attaquer à Granville (on dirait le nom d'un patelin normand mais c'est bien aux USA), une commune qui est presque une propriété privée tout à la gloire de son possesseur puisqu'elle porte le nom d'Horace Granville et que tout se rapporte à lui. Et notamment le parc d'attraction "Granville amusement park" où se produisent, et ça tombe bien, les trois diables rouges et leur petit acolyte ! (et je parle là de l'enfant, et non du chien qui leur colle au train, en fidèle compagnon digne de son espèce).
39013 a décidé de se venger de Granville en s'attaquant à Granville et même, on le saura très rapidement, en prenant l'apparence de Granville ! (le bonhomme, pas la ville, c'eût été plus difficile quand même...) Mauvais comme la teigne, il fait péter pas mal de trucs et décide tout à trac de foutre le feu au parc d'attraction en se servant de la piscine du diable plongeur dont le contenu aqueux aura été préalablement remplacé par du carburant ! Quel salaud quand même !

 

La belle et innocente jeune femme en plein effroi devant les flammes (et, subtilement, devant une affiche du Lone Ranger, un autre sérial du duo Witney English!)

 

Noirceur d'âme et noirceur de ce début de serial puisque la seule victime en sera le petit diable au cercle rouge, mortelle mésaventure qui conduira son frère et ses compagnons à se lancer à la poursuite du méchant de service, en se mettant en relation avec Horace Granville et sa petite fille qui, ça tombe bien, était la jeune fille qu'ils venaient de sauver !

C'est ainsi que nos trois amis car, à ce stade de leurs aventures, ils ont conquis nos coeurs de spectateurs compatissants, se lancent à corps perdus dans des aventures aussi rocambolesques qu'incroyables où les coups de poings et de pieds pleuvent comme hallebardes en novembre et les rebondissements rebondissent comme gymnastes sur trampolines...
Ainsi de ce tunnel construit sous la mer que Granville compte inaugurer en y faisant passer sa propre petite fille (sauf que Granville n'est pas Granville, si vous avez suivi, vous savez que c'est 39013, et que son plan est de se débarrasser de la jeune fille en immergeant le tunnel !) Et j'aime autant vous dire que si les trois diables n'avaient pas été là, la petite était bonne pour y passer !

 

 

Trépidant, palpitant (on n'a beau voir les grosses ficelles et les facilités scénaristiques, le rythme est si rapide qu'il emporte le spectateur) , ces deux premiers épisodes tiennent toutes leurs promesses et le plongeon provoqué par un sbire de 39013 d'un des trois diables dans une cuve enflammée ne laisse pas de m'inquiéter pour la suite des événements ! ! ! (quoique je me rassure en me disant que diable et fournaise vont assez bien ensemble et que ce cliffhanger saura être retourné comme une crêpe pour que ce héros valeureux s'en sorte sans trop de dommages et sans démériter de son statut de premier plan !)

 

La suite au(x) prochain(s) épisode(s)...

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La dernière fois, je vous narrais avec force enthousiasme les valeureux efforts de nos trois courageux diables rouges pour vaincre le mal personnifié et je m'inquiétais (ô, très moyennement, il faut bien l'avouer) du sort de l'un d'entre eux, tombé dans une cuve enflammée. Eh bien, la surprise aurait été qu'il ne s'en sorte pas mais... il n'y a pas eu de surprise. Il n'y en a que peu, finalement, dans les serials.
Je ne dévoilerai cependant pas comment il s'est tiré de ce mauvais pas car l'un des plaisirs de ce genre vient justement de ce contraste entre une fin d'épisode en pleine montée de tension et un début d'épisode suivant dégonflant la baudruche pour repartir dans un nouveau développement vers des cimes supposées d'intensité dramatique.

 

 

Dans cet épisode titré Le bourreau, comme dans le suivant, Sabotage, les recettes du serial sont savamment respectées : titres évocateurs, méchant impitoyable, aux projets diaboliques et aux visées mortelles envers des héros toujours aussi purs et revêtus de leur immaculée vertu en étendard.
Alors d'où vient ce léger soupçon d'ennui, à la vue de ces deux épisodes, ce sentiment de désintérêt naissant, cette pointe de désillusion ??? Peut-être de ce que les recettes, pour être bel et bien éprouvées, manquent un peu d'épices, de cet exotisme de pacotille, par exemple, qui faisait tout le charme d'un "Jungle Girl", peut-être aussi parce que les héros, toujours costumés et encravatés et marchant d'un pas décidé vers les périls annoncés résonnent un peu trop creux, archétypes presque mécaniques dont je serai bien en peine, après 4 épisodes, de donner les noms, tant ils sont impersonnels et presque inexistants.

 

 

Peut-être surtout parce que le salaud du serial, le fameux 39013, manque lui-même de personnalité et que ses plans ourdis dans l'ombre d'Horace Granville, dont il a pris la place et l'apparence, sont archi-classiques et manquent singulièrement de la perversité d'un Fu-Manchu, par exemple.
Pour le spectateur assistant en 1939 ou 1940 à ce Daredevils of the Red Circle, l'impression devait être plus ou moins la même qu'aujourd'hui, le recul en moins (encore que, les serials étant très nombreux dans ces années-là, l'amateur un peu critique y portait peut-être un regard d'autant plus aiguisé) : le rythme est bien présent, les personnages sont presque toujours en mouvement et, lorsqu'ils s'arrêtent, c'est parce qu'ils sont tombés sur un cadavre, ou un indice qui tombe bien ou parce qu'on est au seuil d'une nouvelle bagarre ! La musique est omniprésente : il faut souligner, pour le spectateur distrait, chaque moment, l'inciter fortement, en quelque sorte, à vivre l'émotion telle qu'elle était prévue, l'immerger dans l'action. Les rebondissements sont constants : lutte à mort contre des gros bras, gaz asphyxiants, explosions d'usine chimique...
Oui, mais...

 

Le gars qui bloque une porte devant une fenêtre ouverte...

 

On reste un peu sur sa faim...
Tout en ayant envie de voir l'épisode suivant, le très prometteur Le rayon de la mort ! ! ! Et c'est bien là toute la réussite de Witney et English et la preuve de leur savoir-faire...

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Avec Le rayon de la mort et 30 secondes à vivre, titres prometteurs des volets 5 et 6 du serial, l'impression se confirme d'une machine qui roule à vide en éjectant peu à peu ses spectateurs désabusés. Je m'explique : le caractère palpitant des tribulations de ces 3 cornichons encostumés aux prises avec un triste sire grimé s'amenuisant au fur et à mesure que le temps passe, on réalise de plus en plus la vacuité de l'ensemble et ses immenses défauts (qui, pour être totalement serialesques, n'en sont pas moins pénibles).
Ainsi de ces trois daredevils qui perdent de leur superbe au fil des épisodes tant ils sont niais et monolithiques. Ils se jettent dans tous les pièges qu'on leur tend, ils réagissent au quart de tour sans jamais réfléchir une seconde, ils marchent d'un seul homme en regardant toujours droit devant eux, au point d'être capables de passer devant un ennemi à peine caché... Le comble du comble est atteint lorsqu'ils se retrouvent enfermés dans une pièce avec pour seule sortie possible une ouverture à environ 3 mètres du sol : le premier fait la courte échelle au second qui grimpe, puis le premier fait la courte échelle au troisième qui grimpe à son tour. Enfin, le premier grimpe sur des caisses qui étaient là depuis le début pour rejoindre les autres... Il n'avait donc aucunement besoin de faire la courte échelle aux autres et cette scène d'une stupidité sans nom agit comme un révélateur sur le quidam devant son écran : mais qu'ils sont cons !

 

 

Et cela ne va pas en s'améliorant puisque cette crétinerie commune à tous les trois s'affiche même à haute voix lorsque l'un d'eux déclare solennellement, devant la voiture tombée d'une falaise et totalement embrasée de leurs ennemis : "On ne peut rien faire pour eux"... Effectivement, triple buse, et si c'est pour sortir des banalités pareilles, tais ta gueule !
En 6 épisodes, les Daredevils of the Red Circle ont donc réussi l'exploit de passer du statut de héros sympathiques à celui de gros benêts, au point de perdre au passage leurs aficionados... La triste scène où le domestique noir de la maison essaie de récupérer son balai que lui dispute le fidèle Tuffie (le chien), provoquant leur hilarité méprisante, renforce encore ce divorce. Et quand le serviteur de ces nobles messieurs tombe à la renverse et qu'ils rentrent tous dans la maison en rigolant et en lui marchant presque dessus, sans même penser à lui tendre une main secourable, ils apparaissent totalement démasqués : ces coquilles vides ne sont capables d'aucune émotion un tant soi peu développée et ne sont, finalement, que des monstres froids et déshumanisés... D'ailleurs, le petit frère mort du premier épisode n'est plus jamais évoqué et leur seule motivation semble bien être de courir après 39013 tel un hamster dans la roue de sa cage...

 

 

39013, parlons-en de celui-là : alternant son propre visage puis celui de Granville en se grimant devant un miroir, tel Fantomas, il est le génial cerveau d'une organisation dédiée au crime. Enfin, il se croit probablement génial mais en fait, il ne l'est pas, mais alors pas du tout ! Tous ses plans foireux foirent, toutes ses machinations machiavéliques tournent en eau de boudin, tous ses projets criminels se barrent en couilles... Mis à mal par les trois abrutis au cercle rouge, 39013 se révèle donc être encore plus con qu'eux ! Car, en effet, comment expliquer qu'un homme qui a passé 15 ans derrière les barreaux mais qui bénéficie d'un incroyable réseau de complices dans des lieux aussi stratégiques que la maison de Granville, les usines de Granville, le laboratoire d'électricité thérapeutique (de Granville? on ne sait pas), bref, partout et en tous temps, ne soit pas fichu de dégommer 3 pauvres acrobates? Comment expliquer qu'un type réputé être un génie du crime s'échine à ourdir des plans d'une complication extrême pour occire son prochain là où une balle bien placée pourrait largement suffire ? Comment comprendre qu'une telle aberration scénaristique parvienne à s'échapper du papier pour prendre vie sur une pellicule???

 

 

D'un côté, 3 ahuris, de l'autre, un idiot congénital. Et on voudrait que cela nous passionne !? ! Mais de qui vous moquez-vous, messieurs Witney et English ? De qui ? Ne comptez pas sur moi pour regarder les prochains épisodes en tout cas, terminé, basta, marre de marre ! C'est quoi leur titre d'ailleurs ? La mine engloutie et S.O.S. ? Bon, allez, je vais faire un dernier effort pour ces deux-là mais ce coup-ci, ne me décevez pas ! ! !
Eh oui, finalement, pour le serial, c'est comme pour la cigarette, c'est toujours : demain, j'arrête !

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Bon, ben finalement, plutôt que de continuer à boire la coupe jusqu'à la lie mais goutte après goutte, je l'ai fait façon cul-sec et d'un trait jusqu'à l'hallali...
Pas grand-chose à rajouter, hélas, à ce que j'ai déjà écrit : c'est du cousu de fil blanc, du répétitif et du sans grande surprise... Les trois diables rouges sont décidément plus musclés des biceps que du bulbe, légèrement ramollo et 39013 continue à perdre son temps et ses hommes dans des plans tordus mais franchement tout pourris...

La présence récurrente d'un mystérieux ami délivrant de providentiels messages cerclés de rouges ne trouve qu'une explication navrante et lorsqu'on apprend qui était ce personnage évoluant dans l'ombre, on n'est pas surpris mais encore moins convaincu. L'avant-dernier épisode est l'occasion de recaser des séquences chocs des deux premiers (ce sera toujours ça de moins à tourner) et l'ultime volet offre, comme souvent dans le serial, une fin bien conne à son méchant, victime de sa propre ignominie.
Bref, Daredevils of the Red Circle bénéficie d'une bonne réputation parmi les très nombreux serials produits dans cette époque mais elle est très surfaite et l'ensemble est tout à fait dispensable...

 

 

Bigbonn

 

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