Herbe rouge, L' (TV)
Genre: Expérimental , Science fiction , Comédie , Drame
Année: 1985
Pays d'origine: France / Italie / Portugal
Réalisateur: Pierre Kast
Casting:
Jean Sorel, Jean-Pierre Léaud, Mijou Kovacs, Yves Robert, Philippe Clay, Jacques Perrin, Jean-Claude Brialy, Alexandra Stewart, Françoise Arnoul...
 

Dans un univers de fiction où l'herbe est rouge, Wolf, ingénieur d'une trentaine d'années et inventeur d'une curieuse machine à voyager dans le futur, salue son technicien Lazuli. Il semble que tout est prêt à fonctionner et Lazuli va chercher Lil, la femme de Wolf, et Folavril, son amie, pour leur montrer l'engin puis leur annoncer que le départ est prévu au surlendemain.
Lil voudrait accompagner son ami durant le voyage, mais Wolf refuse. Pendant que Lazuli embrasse Folavril, apparaît puis s'évanouit la silhouette d'un homme tout de noir vêtu que seul Lazuli aperçoit. Avant le grand départ, une fête est organisée...

 

 

Cette adaptation du roman éponyme de Boris Vian n'a pas à rougir d'autres plus récentes ou plus anciennes : "L'Ecume des jours", version Gondry, était un ratage aseptisé, un petit peu l'équivalent de ce qu'avait pu faire Cronenberg avec William S. Burroughs et son "Festin nu", à savoir une oeuvre illustrative, techniquement très correcte mais qui jamais ne retrouvait l'esprit de sa source romanesque.
"L'Ecume des jours", version Charles Belmont, en 1968, n'était guère meilleure avec une direction d'acteurs par trop académique et une adaptation sage et plan-plan.
Quant au fameux "J'irai cracher sur vos tombes" de Michel Gast, il s'agissait d'un ratage "Marquand" si j'ose dire... On y trouvait déjà, du reste, Jean Sorel ici-présent. "Les mauvaises langues" (dont je fais indéniablement partie) ont toujours pensé que l'illustration du roman avait tué l'écrivain qui rendit donc son dernier soupir (au sens propre comme au figuré) en début de projection, dès la première bobine, tant elle était médiocre...

 

 

Finalement, hormis le petit court ("Saint-Tropez, devoir de vacances"), aujourd'hui presque introuvable, signé Paul Paviot, le réalisateur du formidable Torticola contre Frankensberg avec Michel Piccoli en Frankenstein, ses scénarios, comme l'illustration du personnage à l'écran furent des ratés successifs. Il n'y a qu'à se souvenir de Philippe Katerine dans "Gainsbourg, vie héroïque" ou de Laurent Lucas dans le pourtant honorable "V comme Vian" de Philippe Le Guay. Quant à Vian acteur, soit, mais bon, on peut, en étant méchant, dire que ses apparitions étaient aussi parfois le signe d'un communautarisme BCBG from Saint-Germain-des-Prés (cf."Les Liaisons dangereuses" qui, déjà dix ans après, ressemblait à un film d'épate-bourgeois tourné par un frais défroqué.)

A l'arrivée, outre son ami Paviot, c'est l'atypique Pierre Kast qui l'a le mieux utilisé, ce, avec une véritable passion, et pour l'homme, et pour son œuvre, une passion qui transpire à l'écran et qu'on a du mal à retrouver chez les autres cinéastes. Réalisateur moyennement inspiré, souvent derrière la caméra de films intéressants mais un brin plats et opaques ("Les soleils de l'île de Pâques"), comme "Le Bel Âge" où apparaissait Vian, une fois n'est pas coutume, dans un rôle conséquent. Au préalable, il y eut plusieurs associations entre ces deux amis, de bobines comme de vie : "Amour de poche" avec Jean Marais, franchement suranné aujourd'hui mais ayant l'avantage de montrer à l'écran nombre de réalisateurs de l'époque "pré-nouvelle vague" comme Alexandre Astruc ("Ulysse ou les mauvaises rencontres", un court avec Vian également), Jean-Pierre Melville, Victor Vicas, ou plus classiques : Christian-Jaque, Alex Joffé ou encore l'horrible Léo Joannon, un vrai "défroqué" quant à lui !

 

 

Au même rayon, en plus de Jean Sorel déjà utilisé, on y trouvait déjà Jean-Claude Brialy qui, presque trente ans après, revenait camper un petit rôle, à la fois par amitié pour Kast et par hommage pour Vian.

Le résultat ? Comme sous-entendu au début, il est loin d'être un naufrage même si Pierre Kast eut la mauvaise idée de décéder juste après le dernier tour de manivelle, achevant de faire de Vian un être décidément maudit ou porteur de malédiction. Jean Sorel y est sobre, décalé, épatant, jouant le jeu d'une science-fiction intimiste, surréaliste et dada, avec talent et même brio. Les autres acteurs sont au diapason, Brialy en tête, idem pour Philippe Clay ou Yves Robert. La mise en scène est un peu plate mais après tout, c'est peut-être le prix à payer pour illustrer un récit absurde, tout fait de dos de chameau.

 

 

Reste qu'un acteur vient quasiment gâcher l'entreprise... je dis quasiment car il évolue ici, a contrario des autres, dans un registre burlesque, jouant comme dans un slapstick muet, ce qui aurait pu le faire... Le problème c'est que Jean-Pierre Léaud, sorte de trublion malgré lui, y est affublé de dialogues incessants... Imaginez l'expressivité de Buster Keaton ou de Chaplin rallongées de charabias, diatribes (démonstratives, là où le livre suggérait) et autres considérations philosophiques d'arrière-boutique, finissant d'en faire un personnage imbuvable à l'écran. C'est par ailleurs dommage car, à bien y regarder, c'est peut-être celui qui canalise et concentre à lui seul tout l'esprit de Vian. Probablement trop...

Enfin, L'herbe rouge, sorte de parabole sur la fuite en avant, fut tournée pour la télévision et diffusée sur Antenne 2 en septembre 1985 (on rajoutera à ce propos, et pour info, qu'il s'agit d'une co-production entre Antenne 2, Cinecittà et la RTP (Radiotelevisão Portuguesa), ce, après être passée au Festival de Cannes la même année dans la section "Un certain regard", en hommage au metteur en scène qui venait de mourir. Depuis, et c'est tout de même un peu dommage (notamment à titre de comparaisons avec d'autres adaptations de l'homme aux 100 pseudonymes), on ne l'a plus trop revu.
Qui sait, peut-être un jour chez Ina éditions...

 

 

Mallox

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