Maison des phantasmes, La
Titre original: Clarisse
Genre: Erotique , Porno , Drame
Année: 1979
Pays d'origine: France
Réalisateur: Claude Bernard-Aubert
Casting:
Brigitte Lahaie, Richard Lemieuvre, Morgane, Guy Royer, Elisabeth Buré, Dominique Aveline...
Aka: Parties très spéciales / Soumission
 

Cela fait trois ans que Clarisse et Mathieu se sont retirés du monde, dans leur château isolé en rase campagne. Pour ce couple trentenaire, issu de la haute bourgeoisie, tout a basculé le jour où Clarisse perdit le contrôle de la voiture qu'elle conduisait. Suite à cet accident, Mathieu est devenu impuissant, et aucun médecin n'a été en mesure de le guérir.
Taciturne, blessé dans son orgueil de mâle, Mathieu passe désormais son temps entre son piano Steinway et les jeux érotico-pervers qu'il soumet à sa femme. Celle-ci, se sentant coupable, se plie à tous ses désirs, quels qu'ils soient. Elle doit par exemple remettre une lettre à un homme ayant loué une chambre d'hôtel en ville, et attendre une réponse de l'inconnu. Elle s'y rend. Dans ce courrier, Mathieu offre sa femme à cet homme pendant deux heures. Clarisse devra obtempérer, obéir et jouer son rôle d'esclave sexuelle comme elle a dû le faire de nombreuses fois depuis que Mathieu n'est plus en mesure d'assumer son devoir conjugal.
Mathieu espère, comme un psychiatre en avait émis l'hypothèse, qu'un choc psychologique saura lui rendre sa virilité, tout comme un choc du même genre la lui ôta à cause de l'accident.

 

 

Clarisse a été réalisé en 1979 par Claude Bernard-Aubert (sous son pseudonyme Burd Tranbaree). Nous ne reviendrons pas sur la carrière de ce metteur en scène atypique, puisque nous en avions parlé à l'occasion de la chronique de La Fessée. Lors de sa période marquée sous le sceau du X, le cinéaste fit régulièrement appel à l'actrice qui était alors la meilleure hardeuse du moment, je veux parler évidemment de Brigitte Lahaie. Si cette dernière a débuté dans le hard en 1977, on pourrait croire que deux ans plus tard, à l'époque de Clarisse, elle n'était pas encore une actrice totalement confirmée. Mais c'est tout le contraire. Durant ce laps de temps, Brigitte Lahaie changea de couleur de cheveux, mais surtout fit des progrès considérables dans la qualité de son jeu. En l'espace d'à peine deux ans, il y eut une cinquantaine de films, et beaucoup d'expérience à la clé. Un peu coincée à ses débuts, ou tout du moins timorée, Brigitte Lahaie a très vite gagné en aisance et en maturité, tournant dans de nombreuses oeuvres de qualité, notamment celles de Bernard-Aubert. On peut citer, parmi les films du réalisateur dans lesquels elle joue, "La rabatteuse", "Fièvres nocturnes", "Perversion d'une jeune mariée" ou encore "Auto-stoppeuses en chaleur".

 

 

L'autre vedette de "Clarisse", c'est évidemment Richard Lemieuvre, alias Richard Allan, surnommé "Queue de béton" pour des raisons que chacun d'entre vous aura deviné. Il fait partie des "Mousquetaires du hard", au même titre que ses camarades Dominique Aveline et Alban Ceray, qui firent preuve, outre leurs talents d'acteur et de hardeur, d'une longévité exceptionnelle dans le cinéma X hexagonal.
Dans Clarisse (ou La maison des phantasmes pour sa version soft), Claude Bernard-Aubert a fait de Richard Lemieuvre un impuissant. Et c'est peu dire que pour "Queue de béton", devenir subitement "Mou du zgeg" ne peut être qu'une expérience traumatisante. D'autant plus qu'il incarne un pianiste jouant sur un piano à queue ! Alors, comme si la vie l'avait quitté le jour où son vit l'eut abandonné, Mathieu s'est consolé sur son Steinway, jouant inlassablement le même air, comme si le temps avait été suspendu. Et puisqu'on en parle, cet air de piano profondément mélancolique revenant comme un leitmotiv rappelle certaines partitions de Daniel White dans des films de Jesus Franco (notamment "Tendre et perverse Emanuelle" où Norma Kastel interprète toujours le même air teinté de nostalgie). C'est encore une fois Alain Goraguer, se cachant sous le pseudonyme de Paul Vernon, qui est responsable de la partition musicale de La maison des phantasmes. Comme dans La Fessée du même Claude Bernard-Aubert, et comme dans bien d'autres films pornos durant les années '70. Le compositeur de "La planète sauvage" n'est d'ailleurs pas la seule personnalité du monde de la musique à avoir fricoté avec le hard, on pourrait aussi citer Laurent Voulzy, par exemple, qui composa en quatre ou cinq occasions pour des films de Pierre Unia, entre autres "Candice Candy" et "L'enlèvement des Sabines".

 

 

Pour en revenir à la B.O. d'Alain Goraguer à propos de Clarisse, on a donc ce thème récurrent au piano mais également deux morceaux de rock progressif planant de très bonne facture, ajoutant une touche onirique à un film qui ne manque pas de scènes à la limite du surréalisme. Cela concerne essentiellement les passages où Clarisse est poursuivie par trois hommes la harcelant (dans la nature, près d'un bord de Seine, sous un pont de chemin de fer ou dans une maison abandonnée), qui finissent invariablement par la rattraper avant de lui faire subir les derniers outrages. Ce trio (composé de Dominique Aveline, Piotr Stanislas et John Oury) a la faculté de disparaître comme par enchantement puis réapparaître avec une tenue et un couvre-chef différents. Les épreuves imposées par Mathieu à son épouse possèdent ainsi un côté irréel ayant pour effet d'atténuer quelque peu la cruauté du pianiste envers Clarisse. Bernard-Aubert laisse l'imaginaire rentrer dans la monotonie du quotidien, une échappatoire autant pour Mathieu traumatisé par son infirmité que pour Clarisse hantée par son sentiment de culpabilité.

Une impression de langueur plane sur La maison des phantasmes, en définitive. Mais cette douce mélancolie, accentuée par l'amertume des deux personnages principaux, ne signifie pas que le film est ennuyeux pour autant. Certes, il risque de décevoir ceux qui attendaient une oeuvre intensément hard puisque Clarisse demeure soft dans l'ensemble, même dans sa version pornographique. Le réalisateur a surtout offert de très beaux rôles à ses deux vedettes, Brigitte Lahaie et Richard Lemieuvre excellant chacun dans leurs personnages respectifs. Et si la mélancolie risque de gagner à son tour le spectateur, c'est avant tout parce que celui-ci se dira que dans les années '70, le cinéma érotique avait une véritable identité.

 

 

Flint


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