Public Cemetery Under the Moon, The
Titre original: Wolhaui gongdongmyoji / 월하의 공동묘지
Genre: Horreur , Thriller , Epouvante , Fantastique , Gothique , Esprits
Année: 1967
Pays d'origine: Corée du sud
Réalisateur: Cheol-hwi Kwon
Casting:
Mi-ae Kang, No-shik Park, Geum-bong Do, Hae Hwang, Ae-ran Jeong, Chang-kang Heo...
 

- Hier : De sous terre, les révélations et prises de conscience vont parfois bon train. C'est ainsi que Wol-Ha, une ancienne kisaeng poussée au suicide quelques mois avant par sa belle-mère et sa servante, sort de sa tombe dans le but de se venger, mais aussi de prévenir d'un nouveau meurtre : celui de Yeong-jin, son propre fils, ainsi peut-être, que celui de son ancien mari.

- Avant hier : Wol-Ha (Mi-ae Kang) est contrainte à une vie de courtisane quand Choon-shik, son frère (Hae Hwang), et Kim Han-su, son fiancé (No-shik Park) sont arrêtés pour résistance à la domination coloniale japonaise. Grâce au sacrifice de Choon-Shik, Kim Han-su réussit à s'en sortir puis devient un riche homme d'affaires ; cela étant, il redonne à Wol-Ha son indépendance. Hélas, Kim Han-su tombe également vite sous le charme d'une femme de chambre (Geum-bong Do) aux desseins malfaisants. Cette dernière n'a qu'un but, celui d'empoisonner Wol-Ha avec l'aide d'un médecin charlatan (Chang-kang Heo) pour ensuite prendre sa place et l'argent de son époux avec...

 

 

D'entrée de bobine, un homme revenu d'entre les morts (et qui sera dès lors notre narrateur) nous prévient : il sera question de joie, de colère, de tristesse, de plaisir, de manipulation, de vengeance, de vie et de mort. Le mort-vivant, non dénué d'humour (il se définit comme un séduisant gentleman) se présente comme un ancien conteur de films muets. Qui donc serait mieux placé que ce dernier pour nous raconter l'histoire d'une tombe ? Tout est vanité dans la vie et chacune des tombes jonchant le cimetière situé derrière notre zombie-narrateur possède sa propre histoire. Celle illustrée par le réalisateur fait partie des contes cruels de l'avidité, une macabre histoire de vengeance et de justice qui finalement serait banale si elle ne se déroulait pas par-delà la mort.

 

 

Sorti en 1967, The Public Cemetery Under the Moon est un film précieux car, outre qu'il possède bien des qualités, il demeure l'une des rares bobines fantastiques et horrifiques coréennes anciennes qui n'ait pas disparue le temps passant. Durant les années 60, le cinéma sud-coréen pouvait pourtant s'enorgueillir d'une certaine vitalité dans ce domaine et Cheol-hwi Kwon, qui tourne ici le premier de ses deux films, marche sur les traces d'un autre cinéaste, méconnu lui aussi, Yong-Min Lee. Ce dernier faisait alors partie des cinéastes qui alimentaient régulièrement l'industrie cinématographique coréenne en thrillers horrifiques et en films fantastiques sortis tout droit de l'Enfer avec des titres tels que "A Flower of Evil" (Akui ggot, 1961), "The Gates of Hell" (Jiokmun, 1962), "Bride from the Grave" (Mudeomeseo naon shinrang, 1963), "A Devilish Murder" (Salinma, 1965), " Neckless Beauty" (Mokeobtneun minyeo, 1966), "The Devil and the Beauty" (Akmawa minyeo, 1969), et ce jusqu'au milieu des années 70 avec encore "A Horrible-Double Faced Man" (Gongpoui ijongingan, 1975) ou "Black Ghost" (Heukgwi, 1976). Une industrie plutôt impressionnante mais aujourd'hui quasiment oubliée tout comme ses acteurs ou actrices qu'on y retrouvait régulièrement, dont certains font partie du casting de celui-ci : Ae-ran Jeong (ici la mère de l'homme d'affaires) et Geum-bong Do (la servante meurtrière). De son côté Jang-kang Heo, pourtant décédé en 1975, est resté célèbre comme super méchant chronique du cinéma sud-coréen.

 

 

Quant à Wolhaui gongdongmyoji plus précisément, en plus de s'inscrire dans cette tradition et industrie, il évoque principalement deux pans cinématographiques que les amateurs de cinéma dit de genre affectionnent particulièrement : une influence toute nippone, celle du Kaidan-eiga (et plus particulièrement du yûrei-eiga dans lequel le revenant est systématiquement animé d'un esprit de vengeance), ainsi qu'une forte similitude avec le cinéma gothique italien et son pendant machination. À la vision de The Public Cemetery Under the Moon, les références s'imposent d'elles-mêmes et l'on pense, outre à des classiques nippons tels que "The Ghost of Kasane" (Kaidan Kasane-ga-fuchi, 1957), Le Manoir du chat fantôme (Borei kaibyo yashiki, 1958), "Histoire de fantômes japonais" (Tôkaidô Yotsuya kaidan, 1959) ou "Kwaidan" (Kaidan, 1964), aux films gothiques transalpins transposés dans un cadre plus moderne (ici, pas de château ni de manoir) ainsi qu'à des noms aujourd'hui plus souvent réhabilités qu'oubliés : Riccardo Freda (L'effroyable secret du Docteur Hichcock et Le spectre du professeur Hichcock), Mario Caiano (Les amants d'outre-tombe), Antonio Margheriti (Danse macabre), Camillo Mastrocinque (La Crypte du vampire), Giorgio Ferroni (Le moulin des supplices), Alberto de Martino (Le Manoir de la terreur) etc... Au regard de la photographie lorgnant vers le baroque, difficile de ne pas penser également à Mario Bava, tout comme une petite pensée pour Roger Corman s'impose alors que le film de Cheol-hwi Kwon évoque à sa manière un Hex à venir.

 

 

The Public Cemetery Under the Moon n'est pas pour autant une oeuvre parfaite et accuse parfois le coup de quelques chutes de rythme, d'excès théâtraux ainsi que d'effets spéciaux qui pourront paraître datés ; ceux-ci étant à la fois signes d'époque mais aussi d'un budget probablement modeste. Cependant, l'ensemble est plutôt bien mené, les acteurs convaincants tandis que Wolhaui gongdongmyoji surprend par moments car il parvient à mélanger de manière harmonieuse drame de l'adultère, mélodrame, horreur pure teintée de sadisme (il est question d'infanticide, du même enfant qui est censé se décomposer une fois mort, de toxicomanie, de tortures infligées par des gardiens de prison, d'un visage défiguré à l'acide...) tout en instillant une légère dose d'humour (noir… ou jaune, selon).

Le macabre peut aussi prendre comme ici des allures poétiques avec une héroïne, fantôme de cimetière, qui erre entre les terres, à tombeau-ouvert, créature mortifère, ombre perçant l'air, revenant de sous terre, recherchant la mémoire d'un passé délétère. Et à Wolhaui gongdongmyoji de se faire le cantique d'une tombe, d'alignées hécatombes... C'est en tout cas ainsi qu'on pourrait faire rimer cette funeste histoire dans laquelle la revenante Wol-Ha n'est rien d'autre qu'un symbole moral, l'entité surnaturelle matérialisée d'une conscience humaine au sein de l'Histoire.
Un chouette film pour qui bout de hululer devant un horrifique issu d'un temps et d'une contrée trop peu fréquentés.

 

 

Mallox

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