Orgie satanique
Titre original: Devils of Darkness
Genre: Horreur , Gothique
Année: 1965
Pays d'origine: Grande-Bretagne
Réalisateur: Lance Comfort
Casting:
Hubert Noël, Carole Gray, Tracy Reed, William Sylvester, Diana Decker...
Aka: Orgie Noire / Diable des ténèbres / Talisman / Il principe della note / Gruft der toten Frauen
 

Paul, Anne et leurs amis sont en vacances en Bretagne. Keith, le frère d'Anne, part explorer des cavernes mais est retrouvé mort. Plus tard, un aristocrate français, Armand de Molière, et sa femme viennent consoler Anne. Lors d'une promenade au bord du lac, Anne remarque qu'il n'a pas de reflet, le comte l'agresse mais perd un médaillon dans la confusion. Paul, inquiet, part à la recherche d'Anne mais ne trouve que le médaillon. Peu de temps après, le corps d'Anne est retrouvé dans le lac. La police conclut au suicide, mais une fois en Angleterre Paul décide d'enquêter. Lors du transfert, les corps d'Anne et de son frère disparaissent des cercueils. A la recherche d'une piste, Paul rencontre Karen, un mannequin, qui est bientôt enlevée par le Comte Sinistre, décidé à récupérer le fameux médaillon.

 

 

Les deux hommes à l'origine du projet sont Tom Blakeley (à la production) et le méconnu Lance Comfort à la réalisation. Le producteur Tom Blakeley est le fils de John Blakeley, fondateur de Mancunian Films, qui fournira des installations pour nombre de films de série B. En 1954, Tom Blakeley (1916-1984) vend les studios à la BBC, mais continue à produire des série B (une douzaine sur une période de quinze ans). Le réalisateur Lance Comfort (1908-1966) s'est fait une petite réputation dans les années quarante avec des films comme "Hatter's Castle" (1942), "Bedelia" (1946)" et surtout "Daughter of Darkness" (1948) avec Anne Crawford, dont l'atmosphère poisseuse est inspirée par les films de Lewton et Tourneur. Ruiné par les désastreux résultats de son film auto-produit, "Portrait of Clare" (1950), il finit sa carrière entre séries B et télévision. C'est à cette époque qu'il est abordé par Tom Blakeley, avec qui il va réaliser ses derniers films : "Rag Doll" (1961), "The Painted Smile" (1962), "The Break" (1962), "Tomorrow at Ten" (1963), "Blind Corner" (1964) et Devils of Darkness (1965). Le pauvre décédera peu après d'une maladie du foie !

 

 

A défaut de star comme Christopher Lee, Peter Cushing ou Michael Gough, la production se rabat sur l'Américain William Sylvester, qui à l'époque vivait en Angleterre avec son épouse Veronica Hurst (The Maze). Remarqué dans "La Lorelei brune" de Lewis Allen (1959) au côté de Juliette Gréco, il devient "l'Américain" de nombreuses petites productions anglaises comme "Gorgo", La Poupée diabolique ou "The Hand of Night", il apparaît même dans le James Bond "On ne vit que deux fois" . Il fut sûrement choisi pour ce film car il avait déjà joué l'année précédente pour le duo Blakely/Comfort dans "Blind Corner". Ce n'est pas l'acteur le plus connu, pourtant aujourd'hui tous les cinéphiles du monde connaissent son visage. Normal, c'est le Dr. Heywood R. Floyd dans "2001: L'Odyssée de l'espace", c'est lui qui est envoyé sur la Lune pour enquêter sur la découverte du fameux monolithe.
Le Français Hubert Noël (1924-1987) interprète le fameux vampire. Spécialiste des seconds couteaux suaves et fourbes (notamment dans les films de cape et d'épée comme "Le Bossu"), il passera allégrement du cinéma au théâtre, interprétant un peu tout et n'importe quoi, de "Panique" du Québécois Jean Claude Lord à "Madame Claude 2". Il trouvera sa véritable vocation dans le doublage, où il sera la voix française de Tony Curtis et Elvis Presley.



Tout bon film d'horreur anglais de l'époque se devait d'avoir une distribution féminine, pas forcément prestigieuse mais du moins attrayante. De ce point de vue, le film de Lance Comfort se débrouille plutôt pas mal. En effet, le casting se distingue par deux magnifiques actrices : Carole Gray (1940) et Tracy Reed (1942-2012).
Carole Gray est née en Rhodésie ; le pays étant une colonie britannique, l'actrice bénéficie donc de la nationalité anglaise. Cette magnifique brune est la révélation du film, son rôle de gitane jalouse est tout bonnement parfait ! On a pu la revoir dans quelques productions comme "L'île de la terreur", "La Malédiction de la mouche", "Les 13 Fiancées de Fu Manchu"... et bien sûr dans les incontournables séries anglaises de l'époque : "Chapeau melon et bottes de cuir" et "Le Saint". L'autre atout charme du film est Tracy Reed (attention, ne pas la confondre avec une actrice afro-américaine qui a le même nom) ; elle a tourné pour Kubrick dans "Dr Folamour" et sera de nouveau la partenaire de Peter Sellers dans "Quand l'Inspecteur s'en mêle" et "Casino Royale" version 1968. Sans surprise, on la retrouve dans la série "Chapeau melon et bottes de cuir". À noter qu'elle fut envisagée pour remplacer Diana Rigg, avant qu'un producteur n'impose Linda Thorson.



Pour accompagner nos deux jeunes comédiennes, la production engage quelques extra disons... plus matures. L'expérimentée Marianne Stone (1922-2009) comptabilise 222 apparitions dans des productions aussi variées que "Countess Dracula", "The Human Factor", "The Curse of the Mummy's Tomb", "Witchcraft", "Jack the Ripper", "Quatermass 2" ... Elle aussi travaillera avec Kubrick, pour "Lolita", et passera par la case série culte avec "Amicalement Votre/The Persuaders".
Rona Anderson (1926-2013), Écossaise distinguée, a fait une belle carrière dans les années cinquante ; elle est aussi connue comme l'épouse de l'acteur anglais emblématique Gordon Jackson (la série TV "Les Professionnels", La Grande Menace, "La Nuit des Généraux"...). Enfin, une autre vedette des années cinquante apparaît également dans le film : Diana Decker (1924), qui joua notamment dans "La Comtesse aux pieds nus" et "Lolita".



En 1965, cela fait une bonne dizaine d'années que la Hammer a imposé un nouveau style de productions horrifiques, avec couleurs chatoyantes, violence sexuelle sous-jacente et érotisation de plus en plus exacerbée. La formule semble bien rodée et la demande est croissante, à tel point que d'autres studios comme l'Amicus (qui va se spécialiser dans les films à sketches tels "Le Train de la terreur", "le Club des monstres", "Histoires d'outre-tombe", Asylum ou Le Caveau de la terreur) ou plus tard la Tigon British Films Productions (La Nuit des maléfices) vont commencer à concurrencer la Hammer. L'engouement est tel que même des petits producteurs comme Tom Blakeley (via sa société Planet Film Productions) se lancent dans la production de films d'horreur. Le créneau est porteur et encore assez vaste pour tout le monde. Dans ce contexte, le réalisateur Lance Comfort se voit attribuer un budget confortable par rapport à ce qu'il avait l'habitude de recevoir pour tourner ses films précédents. Cependant, cela reste encore en deçà d'une production de studio comme Hammer ou Amicus. Pour éviter de dépenser inutilement de l'argent dans de coûteux décors, le film sera tourné dans les studios Pinewood pendant les vacances. Car, à cette période, le studio louait à bas prix ses décors inutilisés à de petites productions. Si vous êtes aficionado des séries anglaises de l'époque, vous reconnaîtrez quelques intérieurs. Pour économiser sur les décors et costumes, le film se passera à l'époque contemporaine et en Angleterre (contrairement à certaines informations, il semblerait que le film ait été tourné entièrement en Angleterre). Ce qui pourrait passer pour une contrainte donne en fait au film un certain cachet. De plus, Devils of Darkness est le premier film en couleur de Comfort. Ce dernier profite de l'époque et du contexte favorable, le fameux Swinging London avec ses tenues colorées, son design "tout en plastique", ses lampes à lave... pour faire péter le technicolor.
Le film symbolise une autre époque, où le héros effectuait ses recherches dans des bibliothèques (pas de Wikipédia) et où il recevait une toile peinte pour preuve que l'on détenait quelqu'un (pas de smartphone avec appareil photo).


Les amateurs du genre apprécieront cette petite douceur à sa juste valeur. Loin du titre français faussement racoleur, nous sommes en présence d'un savoureux fac-similé contemporain de Kiss of the Vampire/Le Baiser du vampire dont il empreinte la trame narrative, la secte satanique et le vampire, et certaines idées. Le vampire français, le comte Sinistre, est loin de la bestialité animale et sexuelle qui se dégageait du Dracula avec Christopher Lee. Hubert Noël nous la joue plus suave et galant, mais avec une petite touche de perversité et de méchanceté (la punition de la pauvre Anne qui lui a arraché le talisman) qui rappelle ce bon vieux Louis Jourdan dans "Octopussy". Parmi les points positifs, on trouve évidemment Carole Gray et Tracy Reed, toutes les deux superbes et éclatantes de beauté, ainsi que certaines séquences particulièrement réussies dont la scène du crucifix qui tombe sur le dos de Tracy Reed, valant à elle seul le détour. On peut seulement regretter des baisses de rythme ponctuelles et un scénario qui part un peu en quenouille vers la fin (le fameux médaillon que tout le monde cherche devient subitement accessoire). Le script emprunte aussi quelques raccourcis assez déroutants, comme la réaction de la police qui ne semble pas s'offusquer des explications irrationnelles (et surnaturelles) du héros.
En résumé, le film, malgré ses défauts, est une petite friandise qui certes ne révolutionnera pas le genre, mais comblera les amateurs à la recherche d'une curiosité sans prétention mais plaisante.

 

 

The Omega Man



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