L'équipage d'un vaisseau spatial, de retour d'une mission sur Mars, se retrouve livré à lui même, face à la menace d'une mystérieuse créature qu'il semble avoir ramenée malgré lui...
It! est un sacré bon petit film, en plus d'être, à sa manière, quelque peu fondateur. A sa vision, on ne pourra que regretter tous ces "monstres des temps perdus" et ces espaces interstellaires à base de latex, et quand bien même la production semble disparate et très inégale allant du n'importe quoi au sublime, c'est avec l'œil de la nostalgie (mais pas seulement) que l'on constate combien nous avons perdu au change, nous spectateurs, avec l'arrivée des images de synthèse et des effets spéciaux numériques. Je ne ferai pas de procès empreint d'un conservatisme outré, mais disons simplement, pour enfoncer une porte déjà ouverte, que la poésie, les astuces et l'imagination inhérentes à leurs auteurs semblent aujourd'hui bien loin. Je ne suis pas certain que d'ici 30 ans, les films d'aujourd'hui, pour certains gavés d'effets digitaux, recéleront le même charme que l'on trouve dans ce film là.
Edward L. Cahn, n'est pas un nouveau né lorsqu'il tourne en 1958 ce It! The Terror from Beyond Space : il a commencé comme monteur, au sein du cinéma muet des années 20, de films comme "L'Homme qui rit" avec Conrad Veidt, ou le très connu "A l'Ouest rien de nouveau" de Lewis Milestone. C'est donc à un artisan, homme à tout faire chevronné que nous avons affaire ici, qui n'en est pas non plus à son premier essai au sein du film de genre, ayant tourné au préalable dès 1953 l'un des premiers "Women In Prison", à savoir "Girls in Prison", franchement en avance sur son temps dans sa peinture de femmes qui ne se font pas de cadeau, puis "The She-Creature" en 1956, mettant en scène une "femme sirène" au sein d'un cirque, ou bien encore "Voodoo Woman" l'année précédente.
Il n'est donc pas étonnant de retrouver ici un metteur en scène qui, à défaut d'être novateur, n'en est pas moins astucieux dans ses cadrages et dans son montage (on se refait pas), si bien que, même si It! The Terror from Beyond Space n'est pas l'œuvre la plus marquante des années d'or de la SF, l'on passe un moment des plus plaisants au sein ce cette navette spatiale habitée par cette terreur d'alien, et l'on reconnaîtra au passage sans mal, le postulat original dont Ridley Scott fit intelligemment le remake 20 ans plus tard, avec le succès que l'on sait. Je ne m'attarderai pas longtemps là-dessus, mais disons simplement que cela prouve la substance et le potentiel exploitable dont regorgent les films de cette époque, et ce film là en particulier. Tout n'est ici du reste que conjugaison de talents, et ce n'est pas simplement à son metteur en scène qu'on créditera cette réussite du genre.
Le scénario reste assez basique et pourrait presque s'apparenter à une variation spatiale de "La Chose d'un autre monde" de Christian Nyby, mais tout y fonctionne plutôt bien, si bien qu'on aura droit au remake évoqué ci-dessus, et il est rageant de lire encore ici et là, que le dit "Alien" est un remake d'un "nanar" des années 50, car de nanar, il n'y a point.
Pour redire combien le travail de groupe est important, il ne faut pas omettre de mentionner Paul Blaisdell, qui tient une place incommensurable au sein des artisans talentueux des effets spéciaux de l'époque avec ses collaborations pour Roger Corman, notamment, ("Day the World Ended"), ses trucages pour Les Soucoupes volantes attaquent, ou encore le "She-Creature" cité avant. Bref, une espèce de savant "ès latex", qui, même lorsque les productions étaient médiocres, apportait indéniablement quelque chose, quand bien même cela pourra paraître désuet pour certains aujourd'hui. Même remarque pour ces fabuleux compositeurs que sont Paul Sawtell et Bert Shefter ("La Mouche noire" / "Le Sous-marin de l'apocalypse") qui n'ont cessé de tirer vers le haut les productions des plus cheap au plus fortunées, avec des partitions formidables qui existent déjà par elles-mêmes en plus de dynamiser l'ensemble.
Bref, un bon film, mis en scène sans génie, il est vrai, mais avec un talent assez sûr de lui, et des acteurs qui le défendent assez bien malgré quelques surcharges "rictusiennes".
Note : 7/10
Mallox
A propos du film :
# Rendons à César ce qui lui appartient : le film s'inspire d'un livre de A. E. Van Vogt, "The Voyage of the Space Beagle" édité en France en 1953 sous le titre de "La Faune de l'espace", déjà adapté en B.D avant cette adaptation cinématographique scénarisée par un autre expert en la matière, Jerome Bixby (auteur lui aussi de romans fantastiques comme "L’Énigme de Mars" en 1954), qui signait là sa première adaptation pour le cinéma, avant se retrouver un peu plus tard aux commandes de scénarios comme ceux du quelque peu surestimé bien que chatoyant "Voyage fantastique" de Richard Fleischer en 1966, puis de quelques épisodes de séries TV comme "La Quatrième dimension", "Men Into Space" ou "Star Trek".