Opération Re Mida
Titre original: Lucky el intrépido
Genre: Comédie , Espionnage
Année: 1967
Pays d'origine: Espagne / Italie / Allemagne
Réalisateur: Jess Franco
Casting:
Ray Danton, Barbara Bold, Dante Posani, Dieter Eppler, Maria Luisa Ponte, Rosalba Neri, Beba Loncar...
Aka: Agente speciale L.K. / Lucky the Inscrutable
 

"Londres, mystérieuse et froide", annonce d'entrée un panneau. Un choeur de musiciens imite Big Ben avant d'entamer un blues, tandis qu'à l'écran des personnages pittoresques se croisent et échangent des dialogues farfelus. Dans une chambre d'hôtel, un homme est abattu par un tueur sadique et tuberculeux. Ce dernier met le feu à une valise pleine de billets. Arrive le générique : une jolie danseuse en bikini à paillettes se trémousse sur air de variété / pop composé par le maestro Bruno Nicolai. Ambiance fumetti garantie, avec des personnages parlant dans des phylactères, et le dénommé Lucky le Phénomène, la vedette de ce film, arborant fièrement une tenue de super-héros.
Le Lucky en question n'a pas de super-pouvoirs, c'est en fait un agent secret, et s'il porte un costume c'est pour les besoins d'un bal masqué. Une soirée fortement animée où, entre deux plans drague, notre héros se frite avec un Pierrot et un gladiateur dans une salle de bain, dont la baignoire est occupée par une belle blonde pas farouche.
Lucky apprend qu'un Cercle Secret de financiers, dirigé par l'Archange, cherche à entrer en contact avec lui. Cette organisation a besoin de Lucky afin de contrecarrer un péril qui menace l'économie mondiale, à savoir une bande organisée, dont le chef s'appelle Lunettes d'Or, voulant inonder le marché de fausse monnaie et ruiner ainsi les pays capitalistes. L'une des usines où la fausse monnaie est fabriquée se trouve en Albanie. Lucky, flanqué d'un associé, se rend donc à Diglas, petite ville austère d'Albanie, en biplan. Mais dès leur arrivée, les deux hommes vont devoir faire face à la police secrète, plutôt du genre à tirer à vue avant de poser des questions. Mais il en faut plus pour inquiéter Lucky l'Intrépide...

 

 

Une grande partie de l'oeuvre fastidieuse (et inégale) de Jess Franco s'adresse essentiellement à un public adulte. Qu'il s'agisse de ses premiers travaux avec Eurociné ("L'Horrible Docteur Orloff"...), jusqu'à sa collaboration avec Erwin C. Dietrich ("Doriana Grey", "Blue Rita", "Sexy Sisters", etc...), en passant par ses associations plus ou moins réussies avec Adrian Hoven, Harry Alan Towers et Robert de Nesle, il faut avouer que ces films étaient réservés à un public averti (à l'exception de "Un Capitaine de Quinze Ans"). Opération Ré Mida constitue une rupture dans la filmographie du prolifique metteur en scène. Une transition entre ses films de "savants fous" et les futurs "Necronomicon", "Kiss me Monster" et "Sadisterotica", suivis de ses films "sadiens".
Déjà, "Opération Ré Mida" est son premier film en couleurs, et aussi sa première co-production avec un pays autre que l'Espagne ou la France. Cela ne signifie pas que l'apport de l'Italie ou de l'Allemagne va donner un aspect "gros budget" à ce long métrage. Non, rassurez-vous, un Franco reste un Franco, c'est-à-dire qu'il fait avec les moyens du bord... et en l'occurrence il le fait plutôt bien. On peut considérer le film comme un véritable comic-strip couché sur pellicule, un film d'auteur plus qu'un hommage ou une parodie. "Opération Remida" est effectivement une comédie, pour tous publics, qui a surfé sur le succès des films d'espionnage qui inondaient les salles de cinéma à l'époque. Et ce n'est pas un hasard si le premier rôle est dévolu à un spécialiste du genre : Ray Danton, vu deux ans auparavant dans "Corrida pour un Espion", puis dans "New-York appelle Super Dragon". A ses côtés... plein de jolies filles, dont Beba Loncar, et dans un second rôle Rosalba Neri, qui campe ici la chef de la police albanaise, une femme qui manie le fouet, sexuellement frustrée, et dont la scène d'amour inévitable avec le héros sera retranscrite sous forme de roman-photo, avec dialogues dans les bulles. Une occasion rare de voir la belle Rosalba jouer la comédie.

 

 

Ce qui surprend en premier lieu dans ce film, surtout pour tous ceux qui connaissent Franco, c'est qu'il n'y a pas de temps mort. "Opération Remida" est très rythmé, l'action ne s'arrête jamais, et donc le côté BD voulu est parfaitement réussi. Les dialogues, même s'ils ne volent pas toujours très hauts, sont pertinents et complètement décalés. Lucky n'hésite pas à proclamer à une foule nombreuse : "Ils sont peu nombreux à connaître mon vrai visage"... tout en se démasquant. Au marché aux espions, on vend des secrets "sous le manteau", et on converse en style télégraphique. A propos d'une conductrice albanaise, Lucky déclare que "Si on lui enlève les moustaches, elle n'est pas si mal que ça". Dans la surenchère des gadgets instaurés par les "James Bond", on a ici un gaz qui arrête le temps ; et aussi un faussaire qui se vante d'avoir fabriqué des fausses pièces étrusques. Plus, cerise sur le gâteau, un ex-nazi travaillant pour les Chinois, dénommé le Colonel Von Travesti, et déguisé en blonde fatale.
Après avoir déjà fait ses preuves un an auparavant dans la comédie d'espionnage, avec "Cartes sur Tables" (et Eddie Constantine en vedette), Jess Franco récidive en cette année 1967 avec ce film, qui sans être exempt de tous reproches, s'avère plutôt agréable à regarder. Le néophyte qui va regarder "Opération Remida" aurait bien du mal à croire que le même réalisateur est aussi responsable d'oeuvres comme "Maciste et les Gloutonnes" ou "Shining Sex". Mais c'est pour çà qu'on l'aime, notre bon Jesus, parce qu'il arrive toujours à nous surprendre, alors qu'on croit tout connaître de lui.

 


Note : 7/10

 

Flint
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