Traqués de l'an 2000, Les
Titre original: Turkey Shoot
Genre: Fantastique , Aventures , Anticipation
Année: 1981
Pays d'origine: Australie
Réalisateur: Brian Trenchard-Smith
Casting:
Steve Railsback, Olivia Hussey, Michael Craig, Carmen Duncan, Noel Ferrier, Lynda Stoner, Roger Ward, Michael Petrovitch...
Aka: Escape 2000 / Blood Camp Thatcher
 

Nous voici transportés en 1995, année où la tyrannie règne au sein d'un pouvoir complètement totalitaire. En effet, tout être humain qui ne suit pas la loi rigide en place sera considéré comme déviant puis sera emprisonné dans un camp dont les gardes sont prêts à infliger les pires sévices à leurs pensionnaires en cas d'écart. Quoique de plus logique puisque ceux-ci ont été castrés afin d'être rendus plus méchants. Voici que trois nouveaux détenus arrivent. Chacun aura plaidé son innocence en vain et assistera dès lors à l'infamie. L'homosexualité est passible de la peine de mort, les prisonnières tombant enceintes sont immédiatement avortées puis stérilisées tandis que le géniteur lui est castré. Au niveau de la pensée, c'est le même tarif, et il sera bien avisé de ne jamais déroger aux règles de base, pourtant très restrictives. Bref, ce ne sera pas un voyage au sein du "meilleur des mondes possibles" puisque ceux-ci s'apercevront assez vite que ledit camps sert de réservoir à la chasse à l'homme et se verront bientôt même sollicités pour y participer comme proies.

 

 

Bon, il sera facile de rire du postulat politique on ne peut plus mince, et qui ressemble à s'y méprendre à une revendication adolescente généraliste. "Non, non, non, le fascisme ne passera pas !". C'est pourtant un film très distrayant que nous offre Brian Trenchard-Smith en 1981, un voyage à mi-chemin entre Les Chasses du comte Zaroff et Punishment Park qui tourne assez vite au film d'aventures classique et efficace après avoir posé les bases d'un cinéma d'anticipation proche d'un âge de cristal par exemple. Difficile également d'être trop dur avec le message risible du film puisque son réalisateur dû abandonner un segment de l'histoire pour cause de restrictions budgétaires. Les années soixante dix furent fastes pour le cinéma australien, qui avec des budgets relativement confortables ont su offrir quelques belles réussites atypiques dans un paysage bien balisé, et qui ont vu l'émergence de cinéaste tels que Peter Weir avec des films comme "Pique-nique à Hanging Rock", Richard Franklin avec "Patrick" ou juste avant Harlequin de Simon Wincer (qui soit dit en passant fera une carrière pathétique "Sauvez Willy !"). Mad Max de Georges Miller est également passé par là et ne tardera pas à sortir en France.
Finalement Les traqués de l'an 2000 pourra presque se voir comme le chant du cygne du cinéma d'exploitation australien. En effet, voici venir la fin d'une époque où le gouvernement décide alors de restreindre de façon conséquente le budget culturel et l'industrie cinématographique nationale qui en prendra un bon coup dans la créativité tant et si bien que l'on retrouvera bientôt tous ces metteurs en scène aux Etats-Unis. Le film ici mis en chantier est produit par le duo William Fayman et Antone I. Ginane déjà responsable des deux petites réussites citées au-dessus, "Patrick" et Harlequin. Bref tout ça pour dire, plus que de faire un triste constat culturel, que Brian Trenchard-Smith dû ôter de son film toute la première partie où cette société despotique du futur étaient dépeinte.

 

 

Logique donc sachant cela que ce Escape 2000 ressemble à un pensum au niveau du fond. Ceci dit, mieux vaut cela à mon sens qu'une réflexion ou dissertation mal digérée et assénée avec insistance et lourdeur. Il faut dire qu'au niveau de la forme, le film reste au fil des ans, et malgré son postulat placé en 1995, un spectacle d'aventures totalement réjouissant, mixant un paquet de standards allant du "Pont de la rivière Kwaï" à La Conquête de la planète des singes, celui-ci offre un scope majestueux à la mesure du talent de son metteur en scène qui déroule son film sans complexe et sans temps mort, occupant même les espaces même de façon brillante, efficace, avec une science du cadre non négligeable et des couleurs presque rétro qui finissent par contribuer au cachet original et prenant du film.
Ajoutons à cela que les acteurs sont bien choisis et parfaitement dirigés. On a d'une part la charmante Olivia Hussey (découvert pour ma part dans "Roméo et Juliette" quand la télévision française osait encore offrir aux téléspectateur des nuits du cinéma, puis plus tard dans l'indispensable et incontournable Black Christmas de Bob Clark), mais aussi l'excellent et trop souvent oublié Steve Railsback, aperçu pour ma part il y a peu dans l'excellent "Cockfighter" de Monte Hellman (1972), déjà présent dans un grand film ignoré et sous-estimé d'Elia Kazan, "Les Visiteurs", et que l'on reverra plus tard dans le médiocre Lifeforce de Tobe Hooper puis plus récemment enfin dans un "Ed Gein" sans saveur. N'oublions surtout pas l'acteur Michael Craig qui a déjà une quarantaine d'années de service alors et autant de films à son actif et qui offre une composition toute en retenue, toute british, qui contraste intelligemment avec les moult excès du film. Dans un registre plus léger, les palmes seront à distribuer entre Roger Ward (déjà présent dans The Man from Hong-Kong, première réalisation de Trenchard-Smith en 1975 et que l'on reverra dans Mad Max) grand chauve avec moustache qui verra sa main armée d'un pistolet, tomber devant lui, après avoir été coupée de façon incisive par notre Olivia Hussey pourchassée, mais également la gardienne sadique (épatante Carmen Duncan) se baladant à cheval, arbalète aux flèches explosives à la main et qui offre une image de bande dessinée excellente, jouissive. Chacune de ses apparitions est un véritable enchantement. La garce !

 

 

Jouissif, c'est de toute façon le qualificatif qui convient au film. Sans chute de rythme, mâtiné de gore et d'humour noir, les personnages n'ont finalement pas besoin d'épaisseur pour exister pleinement. Comme toute bonne bd distrayante, des personnages vite croqués, aux contours bien fermes sans pour autant verser dans la pure caricature, suffisent, et il faut bien admettre qu'on est bien content de voir autant l'histoire que ses protagonistes, délestés d'un trop plein de fond et d'états d'âme qui, j'en suis persuadé, en auraient ralentit le rythme, alors qu'il est ici harmonieux et ne faillit jamais. De même pour des scènes de douches qui renvoie à des influences WIP également omniprésentes et qui, filmées avec la petite touche de complaisance qu'il faut, sont délectables, tout comme ce gros monstre poilu, Craignos Monster rigolard qui sans rien désamorcer à la tension menée donc avec une certaine maestria par le réalisateur, amène des touches d'humour assez dantesques. Il faut dire qu'il aura bien du mal à se dépêtrer d'une pelleteuse mal conduite, et vu qu'on commençait à s'attacher à cet animal domestique hors du commun, on aura même droit d'être un peu triste de par le sort qui lui est réservé.

 

 

Pour finir, et pour résumer, il ne faudra pas se montrer trop pragmatique devant un tel spectacle, ou tomber dans le piège d'une analyse socio-politique en bonne et due forme. Si celle-ci est bien présente, elle ne reste que secondaire et c'est comme une bande dessinée un peu trash et un peu sexe, et surtout captivante qu'il conviendra de savourer la chose. C'est aussi au spectateur que de faire preuve d'un peu d'humour. Ici plus que jamais. Bref, si vous ne l'avez jamais vu, calez vous dans votre canapé un samedi soir devant, et pas besoin de s'armer de chips, bières ou chocolats, le film offre un peu tous ces encas en même temps, ce qui est déjà beaucoup, non ? Dernière chose, il convient de souligner l'impeccable partition de Brian May (Mad Max).

 

Note : 7,5/10

Mallox

 

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