Baiser du vampire, Le
Titre original: Kiss of the Vampire
Genre: Horreur , Vampirisme , Epouvante , Gothique
Année: 1962
Pays d'origine: Grande-Bretagne
Réalisateur: Don Sharp
Casting:
Edward de Souza, Jennifer Daniel, Clifford Evans, Noel Willman, Barry Warren, Jacquie Wallis, Isobel Black...
 

En voyage de noces en Europe centrale, un couple de jeunes mariés, Gerald (Edward de Souza) et Marianne Harcourt (Jennifer Daniel), tombent en panne de voiture. Ils vont trouver refuge à l'hôtel le plus proche, où ils s'aperçoivent qu'ils en sont les seuls clients. Le soir venu, ils reçoivent une invitation à dîner du docteur Ravna (Noël Willman), qui habite le château voisin...

 

 

Depuis 1957, le studio anglais Hammer s'est imposé comme la référence en matière d'horreur gothique avec deux chefs d'oeuvre incontestables et incontournables : "Frankenstein s'est échappé" et Le cauchemar de Dracula ; et bien d'autres futurs classiques suivront. A côté de ces oeuvres maîtresses et de leurs séquelles, fourmille une quantité de films parfois inhabituels (car la Hammer s'est aventurée vers d'autres genres que l'horreur) ou originaux (en abordant les sujets de manière différente). Il s'agit de longs métrages souvent méconnus sinon inconnus qui, loin d'être déshonorants, font partie du mythe du studio et vont en consolider les fondements pendant plusieurs années. Dans les années septante, ces productions permettront même au studio de survivre un laps de temps supplémentaire (grâce, entre autres, à la trilogie Carmilla et son érotisme bon enfant).


C'est le cas avec ce Baiser du vampire, longtemps considéré comme une oeuvre mineure, notamment à cause de l'absence du duo légendaire Cushing / Lee et du "réalisateur maison" Terence Fisher. Pourtant, le film est une petite merveille à découvrir et dépasse même certaines productions du célèbre duo. Il ne faut pas oublier que ces films soi disant mineurs disposaient plus ou moins de la même équipe technique, qui avait déjà fait ses preuves sur d'autres productions Hammer. Parmi ces gens figurent le musicien James Bernard, le spécialiste des effets spéciaux Les Bowie, le décorateur Bernard Robinson (qui recyclera les décors du studio avec brio, notamment ici la mappemonde du Cauchemar de Dracula) et le maquilleur Roy Ashton, le tout dirigé par un solide réalisateur anglais ayant fait ses armes à la télévision anglaise via des séries cultes comme "Chapeau melon et bottes de cuir" ou d'autres séries cultes.

 

 

Pour ce film c'est Don Sharp, réalisateur anglais (mais d'origine australienne), qui fut choisi. Aussi à l'aise dans l'action ("Le secret de la banquise"), le fantastique ("Witchcraft", "Curse of the Fly"), les séries télé ("The Avengers", "The Champions") ou les téléfilms ("A Woman of Substance"), Sharp est un bon technicien, efficace et compétent dans l'action, mais qui est loin d'avoir le talent d'un Fisher. Mais, loin de vouloir "copier" son illustre collègue, le réalisateur va fournir une oeuvre visuellement splendide, aidé par la magnifique photographie d'Alan Hume (Lifeforce, "Runaway Train"). Sharp, comme transfiguré, compose des plans d'une beauté vénéneuse, fait exploser le technicolor et abuse des gros plans de visages. Le résultat est un film lascif et charnel qui met en valeur un trio d'actrices que seule la Hammer pouvait rassembler : la blonde Jennifer Daniels ("La femme reptile"), la brune auburn Jacquie Wallis ("The Story of Esther Costello") et surtout la rousse Isobel Black (Twins of Evil), beauté perverse au visage d'ange, qui d'un regard ensorcèle sa proie. La scène où elle va retrouver son amie enterrée dans le cimetière, caressant la terre fraîchement remuée de la tombe, est d'une incroyable sensualité nécrophile. Le film baigne entièrement dans cette atmosphère à la fois putride et voluptueuse ; les vampires ne sont plus représentés comme des créatures damnées, mais comme des épicuriens. Le plaisir est étroitement associé à la condition du vampire, comme le montre "la conversion" de Jennifer Daniels, découvrant ses épaules nues avant de subir l'assaut du vampire, comme s'il s'agissait d'un coït. C'est la grande force du film, jamais un sein n'est dévoilé, et pourtant le film est l'un des plus érotiques du studio.

 

 

Outre son trio d'actrices, le film regorge aussi de trouvailles bien venues : le héros qui dessine une croix avec son sang pour échapper à ses assaillants vampires, l'étrange bal costumé (qui inspira plus tard un certain Polanski), le début avec l'apparition de Zimmer (Clifford Evans) qui enfonce subitement une pelle dans le cercueil alors qu'un hurlement inhumain retentit, ou le même Zimmer cautérisant une morsure au bras (scène empruntée aux "Maîtresses de Dracula"). Mais le coup de génie est peut-être le final, prévu initialement pour conclure "Les maîtresses de Dracula". Celui-ci dut être abandonné pour des raisons techniques. Le scénariste/producteur John Elder (qui travailla officieusement sur le script des "Maîtresses de Dracula") reprendra l'idée pour conclure son scénario de manière éclatante. Ainsi, par le biais de la sorcellerie, les vampires seront détruits par leur alter-ego animal aussi assoiffé de sang qu'eux, dans une scène grandiose qui touche presque à la folie ; l'ensemble rehaussé par une légère touche d'érotisme (pour l'époque) qui dévoile quelques petites culottes et une ou deux paires de jambes servant de repas au sympathique Desmodontinae. Évidemment, ne nous leurrons pas, les effets spéciaux sont loin d'être à la hauteur, et les chauves-souris sentent bon le plastique, mais la scène reste mémorable pour l'époque.


Le baiser du vampire est presque un chef-d'oeuvre. Malheureusement, quelques scories viennent entacher ce tableau presque parfait, notamment l'interprétation sur-jouée d'Edward de Souza, et un scénario assez nébuleux qui laisse quelques zones d'ombres, même si le mélange thriller, vampire et sorcellerie est assez réussi. Le film, d'une manière générale, peut être considéré comme l'un des meilleurs essais de la Hammer pour sortir du moule stéréotypé des films de vampires. Pourtant, à l'époque, ce n'était que le troisième film de vampires de la Hammer, après Le cauchemar de Dracula (1958) et "Les maîtresses de Dracula (1960), mais le studio semblait vouloir prendre ses distances avec le comte, qui reviendra pourtant quelques années plus tard dans "Dracula, prince des ténèbres". C'est en tout cas une oeuvre visuellement splendide à défaut d'être une entière réussite, un film où les femmes vampires de la Hammer ont rarement été aussi belles ; bref, un film qui mérite d'être vu.

 

 

The Omega Man

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