La mystérieuse autant qu'inquiétante organisation secrète SIGMA s'attaque à des symboles du pouvoir et vise à la création d'un robot géant destiné à assouvir les tentations d'hyper-puissance et de domination de son chef, le savant Akunomya. Dès la première séquence, elle fait une démonstration de ses pouvoirs maléfiques à l'aide d'une tête volante et sarcastique, d'un robot-samouraï à grosses lèvres aspirantes et de quelques spadassins armés. Heureusement, face à tous ces méchants se dresse Yukata Daimon, défenseur du bien aidé dans sa lutte par sa fidèle monture : une moto se transformant en robot karatéka.
A la lecture de ces quelques lignes, et surtout au vu du design du robot, les Français et les Belges que nous sommes, pensent forcément à Goldorak, qui eut son heure de gloire dans le plat pays qui est le mien et chez son voisin d'outre-quiévrain vers le début des années 80. Raté ! Le film est en fait inspiré d'une série TV japonaise, certes, mais antérieure à Goldorak : Denjin Zaborger, le générique de fin reprenant d'ailleurs quelques images de ladite série (ceci étant, Zaborger était postérieure à Mazinger, dont le créateur était Go Nagai, papa de Goldorak, comme quoi tout se tient finalement et les ressemblances ne sont pas surprenantes).
Remake de Noboru Iguchi, réalisateur parfois un peu inspiré ("The Machine Girl"), parfois trop peu inspiré (Robogeisha), ce Zaborgar là est une jolie réussite fleurant bon la simplicité manichéenne des animes japonais destinés à l'enfance relevée d'épices plus actuelles et un peu plus corsées, à l'image des étonnants dino-seins et dino-fesses ou des poitrines lance-missiles. Bien rythmé et interprété avec tout le sérieux que requiert ce genre d'hommage, il ne sombre pas dans la parodie moqueuse mais constitue plutôt une mise au goût du jour nimbée d'un humour constant que le recul rendait obligatoire.
Personnages délirants, comme cet homme aux yeux en balles de pingpong (interprété par l'inévitable Takashi Shimizu, caméotant dans quasi tous les films labellisés de près ou de loin sushi typhoon) et créatures étonnantes, comme ce camion bouledogue géant, sont légion dans cet univers souvent paroxystique où les sentiments s'exacerbent et les luttes se font fratricides et œdipiennes. Iguchi profite aussi de la veulerie et des mensonges d'un personnage de politicien plus que véreux et corrompu mais haut placé pour faire prendre de l'âge à son héros et le vieillir au point de devenir quasiment pathétique, tout comme les ex-flics apôtres du sourire, avant de retrouver la foi et l'espoir ainsi que son robot mécanique voltigeur pour des séquences finales proches du kaiju-eiga et de ses destructions.
Sympathique de bout en bout, donc, plutôt bien rythmé et jamais ridicule, visuellement très réussi, ce Karate-Robo Zaborgar se révèle une bonne surprise de la part d'un Iguchi qui nous a le plus souvent laissé un goût d'inachevé. On se plaindra bien un peu de ces quelques gerbes de sang numériques toujours aussi foireuses mais bon, franchement, elles passent sans peine au vu du reste. A voir.
Bigbonn