Night Gallery - saison 1 [Série TV]
Genre: Fantastique
Année: 1969
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Boris Sagal, Steven Spielberg, Barry Shear, ...
Casting:
Roddy McDowall, Joan Crawford, Larry Hagman, Burgess Meredith, Joanna Pettet, Louis Hayward, Agnes Moorehead...
 

Quelques années après La quatrième dimension (The Twilight Zone en VO), Rod Serling se lançait dans une nouvelle série télévisée reprenant certains de ses codes : outre sa présence au générique en tant que scénariste de nombreuses histoires, il se retrouvait systématiquement à la présentation de chaque segment. En revanche, au lieu d'être diffusée sous un format d'un seul épisode de durée constante, cette galerie de nuit présentait dans chaque épisode deux ou trois segments totalement différents, dans le thème comme dans la durée, le seul lien entre eux résidant dans des tableaux aux tonalités sombres et morbides réunis dans la Rod Serling's Night Gallery (titre complet de la série). Respectant la loi du genre, un pilote fut d'abord présenté aux téléspectateurs puis quelques épisodes qui constitueront cette saison 1 que l'on retrouve aujourd'hui en France (en espérant que les deux autres saisons suivent). Ce pilote est d'ailleurs le seul à avoir connu une diffusion française et donc à avoir bénéficié d'une version dans notre langue (proposée néanmoins aussi en version originale sous-titrée, ouf.)

 

 

Pilote - Segment 1 : The Cemetery
Réalisation : Boris Sagal.
Interprétation : Roddy McDowall, Ossie Davis, George Macready.

Premier opus et belle réussite pour ce récit moraliste où la cupidité d'un neveu brebis galeuse désireux d'accélérer le trépas d'un vieil oncle malade ne paiera pas forcément comme il l'avait espéré. Plantée au cœur d'une grande demeure lugubre décorée de tableaux sinistres, cette histoire qui voit l'une de ces peintures comme prendre vie et annoncer le retour du trépassé offre de beaux moments de surnaturel. L'opposition franche entre le serviteur noir, fidèle et rabaissé systématiquement et le jeune héritier sans scrupules ira crescendo vers un final forcément mortifère.

 

 

Boris Sagal, le réalisateur, officia surtout à la télévision, même s'il est connu aussi chez nous pour avoir été aux manettes du Survivant avec Charlton Heston. Notons que Sagal eut une fin tragique puisqu'il mourut sous les pales du rotor arrière d'un hélicoptère lors du tournage de la série La troisième guerre mondiale. Niveau casting, on retrouve le vieux George Macready dans le rôle du tonton riche et diminué (qu'IMDB qualifie lui-même de relativement anonyme mais reconnaissable à sa voix... mais ici il ne peut plus parler !), l'excellent Roddy Mc Dowall, à la carrière longue et diversifiée : citons, entre autres, La maison des damnés, Larry le dingue, Mary la garce mais aussi... La planète des singes, le film de Schaffner dans lequel il incarnait Cornélius et qui avait était co-écrit par... Rod Serling (d'après le roman de Pierre Boulle, bien sûr). Enfin, n'oublions pas Ossie Davis, toujours impeccable, même quand il incarne JFK chez Coscarelli ! (Bubba-Ho-Tep).



Pilote - segment 2 : The Eyes
Réalisation : Steven Spielberg.
Interprétation : Joan Crawford, Barry Sullivan.

Pour ce deuxième opus, l'histoire ne navigue plus dans les eaux sombres du surnaturel mais plutôt dans celles de la science sans conscience et de l'argent qui permet tout. Pour la riche Miss Menlo, être aveugle est vécue comme une punition plus que comme un état physique, le sien, et elle est prête à tout pour recouvrer la vue, ne serait-ce que quelques heures... Dotée d'un caractère d'acier et d'une poigne de fer, elle est donc bien décidée à forcer un chirurgien sujet au chantage à lui greffer les nerfs optiques d'un pauvre diable désargenté... pour un résultat qu'elle n'avait pas tout à fait prévu...

 

 

Réalisé fort brillamment par un petit nouveau, Steven Spielberg, et interprété par une petite vieille, Joan Crawford (ouh là, c'est méchant, ça ! bah non mais on avait quand même déjà vu la belle Joan dans The Unknown, tourné en 1927, ce qui, même en 1969, ne nous rajeunissait pas ma bonne dame !), mais aussi par Barry Sullivan (La planète des vampires) très bon dans son rôle de médecin accablé par l'acte chirurgical qui l'attend et heurte sa morale hippocratique, Eyes est un segment brillant de 1000 feux, même dans le noir profond du royaume des aveugles (oui, c'est vrai, ça ne veut pas dire grand-chose...)


Pilote - segment 3 : Escape Route
Réalisation : Barry Shear.
Interprétation : Richard Kiley, Norma Crane, Sam Jaffe.

Pour le SS-Gruppenführer Helmut Arndt, la vie après la seconde guerre mondiale n'est pas la vie rêvée. Loin de son Allemagne natale et du troisième Reich qui devait durer mille ans et porter haut la voix de la race des seigneurs, il vit en Amérique du sud sous le pseudonyme de Josef Strobe et dans la crainte constante d'être retrouvé par des chasseurs de nazis. C'est au cours de la fuite désordonnée devant des poursuivants qu'il aboutit devant un tableau apaisant, celui d'un pêcheur à la ligne assis dans une barque... tandis qu'un vieux juif rescapé des camps ne peut s'empêcher de contempler l'œuvre torturée d'un peintre marqué par la guerre : un homme crucifié et hurlant de douleur, parabole picturale de l'horreur des camps. Quand l'un, marqué à vie, exorcise ses souffrances devant le tableau de l'horreur, l'autre, ex tortionnaire à la croix gammée, ne rêve plus que d'une chose : quitter son enveloppe mortelle pour entrer dans le paysage si doux où navigue ce pêcheur échappé aux hommes et aux temps... Mais la traque n'est pas finie...

 

 

Et c'est encore un bon segment qui vient clôturer le pilote de Night Gallery, même s'il est un cran au-dessous des deux autres et que sa fin est un peu prévisible. A la réalisation, on trouve Barry Shear, qui officia essentiellement à la télévision, et devant sa caméra des acteurs bien moins célèbres que dans les deux opus précédents, parmi lesquels le vieux Sam Jaffe, immortel interprète de Gunga Din dans le film éponyme, mais aussi à l'écran dans Le jour où la Terre s'arrêta ou The Dunwich Horror. Incarnant ici le vieux Juif survivant des camps de la mort, il fut, dans la vraie vie, en butte à une autre persécution : celle du maccarthysme et de la liste noire du cinéma... mais ceci est une autre histoire.



Episode 1 - segment 1 : The Dead Man
Réalisation : Douglas Heyes.
Interprétation : Carl Betz, Jeff Corey, Louise Sorel, Michael Blodgett.

Qu'il s'agisse de physique, de chimie ou de médecine, les savants, c'est bien connu, sont fous. Enfin, pas tous mais presque. Au cinéma en tout cas. Ou à la télévision. Ici, le docteur Redford a invité le docteur Talmadge a constaté de visu sa technique d'hypnose destinée à modifier l'état d'un patient grâce à la suggestion et les forces psychosomatiques à l'œuvre en chacun de nous. C'est ainsi que, devant les yeux éberlués de Talmadge, John Fearing se met à présenter les symptômes gravissimes de telle ou telle maladie avant de redevenir le bel homme blond jeune et vigoureux lorsque Redford le libère de sa persuasion hypnotique. Les deux médecins discutent donc savamment de ces découvertes épatantes pendant que la jeune Mme Redford flirte au vu de tous avec le bellâtre blondinet qui sert de cobaye à son mari... Tout n'est donc pas parfait et lorsque Redford teste non pas une nouvelle maladie mais la mort par hypnose... peut-être n'est-il pas totalement dénué d'arrière-pensées...

 

 

Pour lancer le début véritable de la saison 1 de la série, Rod Serling a choisi un épisode réussi au final horrifique à souhait. Aux manettes, Douglas Heyes se met au service de l'histoire de façon plutôt convaincante. Dans le rôle du docteur Redford, Carl Betz insiste un peu trop sur les froncements de sourcils qui indiquent qu'il est soucieux de voir sa femme fricoter avec son patient tout en se disant que c'est le meilleur moyen de le garder pour terminer ses recherches. Dans le rôle de son confrère plus raisonnable et surtout plus sensé, Jeff Corey (L'opération diabolique, L'étrangleur de Boston) est en revanche parfait. Quant à l'éphèbe du segment, Michael Blodgett (vu dans "Beyond the Valley of the Dolls" de Russ Meyer), essentiellement utilisé pour sa belle gueule, on peut dire qu'il ne dépare pas : il est en effet des plus attrayants et ne pouvait que séduire la jeune et délaissée épouse. Pour tout dire, son physique fait diablement penser au Tragicomix de Goscinny et Uderzo et son destin le sera d'ailleurs, tragi-comique (enfin... plus tragique que comique, sauf pour les amateurs d'humour très noir...)



Episode 1 - segment 2 : The Housekeeper
Réalisation : John Meredyth Lucas.
Interprétation : Larry Hagman, Suzy Parker, Jeanette Nolan.

A sa grande surprise, Miss Wattle se retrouve un jour convoquée par son agence pour un poste de gouvernante. Aussi incroyable que cela puisse paraitre, elle correspond point pour point à ce que recherche son nouvel employeur, M. Acton : elle est vieille, mal fichue, souffreteuse, gentille et quasiment sans ressources. Tout le contraire de l'épouse de ce bon M. Acton qui est belle, jeune, riche et dotée d'un tempérament de feu. Si éruptive qu'elle est sur le point de jeter à la porte son époux qui ne lui fait pas gloire et à le renvoyer ainsi loin des milieux où ne s'épanouissent que ceux qui ont un compte en banque bien rempli... Oui mais... si M. Acton est d'origine modeste, il n'est pas sans ressource : il a même une... grenouille !

 

 

Contrastant fortement avec la noirceur du segment précédent, celui-ci offre sa part d'humour et une jolie chute (mais... chut !). Réalisé par John Meredyth Lucas qui se consacra essentiellement à la télévision, cet épisode à l'arrière-fond magique est interprété par celui qui deviendra l'infâme J.R. dans la série "Dallas" : Larry Hagman. A ses côtés, Suzy Parker et Jeanette Nolan jouent leurs rôles, voire le surjouent un peu, et ne resteront pas dans les mémoires pour cette prestation. En revanche la grenouille est parfaite.



Episode 2 - segment 1 : Room with a View
Réalisation : Jerrold Freedman.
Interprétation : Joseph Wiseman, Diane Keaton.

Cloué au lit pour raisons médicales, Jacob Bauman est assisté par la gentille infirmière, Miss Nevins. Pas très fûte-fûte et quelque peu immature encore, la belle enfant est éprise du chauffeur de M. Bauman et ce dernier s'amuse à la titiller à ce sujet, comme pour faire vibrer sa corde sensible et en essayant de travailler sa jalousie naturelle. Lui, en tout cas, l'est, jaloux. Et de sa chambre où il reste cloîtré, voir sa femme flirter justement avec le chauffeur, ça lui met les nerfs en pelote... Et pas sûr que les sourires candides de sa jeune infirmière suffise à calmer les noires pensées qu'il rumine...

 

 

De Jerrold Freedman, le réalisateur, on ne retiendra pas grand-chose, si ce n'est qu'il a fait sa carrière à la télévision et a tâté du cinéma à deux ou trois reprises ("Chicanos, chasseur de têtes", avec Charles Bronson, notamment). Taraudé par la jalousie, on retrouve ici dans son lit Jacob Wiseman, dont le titre de gloire fut d'être le Dr. No qu'affrontait James Bond dans le premier opus avec Sean Connery. Dans la blouse de l'infirmière gentiment concon, Diane Keaton est à son aise, elle dont la carrière fut très fructueuse, notamment chez Woody Allen (et pour n'en citer qu'un, je choisirai le drolatique "Guerre et amour").



Episode 2 - segment 2 : The little black Bag
Réalisation : Jeannot Szwarc.
Interprétation : Burgess Meredith, Chill Wills.

Oups ! Bien involontairement, par une erreur de programmation, les hommes du futur envoient au vingtième siècle... une sacoche de médecin. Tandis qu'ils se disputent une bouteille d'alcool, deux clochards éméchés voient donc apparaître dans la rue déserte où ils trainent leurs guenilles ce sac tombé de nulle part. Pour Fall et Heppelwhite, les deux poivrots, voilà une aubaine qu'ils pourront monnayer chez un prêteur sur gages. Sauf que Fall est un ancien toubib... et que cette valise miraculeuse avec ses scalpels autoguidés, ses potions magiques et son guide d'utilisation plus que simple pourrait bien être l'occasion de remonter une pente sur laquelle il a glissé bien des années auparavant...

 

 

Alors que dans le pilote, on avait eu droit à un Steven Spielberg qui s'illustra ensuite avec Les dents de la mer, ici on a un Jeannot Szwarc qui ne s'illustra pas franchement avec Les dents de la mer 2. En revanche, il fera son trou dans la galerie de Rod Serling puisqu'il en réalisa pas moins de 19 épisodes. Dans le rôle du brave toubib aviné à la gouaille redoutable retrouvant un peu des sensations de son métier d'avant la chute, Burgess Meredith, un habitué de La quatrième dimension (et de bien d'autres choses, les Rocky aux côtés de Stallone en particulier), en fait un peu trop (tout en restant éminemment sympathique). L'imposant Chill Wills, vu dans moult westerns, arrive à être plus sobre dans son rôle d'alcoolique patenté. Bravo, Chill !



Episode 2 - segment 3 : The Nature of the Enemy
Réalisation : Allen Reisner.
Interprétation : Joseph Campanella.

Dans cette histoire-ci, un astronaute aluni depuis peu part à la recherche d'une précédente mission dont on est sans nouvelle. Depuis le centre de commandement de la Terre, grâce à sa caméra et aux caméras qu'il a installées sur la Lune, des responsables le suivent à la trace et découvrent peu à peu horrifiés ce qu'il est arrivé à l'expédition précédente et la nature de notre ennemi...

 

 

Incontestablement, l'un des épisodes les plus drôles de la série, n'hésitant pas à quitter l'atmosphère terrestre pour aller sur la lune frôler les limites du ridicule. Court, franchement comique lorsqu'on découvre l'ennemi lunaire, il a pu décontenancer les mateurs de SF qui s'attendaient à... mais à quoi aurait-il fallu s'attendre, d'ailleurs ? Aux manettes, Allen Reisner joue la carte de l'image en direct et parfois brouillée de la retransmission depuis la lune et cela fonctionne bien. A l'écran, pas de vedette cette fois, mais des acteurs qui jouent leur rôle le plus sérieusement du monde. Une petite réussite.



Episode 3 - segment 1 : The House
Réalisation : John Astin.
Interprétation : Joanna Pettet, Paul Richards, Steve Franken.

Toutes les nuits, Elaine Latimer fait le même rêve : elle roule sur une route qu'elle ne situe pas, arrive à une maison qu'elle ne connaît pas, s'arrête et frappe à la porte mais personne ne lui ouvre alors elle repart... Ce rêve a-t-il un sens ou n'en a-t-il pas ? Le médecin de la clinique où elle est soignée et qu'elle quitte enfin n'a pas de réponse. Une maison de son enfance ? Une maison qu'elle a vue mais dont elle a oublié le souvenir ? Au fond, quelle importance, l'essentiel est qu'elle soit guérie. Elaine quitte alors la clinique et se retrouve sur cette route qu'elle connait à présent si bien, devant cette maison qu'elle connait de plus en plus...

 

 

Adapté d'une nouvelle du romancier français André Maurois ("La maison"), ce joli récit baigne dans une ambiance surnaturelle et nous fait partager le trouble de son héroïne fragile et sensible. Derrière la caméra, John Astin fait ses premiers pas de réalisateur, lui qui est surtout connu pour son rôle de Gomez dans La Famille Addams. Il s'en sort bien, très bien même puisque la douceur un peu vaporeuse qui marque le rêve d'Elaine Latimer (interprétée par la belle Joanna Pettet) rend presque palpable l'inquiétante étrangeté de l'univers qu'elle parcourt et reparcourt sans cesse.



Episode 3 - segment 2 : Certain Shadows on the Wall
Réalisation : Jeff Corey.
Interprétation : Louis Hayward, Agnes Moorehead, Grayson Hall, Rachel Roberts.

Chez les Brigham, ça ne rigole pas des masses. Stephen, médecin raté, s'occupe essentiellement de sa sœur Emma, infirme depuis son plus jeune âge et mourante aujourd'hui. Pour lui faire passer le temps, il lui lit et relit les œuvres de Dickens, à son grand dam d'ailleurs, lui qui n'en peut plus. Ses deux autres sœurs, une vieille fille revêche et au visage dur et une autre candide et mièvre, vivent elles aussi sous le même toit, dans la grande et sinistre maison que leur père avait légué à la seule Emma... Le jour où elle décède, son ombre reparait sur un mur du salon...

 

 

L'épisode 3 est décidément une réussite puisque les deux opus qu'il contient, "The House", donc, et celui-ci, nous entraînent dans le surnaturel avec délicatesse et subtilité. Ici encore, c'est un acteur qui réalise, puisqu'il s'agit de Jeff Corey (vu dans l'épisode "The Dead Man") et il arrive à faire ressentir la pesanteur de l'atmosphère qui règne en cette demeure et tout le poids qui repose sur les épaules de Stephen, médecin et lecteur d'Emma et peut-être aussi... mais pour des épisodes aussi courts, n'en disons pas trop de peur d'en dire trop. C'est Louis Hayward (Le démon de la chair, "Les nouvelles aventures du Capitaine Blood", Chuka le redoutable) qui joue ce rôle de médecin étouffé par ses soeurs vivantes ou morte... Agnes Moorehead ("Citizen Kane", "La splendeur des Amberson" mais aussi Le masque avec Vincent Price et même... "Ma sorcière bien aimée", dans le rôle d'Endora) incarne la sombre Emma, les deux autres l'étant par Grayson Hall et Rachel Roberts.



Episode 4 - segment 1 : Make Me Laugh
Réalisation : Steven Spielberg.
Interprétation : Godfrey Cambridge, Tom Bosley, Jackie Vernon.

Jackie Slater est un comique redoutable : en effet, il ne fait rire personne, ce qui est redoutable lorsqu'on veut être drôle. Sur les tristes scènes où il se voudrait roi du stand-up, il ne déclenche que des airs navrés chez ses rares spectateurs. Flanqué d'un imprésario et à la porte du dernier cabaret où il avait décroché un contrat, il traine dans un bar et rencontre un autre raté... un génie enturbanné qui doit faire un miracle avant minuit s'il ne veut pas être disqualifié et rétrogradé... un miracle, c'est justement ce dont Jackie Slater a besoin : un miracle qui le rendrait irrésistiblement drôle...

 

 

Et voilà donc l'exception qui confirme la règle : cette série est très bien, ce segment est très mauvais. Comme quoi, Spielberg n'a pas connu que des réussites. La faute à l'histoire, d'abord, plus que tirée par les cheveux, fussent-ils enturbannés chez un génie un peu trop maquillé pour nous faire croire qu'il vient de l'Inde ou d'un endroit tout aussi lointain et forcément mystérieux. La faute aussi à ces rires forcés qu'on nous inflige puisque Slater est censé être devenu impayable, des fous rires inextinguibles qui sonnent extrêmement faux, surtout quand ils ne reposent sur rien de drôle. Et pourtant il y avait de la matière avec Godfrey Cambridge (Le casse de l'oncle Tom, puisque le loser raté de la stand-up comedy est incarné par un authentique comédien de stand-up à succès ! Mais la sauce ne prend pas et l'on n'y croit pas une seconde... Finalement, le plus involontairement drôle sera encore de voir ce gros type à turban apparaitre à l'écran dans un bar tenu par un vague sosie de Lagaf quand il avait encore des cheveux. Bref...



Episode 4 - segment 2 : Clean Kills and Other Trophies
Réalisation : Walter Doniger.
Interprétation : Raymond Massey, Barry Brown, Tom Troupe, Herbert Jefferson Jr.

Le colonel Archie Dittman est un grand chasseur qui a rempli sa vaste demeure de ses plus beaux trophées : lions, gazelles, léopard, ours... Ses plus belles heures, il les a passées dans la nature, le fusil calé à l'épaule et l'œil planté dans le viseur. Apparemment, c'est comme cela aussi qu'il a connu ses plus beaux orgasmes, lorsque la balle s'éjaculant de son bâton cracheur venait toucher au cœur l'une de ses proies. On l'aura compris : Dittman est un prédateur avec un petit zizi, du genre qui tue pour son plaisir plutôt que par nécessité et sait qu'être un mâle, c'est avoir un gros fusil et savoir s'en servir ! Enfin, ce n'est pas dit comme ça mais c'est mon interprétation ! Et ce pourrait être celle du fils du brave colonel, le pacifique Jeffrey, qui ne partage pas du tout ce goût du sang jusqu'au jour où son père décide d'en faire un homme et lui met son gros calibre entre les mains... Tirera, tirera pas ???

 

 

Mené petit à petit vers son climax : l'affrontement père-fils, et sa chute, très réussie, par le téléaste Walter Doniger, cet opus cynégétique est aussi cinégénique. Vigoureusement interprété par un Raymond Massey très convaincant, le père nous convertirait presque (de force) à la chasse au tigre. Incarné plus mollement (mais fort justement) par Barry Brown, le fils pacifiste et en retrait nous pousserait plutôt à dire non à la guerre et à jeter nos fusils au plus profond d'un lac (ce que nous ne ferons cependant pas puisque nous n'avons pas de lac à proximité et encore moins de fusils à y jeter).



Episode 5 - segment 1 : Pamela's Voice
Réalisation : Richard Benedict.
Interprétation : John Astin, Phyllis Diller.

Pamela parle et Jonathan écoute. Pamela parle et Jonathan n'en peut plus. Pamela parle encore et Jonathan réalise soudain que ce n'est pas possible puisqu'elle est morte ! (presque naturellement d'ailleurs, il l'a juste un peu aidé à tomber dans l'escalier). C'est donc forcément son imagination qui lui fait encore et toujours subir la logorrhée redoutable de son harpie de femme. Merde alors, si même veuf il doit la subir, c'est plus une vie !

 

 

Le pauvre Jonathan aux oreilles cassées est incarné par le truculent John Astin (Le retour des tomates tueuses avec George Clooney), sa femme par une authentique comique américaine, reine du stand-up à l'abattage impressionnant (elle donnera son dernier spectacle en 2002 à... 85 ans) et Rod Serling, qui introduit le segment, par lui-même bien sûr. Que dire de plus si ce n'est que c'est court, resserré à juste titre, plutôt drôle et, là encore, avec une belle chute (et pas dans l'escalier cette fois).



Episode 5 - segment 2 : Lone Survivor
Réalisation : Gene Levitt
Interprétation : John Colicos, Torin Thatcher, Hedley Mattingly.

Alors que la mer est recouverte d'un brouillard épais, dans la passerelle, l'équipe chargée de diriger le bateau, commandant compris, voit apparaitre une barque dans laquelle se trouve une femme. Malgré l'opacité des brumes alentours, ils finissent par distinguer un nom sur la barque : Titanic... Sauf que le Titanic a coulé trois ans plus tôt et qu'il est impossible qu'il puisse y avoir encore sur les mers une survivante en train de ramer... Effectivement, point de survivante puisqu'il s'agissait en fait d'un homme mais pour le reste, le mystère reste entier et ses souvenirs épars et son air hagard ne permettent pas de l'éclaircir vraiment. A moins que...

 

 

Les océans sont profonds mais les abîmes du surnaturel le sont bien plus encore et réservent leur lot de surprises aux personnages comme à ceux qui les regardent évoluer. Bon segment encore une fois, prenant et surprenant. Pour nous tout autant que pour ce malheureux rescapé du Titanic incarné par John Colicos (La colère de Dieu). De quoi vous faire passer l'envie des croisières...



Episode 5 - segment 3 : The Doll
Réalisation : Rudi Dorn.
Interprétation : John Williams, Shani Walls, Henry Silva, Jewel Blanch.

Revenu des Indes où il a du reprendre du service pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa nièce orpheline, le colonel Masters retrouve la petite Monica enlaçant une horrible et sinistre poupée. Prenant à part Miss Danton, la gouvernante chargée de son éducation et de l'entretien de la maison, Masters lui reproche de lui avoir donné un tel jouet. Mais ce jouet, ce n'est pas elle qui lui a donné, c'est lui, non ? Puisqu'il venait d'Inde et était envoyé de sa part... Digne représentant de la couronne britannique, droit dans ses bottes et sûr de la justesse de ses actes, Masters comprend vite qu'il y a de la magie là-dessous, et que le mal est entré dans dz demeure en même temps que cette affreuse poupée...

 

 

Les poupées ont toujours eut la côte dans le cinéma d'horreur. Animées, inanimées ? Elles recèlent en elle toute l'ambigüité de leur état : elles ne sont pas vivantes mais elles le sont quand même, ne serait-ce que pour les enfants qui jouent avec et leurs parlent. Elles sont effrayantes par la fixité de leur regard et par leur immobilité (et encore plus lorsqu'elles perdent cette fixité et cette immobilité !) Quand l'ambiance s'y prête, on s'attend toujours à ce qu'elles commettent un mauvais coup fomentée dans leurs vilaines têtes de porcelaine... Celle-ci est très moche, et très réussie, c'est vrai. Plus que le vague accoutrement d'Henry Silva destiné à lui donner l'air d'un hindou vindicatif et jeteur de sorts... C'est la seule faute de goût de ce segment qui termine un trio prenant de bout en bout. Et, ici encore, la fin de l'histoire offrira son ironie du sort propre aux formats courts et qui leur donne tout leur sel...



Episode 6 - segment 1 : They're Tearing Down Tim Riley's Bar
Réalisation : Don Taylor.
Interprétation : William Windom, Diane Baker, Bert Convy, John Randolph, Henry Beckman.

Randy Lane devrait être heureux, il fête les 25 ans de présence dans son entreprise : les plastiques Pritkin. Mais s'il boit, ce n'est pas de joie mais bien pour oublier, faire passer, calmer la tristesse qui l'assaille et les mauvais souvenirs qui partout ressurgissent. Il est veuf. Son passé est derrière lui mais son présent a bien l'air de l'être aussi. Son avenir est bouché. Il boit trop, est en concurrence directe avec son assistant ambitieux qui a la niaque et les atouts pour faire un meilleur directeur des ventes. Et le pire c'est que le bar de Tim Riley, là où il fêta sa démobilisation, là où il rencontra sa femme, là où il a ses meilleurs souvenirs, va être démoli pour être remplacé par un parking. Que peut-il faire si ce n'est boire ?

 

 

Voici l'épisode le plus long de la saison 1 et le plus émouvant aussi. Le surnaturel s'y fait mélancolique, le fantastique renvoyant le pauvre Lane a sa solitude et à son désespoir. Le bar de Tim Riley va fermer mais c'est sa vie qu'on démolit. Il n'arrive plus à suivre, dépassé par une époque qui va plus vite que lui, un temps où il faut courir pour ne pas être piétiné, une ère nouvelle qui le fait se sentir dinosaure. Perdu dans ses ivresses gouailleuses et faussement joyeuses, Lane perd pied et arrive au bout du rouleau, si perdu qu'il ne voit pas les appels insistants de sa secrétaire qui le connait bien et sait qu'il vaut mieux que l'image débraillée qu'il donne à voir en ce moment. Etonnant opus, donc, vraiment, éclairant sur les évolutions du monde et sur les difficultés de s'y adapter constamment, sur le pousse toi de là que je m'y mette des plus jeunes arrivant sur le marché du travail imposé par la compétition libérale. Le bar de Tim Riley était un endroit chaleureux, convivial, où les différentes générations se retrouvaient pour célébrer un événement ou simplement pour être ensemble. Mais le bar de Tim Riley est fermé, il va être démoli... Mais alors pourquoi ces chants ?

Don Taylor (L'île du Docteur Moreau) réalise là l'un des meilleurs segments de la saison 1, contrastant avec les autres par son approche moins fantastique et plus sensible. L'humanité de son personnage principal y est pour quelque chose, William Windom lui insufflant la vie et l'amertume qui vient quand elle vous échappe, les autres acteurs jouant eux aussi leur rôle avec beaucoup de justesse.



Episode 6 - segment 2 : The Last Laurel
Réalisation : Daryl Duke.
Interprétation : Martine Beswick, Jack Cassidy, Martin E. Brooks.

Dommage après un aussi bel opus que le précédent, de terminer sur un segment aussi faible et peu réussi. Cette fois-ci, c'est encore une histoire de mari alité et jaloux (comme dans Room With a View) qui n'a qu'une obsession : se venger. Coincé au lit par des jambes qui ne lui répondent plus, il s'est auto-persuadé que sa femme et son docteur fricotaient dans son dos. Mû par la haine que lui inspirent son état et les ébats supposés de son épouse et de son amant putatif, il a réussi à quitter son enveloppe charnelle pour se déplacer dans la maison et même à prendre en main une paire de ciseaux...

 

 

Mollement dirigé par Daryl Duke, The last Laurel souffre surtout d'une histoire peu crédibles (jusque dans sa chute) et d'effets spéciaux assez médiocres : la transparence du personnage indiquant qu'il est sorti de son corps n'est par exemple pas toujours adaptée à l'échelle des lieux qu'elle parcourt. Alors, ok, il y a Martine Beswick ("One million years B.C.", La nuit des alligators, Dr. Jekyll et Sister Hyde), ok, mais bon... n'ayant jamais fantasmé sur elle et n'étant pas, qui plus est, particulièrement sexy dans son rôle, franchement, ça ne suffit pas !
Dommage quand même d'avoir terminé cette première saison par celui-là... car c'était une bien belle saison.


Bigbonn


En rapport avec la série :

# La fiche du coffret dvd Elephant Films de Night Gallery - saison 1

 

# La critique de la saison 2

 

# La critique de la saison 3

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