Circus of Fear
Genre: Krimi
Année: 1966
Pays d'origine: Grande-Bretagne / Allemagne (RFA)
Réalisateur: John Llewellyn Moxey
Casting:
Heinz Drache, Christopher Lee, Eddi Arent, Leo Genn, Margaret Lee, Suzy Kendall, Klaus Kinski...
Aka: Das Rätsel des silbernen Dreieck / Psycho-Circus
 

À Londres, un dimanche au petit matin, a lieu l'audacieux braquage d'un transport de fonds. Alors que tout semble se dérouler sans accrocs, l'un des convoyeurs tentant de résister est abattu par son collègue, qui est en fait complice des voleurs. Butin et malfaiteurs s'évadent par la Tamise, y compris le convoyeur meurtrier Mason. Ce dernier, devenu gênant pour ses complices, est sauvé par un appel du mystérieux commanditaire du braquage. Mason partira de son coté et apportera sa part (du lion) au cerveau du gang.
Alors que le reste des malfrats, et du butin, est capturé par la police, Mason arrive à son lieu de rendez-vous avec une valise remplie de billets mais est trucidé par un adroit lancer de couteaux.
Quelque temps plus tard, la piste des billets dérobés (tous marqués) permet à l'inspecteur Elliott, chargé de l'enquête, de remonter jusqu'au campement d'hiver du cirque Barberini. Cirque autour duquel gravite une étrange faune, et je ne parle pas là de la ménagerie des fauves et autres éléphants...

 

 

Tiré d'une courte nouvelle, "Le Triangle d'argent" (dont le titre allemand est la traduction originale agrémentée d'un "Rätsel", soit mystère, indispensable pour faire Krimi), du recueil "Again the Three Just Men", Circus of Fear est la troisième (sur quatre) adaptation d'Edgar Wallace coproduite par le "légendaire" et britannique Harry Alan Towers et une société allemande (en l'occurrence, non pas la Rialto mais sa compagnie de distribution associée : la "Constantin Films").
Mais de ces quatre adaptations, seul Circus of Fear peut légitimement revendiquer l'étiquette de Krimi (au sens français du terme), les autres étant plutôt des films d'aventures exotiques. Par une curieuse ironie du destin ce film, qui fut un semi-échec en Allemagne, est aujourd'hui sans doute le plus connu (et vendu) des Krimi hors de la sphère germanophone. Mais la plupart de ceux qui l'ont vu, ignorant d'ailleurs l'existence même de cette branche du polar tudesque et trompés par le titre original, pensaient avoir affaire à un thriller horrifique. S'il est assez atypique, du fait de son origine très majoritairement britannique, il n'en présente pas moins suffisamment de traits propres au Krimi pour être assimilé au genre. Et si l'on est loin des plus grandes réussites dudit genre, ce métrage n'en est pas moins l'un des meilleurs Krimis en couleurs (enfin en couleur... voir plus bas) et est sans le moindre doute le meilleur des Krimis tourné en Angleterre (où, certes, la concurrence n'est pas énorme).

 

 

Pour ceux qui ne sauraient pas ce qu'est un Krimi, déjà... félicitations pour être allé aussi loin dans un texte qui, du coup, est incompréhensible et sonne complètement creux. Vous êtes désormais mûrs pour passer à l'étape supérieure et assister à un meeting d'Emmanuel Macron. Mais si vous n'êtes pas prêts pour cette extrémité, et que votre cerveau est encore fonctionnel, une courte définition du Krimi s'impose.
Comme nous avons tous un peu d'Emmanuel Macron en nous (et, dirons les mauvaises langues, certains soirs Mathieux Gallet plus que les autres), et si chez certains c'est le blaser bleu, et chez d'autres la gérontophilie, chez moi c'est la tendance à plagier mes petits camarades. Ici, mon collègue Flint (qui plus est, je plagie en simplifiant grossièrement) :
"Ce que nous appelons Krimi (dans les pays non germanophones), c'est ce que les Allemands appellent les "Edgar-Wallace-Filme", les films adaptés du romancier anglais Edgar Wallace. Notons que Krimi, l'abréviation de "kriminalfilm", désigne en Allemagne l'ensemble du cinéma policier. Un Krimi est une production cinématographique allemande (au moins partiellement) tournée de 1959 à 1972, censée se dérouler en Angleterre (et plus spécifiquement à Londres) dans un environnement contemporain (du film) et présentant dans des proportions variables : une enquête policière avec du "whodunit" dedans, mais aussi du "mystery" (sans jamais franchir les lisières du fantastique), des meurtres en principe originaux dans leur modus operandi, ainsi qu'une romance entre un des enquêteurs et une (plus ou moins) belle jeune fille (plus ou moins) en détresse, et enfin de l'humour avec en particulier un personnage d'excentrique bouffon (encore appelé "rôle à la Eddi Arent")."

 

 

Mais revenons au film qui, quoi qu'assez atypique comme je l'ai dit, est qualitativement dans l'honnête moyenne du genre.
Atypique avec son très (trop) long préambule à la "film de casse" mou du genou, où chaque membre du gang de braqueurs dépasse allègrement le quintal, le film ne démarrant véritablement qu'à l'arrivée dans le cirque. Atypique aussi par son absence de héros, les quatre personnages principaux ayant des rôles d'égale importance, ce qui fait que Drache, Lee, Arent et Genn alterneront, suivant les pays, les places en haut des affiches sans que pour autant celles-ci soient mensongères.
Pour le reste, le cahier des charges est respecté et Harry Alan Towers, qui est aussi le scénariste de ce métrage sous le pseudonyme de Peter Welbeck, n'a pas lésiné sur le "whodunit". Il a par contre mis la pédale douce sur la comédie, ce qui, au vu de l'évolution future du Krimi, est plutôt une bonne chose. Et si les séquences comiques sont assurées comme de juste par Arent, ce dernier a pourtant paradoxalement un rôle sérieux, et c'est sans doute une de ses meilleures prestations avec celle de "Der unheimliche Mönch".

Circus of Fear se situe qualitativement dans la moyenne, avec une réalisation sans relief mais sans non plus de défauts majeurs. Il a été réalisé par un exécutant dont l'essentiel de la carrière se déroula à la télévision (mais qui débuta pourtant par le très bon "The City of the Dead") : l'Argentin d'origine britannique John Llewellyn Moxey, qui officia d'ailleurs pour les "Edgar Wallace Mysteries". Des adaptations d'Edgar Wallace, contemporaines des Krimi Rialto, sous la forme de moyens métrages à tout petit budget produits par la "Anglo-Amalgamated" et sortis en salles uniquement en Grande-Bretagne, en double-programme des longs-métrages de la même compagnie (les "Carry On" entre autres) mais qui furent vendus comme des séries TV aux États-Unis. Le film donc est qualitativement dans la moyenne, surtout grâce à un ton "sérieux" qui sera abandonné dans les Krimis suivants, au profit d'une tonalité semi-parodique.

 

 

L'interprétation est bien sûr l'un des points forts du film, si ce n'est le point fort, avec deux légendes du Bis européen qui devinrent deux légendes du cinéma mondial : Christopher Lee et Klaus Kinski. Mais n'oublions pas que Lee participa à deux autres Krimis (Le Narcisse jaune intrigue Scotland Yard et L'Orchidée rouge), Rialto ceux-là, où il eut à chaque fois Kinski pour partenaire, dans des rôles beaucoup plus intéressants d'ailleurs, même si ce fut dans des films pas forcément supérieurs.
Ce métrage ne se démarque donc pas non plus du gros peloton des Krimis Rialto au niveau du casting. Le seul véritable plus, toute révérence gardée au vétéran "so british" Leo Genn, c'est la présence de deux jolies et blondes anglaises, dans des styles aux antipodes : la très sophistiquée Margaret Lee (qui n'était pas la femme de Christopher, mais paraît-il la maitresse de Kinski), et la plus naturelle Suzy Kendall. Chacune d'elles fit, si ce n'est l'essentiel, du moins la partie la plus marquante de sa carrière en Italie. La première y fit même souche après avoir écumé tous les genres du cinéma local dans les années 60, du Péplum agonisant au Giallo débutant, en passant par l'euro-spy et les comédies parodiques dont certaines signées Lucio Fulci (Gli imbroglioni et I maniaci). La filmographie de la seconde est surtout marquée par ses participations au Giallo (L'oiseau au plumage de cristal, Torso).

 

 

Sigtuna



En rapport avec le film :


# Notons que le film fut distribué en Allemagne en 1966, soit un an environ avant sa sortie britannique, dans une version en noir et blanc alors que le film avait été tourné en couleurs. L'explication la plus souvent avancée pour expliquer ce choix surprenant est que la Constantin Film voulait laisser la primauté du premier Krimi en couleurs à une pure production Rialto, en l'occurrence Le bossu de Londres, qui sortit quelques mois plus tard. L'explication officielle est que le doublage allemand avait été effectué sur une copie de travail en noir et blanc et qu'une fois celui-ci achevé, la copie couleurs définitive envoyée par les Anglais présentait un montage légèrement différent, nécessitant un nouveau doublage. Il fut donc décidé de ne pas modifier le doublage existant (sans la voix de Kinski) et d'utiliser la copie noir et blanc pour l'exploitation en salles.
Au crédit de cette version officielle, j'ajouterai que les deux précédentes productions d'Harry Alan Towers sorties en Allemagne sous le label Edgar Wallace ont bien été exploitées dans une copie couleurs. Notons aussi que Werner Jacobs, qui ne fit que superviser le doublage, fut crédité de la réalisation sur les affiches allemandes.

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