Par le fer et par le feu
Titre original: Col ferro e col fuoco
Genre: Aventures , Cape et épées
Année: 1962
Pays d'origine: Italie / France
Réalisateur: Fernando Cerchio
Casting:
Pierre Brice, Jeanne Crain, John Drew Barrymore, Akim Tamiroff, Elena Zareschi, Bruno Nessi, Eleonora Vargas, Gordon Mitchell...
Aka: Invasion 1700
 

Dans une pommeraie croate, une demi-douzaine de cavaliers relèvent un paysan en tenue traditionnelle des Balkans qui semble avoir chu pour une raison indéterminée. Ah... selon les dialogues nous serions en fait dans l'Ukraine du dix-septième siècle et le pécore aurait subi l'attaque de brigands sanguinaires... admettons. Bref, le bouseux n'est pas pressé de remercier ses sauveurs qu'il reconnaît comme des soldats polonais, et semble leur en vouloir plus qu'à ses agresseurs fantômes (sans doute une sombre affaire de travailleurs détachés). Scène suivante - des membres d'un groupe folklorique balkanique du troisième âge brandit des outils agricoles dépareillés en criant (enfin, leurs doubleurs plutôt, et en italien) "Mort aux Polonais", et malgré les apparences il ne s'agit pas du mot d'ordre d'Emmanuel Macron lors d'un conseil européen mais du début d'une révolte en Ukraine...

 

 

Tout petit film d'aventures (quoique bien peu aventureux) que ce cape et d'épée dépourvu de duels à l'épée. Un film dont je n'ai pas envie de dire du mal car il appartient à un genre qui m'est particulièrement sympathique, et qui constitue l'essence du "cinéma de quartier". Mais aussi un film que, même avec la plus grande des indulgences et la meilleure volonté du monde, j'aurais bien du mal à en dire du bien (admirez la lourdeur de la formule). Peut-être eut-il été plus charitable de le laisser dans l'obscurité où il gît depuis plus d'un demi-siècle, et je l'aurais sans doute fait s'il ne s'était pas s'agit de la première adaptation cinématographique parlante (et la seule non polonaise) d'un roman de la trilogie historique d’Henry Sienkiewicz, En l’occurrence Par le fer et par le feu. C'est donc uniquement par souci d’exhaustivité, qu’après les films de Jerzy Hoffman (Colonel Wolodyjowski en 1969, Plus fort que la tempête en 1974 et With Fire and Sword de 1999) vous pouvez lire la présente chronique de ce métrage.

Ce film, c'est un peu comme la présidence du petit Emmanuel : je n'en espérais strictement rien mais j'ai quand même été déçu. Par ce qu'au-delà du titre, qui semble promettre un minimum d'action, il y a le sujet du livre, soit rien moins que la plus grande révolte cosaque de l'histoire (celle du "Tarass Bulba" de Gogol). Alors, je ne sais pas pour vous, mais pour moi le cosaque représente la quintessence de l'aventurier : Conquistadors se taillant à coups de sabre un chemin vers la gloire et le Pacifique à travers les hordes mongoles côté russe, corsaires anarchistes des terres côté ukrainien.

 

 

Bon, là, vu que nous sommes dans du bis franco-italien, ou plutôt italo-français tourné en Yougoslavie (et là, pour paraphraser Truffaut sur l'Angleterre, il faut reconnaître que Yougoslavie et cinéma font rarement bon ménage), je m'attendais à des cosaques d'opérette bien ridicules, voire pire, en fait je m'attendais à peu près à tout sauf à... l'absence totale de cosaques, l’insurrection de Khmelnytsky étant transformée en jacquerie paysanne ukrainienne ! De feu dans la steppe point, à la place on a un José Bové en peau de mouton dans un verger dalmate présidant à une version grand siècle (façon de parler) de démontage de Mc Do. Enfin ça... au mieux, parce que pendant une heure on assiste surtout aux minauderies d'une fausse blonde sur le retour maquillée en Vampirella, face à Winnetou en tenue de page de Louis XIV, avec en parallèle le sorcier de Rome contre Rome faisant du Hamlet de patronage.
Bref, quant au bout d'une heure je me réveille, m'attendant à ce que ça bouge enfin grâce à l'arrivée de quelques Tatars de carnaval, c'est hélas pour constater que toutes les scènes de combat sont remplacées par une ellipse narrative. En résumé, je n'étais pas loin de conclure que ce film n'avait eu qu'un tout petit budget empêchant la moindre scène d'ampleur, faute de décors et de figuration, quand dans les dix dernières minutes ce Par le fer et par le feu m'offrit une séquence de siège de cité fortifiée avec force effets pyrotechniques (dont des tirs de roquettes venant d'une tour de siège !) avant l'habituelle mêlée de cavaliers typiques des productions de Cinecitta, hélas très mollement et platement filmés. Le budget alloué à ce métrage n'était donc pas si ridicule mais plutôt très mal employé, à l'image de la tenue des lanciers ailés polonais du film consistant en un uniforme de cuirassier napoléonien auquel on a ajouté sur les casques les mêmes ailettes que sur les paquets de gauloises.

 

 

Bon je ne dirai pas trop de mal du réalisateur Fernando Cerchio, auteur quelques mois plus tôt d'un plus célèbre mais très peu marquant "Néfertiti, reine du Nil" avec déjà une Jeanne Crain, venue relancer en Europe une carrière de jeune première définitivement évanouie à Hollywood pour cause de prémices de la quarantaine (carrière dont le présent film marquera un coup d'arrêt). Je n'en dirai pas trop de mal, parce qu'après avoir œuvré pendant plus d'une décennie dans le cape et épée mou du gland et le péplum historique terne, en cette même année 1962 il mit en scène le légendaire "Totò contro Maciste", avant de persévérer dans deux autre véhicules sur fond parodique pour le génialissime Totò et de quasi achever sa carrière sur une adaptation de fumetti de bonne tenue Le retour de Kriminal. Un metteur en scène, donc, beaucoup plus doué dans le domaine de l'humour que dans celui de l'action.

Côté interprétation je serai tout aussi indulgent. Certes, Jeanne craint un peu (ahah) en jeune première, certes Pierre Brice est comme souvent transparent, certes le charisme de John Drew Barrymore doit beaucoup à son impressionnant système pileux, mais Akim Tamiroff s'en sort honorablement si on fait l'effort d'oublier que son personnage d'officier borgne est censé être le "falstafien" Onufry Zagloba, le plus truculent des héros de la saga littéraire. D'ailleurs, mieux vaut oublier complètement le roman tant le film en diffère : je ne reviendrai pas sur les cosaques, mais concernant les protagonistes imaginaires ou historiques, hormis pour le couple de "héros", le sort qui leur est infligé dans ce métrage est systématiquement à l'opposé de celui du roman (ceux qui survivent dans l'un meurent dans l'autre et vice-versa). Pour l'anecdote, Gordon Mitchell fait une apparition dans un rôle aussi court qu'inutile.
Bref, un film oublié et oubliable.

 

 

Sigtuna

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