Empire de la terreur, L'
Titre original: Tales of Terror
Genre: Fantastique , Sketchs
Année: 1962
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Tales of Terror
Casting:
Vincent Price, Peter Lorre, Basil Rathbone, Debra Paget, Joyce Jameson, Edmund Cobb...
 

Le quatrième film du cycle Poe est un film différent des autres. Pas par son contenu, qui reste très classique, mais parce qu'il s'agit d'un film à sketchs, avec trois histoires adaptées de l'écrivain nécrophile. Trois sketchs illustrant la mort, comme nous le disent l'introduction ainsi que les brefs interludes animés entre chaque segment. Et trois sketchs aux tonalités très différentes.

MORELLA

Lenora Locke se décide, une vingtaine d'années après être partie, de rendre une visite à son père. Celui-ci vit seul dans son château perdu près de l'océan. Enfin, il y est le seul vivant, puisque sa femme, Morella, morte une vingtaine d'années plus tôt, y est encore sur son lit de mort. Avant de mourir, elle s'était jurée de se venger de sa fille, qu'elle tenait pour responsable de sa maladie... Fille qui à son tour révèle très vite à son père hostile qu'elle est atteinte d'un mal incurable...

 

 

Il s'agit ici de l'épisode gothique du film. Le père Locke (on ne parle même plus de la prestation de Vincent Price...) y est un personnage torturé, inconsolable de la mort de sa femme. Enfin il va reprendre un peu espoir, avec sa fille... Mais ses espoirs seront vite mis en péril par l'esprit de Morella, qui tient à accomplir sa vengeance... Certes, c'est très répétitif du cycle Poe, mais c'est toujours aussi bon.
Encore une fois, la photographie et les décors (signés du désormais célèbre tandem Crosby-Haller) évoquent avec brio la désolation dans laquelle se trouve Locke. Des tons pâles, sans vie... Corman prend également un malin plaisir à imposer à son personnage principal les pires cruautés possibles, avec les vraies / fausses morts de sa femme et de sa fille. Tout cela donne un très bon conte gothique, bien noir, bien cruel, bien désespérant. Tellement, en réalité, que l'on se croirait au théâtre, tellement tout est outrancier.

LE CHAT NOIR

Montresor est un ivrogne qui n'hésite pas à persécuter sa femme pour que celle-ci lui donne l'argent du ménage, afin qu'il puisse aller boire. Un jour, au cour d'une beuverie, il fait la connaissance de Fortunato, un dégustateur de vin. Il va le ramener à la maison, et Fortunato fera la connaissance de la femme de Montresor, avec laquelle il va s'entendre bien, très bien, jusqu'à devenir son amant. Lorsque Montresor s'en rend compte, il va décider de supprimer les deux amants. C'est alors que le chat de la famille, qu'il ne supportait déjà pas, va lui jouer un sale tour.

 

 

Ce segment est quant à lui plus porté sur la comédie. Du reste, le casting (Price, Lorre, Jameson) se retrouvera deux ans plus tard pour un film au ton similaire : The Comedy of Terrors, de Jacques Tourneur. Les personnages y seront les mêmes, sauf que le rôle du mari pourri sera cette fois tenu par Vincent Price, alors qu'il s'agit ici de Peter Lorre. Faut dire qu'au lieu d'un croque-mort sans scrupules, Le Chat Noir nous présente un ivrogne sans scrupules. Et Peter Lorre, avec sa bouille ronde et rouge, colle parfaitement au rôle. L'humour du segment est d'ailleurs essentiellement basé sur son jeu d'acteur, puisque son personnage est saoul en permanence.
Le personnage campé par Vincent Price, un homme précieux et maniéré, bref l'antithèse de Montresor, joue également sur l'outrance de son caractère (il n'y a qu'à voir ses mimiques faciales lors des dégustations de vin). Sinon bien entendu, l'ironie du final, l'humour noir, est la base même de ce segment, fort agréable. Mention spéciale au duel de dégustation de vin entre Lorre et Price, qui n'est pas sans annoncer le duel entre les deux magiciens de The Raven, qui suivra un an plus tard...

L'ETRANGE CAS DE MR. VALDEMAR

Encore un beau casting pour ce dernier segment, consacré à l'instant même de la mort (Morella se préoccupait de la vie post-mortem, et Le Chat Noir de ce qui amène à la mort). Instant qui se prolonge pour Mr. Valdemar, hypnotisé par le docteur Carmichael, qui refuse de le laisser mourir, au grand dam de Mme Valdemar et du docteur James, appelé à épouser la veuve. C'est que le docteur Carmichael désire ardemment épouser la belle, et ce malgré les dernières volontés de Valdemar, qui confiait sa femme à James...
Evidemment, Valdemar, dont le corps est mort mais pas l'esprit, se vengera de ce bon docteur Carmichael, à travers une séquence plutôt gore pour l'époque. Un très bon segment, qui comme les deux premiers bénéficie de jeux d'acteurs excellents. Ici, si encore une fois on retrouve l'idée de l'inéluctabilité de la mort, on trouve, après le gothisme et l'humour, un autre élément de fabrique du cycle Poe : la cruauté humaine... On y retrouve aussi le personnage du jeune premier, de la belle en danger. On est donc quand même plus proche de Morella que du Chat Noir, surtout que l'on retourne dans un château (toujours le même, au passage)...

 

 

Bref L'Empire de la Terreur est un parfait condensé (voir trop condensé) du cycle Poe dans son ensemble. Bien sûr, du fait de la longueur réduite des segments on n'atteint jamais les sommets qu'auront atteint La Tombe de Ligeia, La Chute de la Maison Usher ou Le Masque de la Mort Rouge, et à ce titre le film est à déconseiller aux novices. Mais les éléments thématiques sont là, de même que l'esthétique et les méthodes de réalisation (emploi du flou, jeu dans le placement de caméra - notamment dans l'âtre de la cheminée, ce qui fait que le bas de l'écran est recouvert de flammes -). Un bon film.

Note : 7/10

 

Walter Paisley
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