Ombre du fouet, L'
Titre original: Ying zi shen bian
Genre: Wu Xia Pian
Année: 1971
Pays d'origine: Hong Kong
Réalisateur: Lo Wei
Casting:
Cheng Pei Pei, Yueh Hua, Tin Fung, Wong Hap, Guk Fung, Lee Kwan, Lo Wei...
 

Autant le dire d'entrée, ce film du très modeste voire médiocre Lo Wei, est une bonne surprise, alors qu'à sa mort en 1986, il laissa derrière lui l'image d'un tâcheron dont la mise en scène n'avait jamais brillé sinon de par son aspect brouillon, voire même carrément bâclé, ou encore parfois teintée d'un humour caricatural à tendance raciste. Alors oui, en effet, il y a un peu de ça chez Lo Wei, il y eut peu de monde pour le défendre, y compris parmi ses acteurs et celui-ci n'a jamais vraiment fait des étincelles, que ce soit en faisant tourner Bruce Lee, dont seul le charisme minéral faisait le prix du film ("Big Boss", "La Fureur de vaincre"), ou Jackie Chan ("La Nouvelle fureur de vaincre", "Le Poing de la vengeance", "L'Irrésistible", etc.). Il ne connut pas de grandes réussites avec ses métrages qui sont à ce jour des œuvres presque oubliées, classées dans la catégorie "première époque", malheureusement la mauvaise...

 


Et pourtant l'exception confirmant une fois de plus la règle, il apparaît dans sa filmographie cette petite pépite, qui n'est certes pas le chef d'œuvre absolu du Wu Xia Pian, mais un spectacle avec des défauts, mais aussi et surtout pas mal de qualités qui en font un opus très distrayant de l'histoire de la Run Run Shaw Brothers. L'histoire que voici est même plutôt bien ficelée... Alors que Yu Yang tient une petite auberge du nom de "Pin Rouge" avec son oncle, elle part s'approvisionner en ville et fait alors la connaissance de Wang Jain-Xin, extrêmement impressionné par le brillant maniement du fouet dont fait preuve la dame poussée dans ses retranchements.
Cela fait quinze années que Wang Jian-Xin est à la recherche de Fang Cheng-tian, maître en maniement du fouet, car il le juge responsable de la mort de son oncle ainsi que d'un vol de bijoux des plus conséquents. Il est donc forcément interpellé par l'arme de Yu Yang et sa façon brillante de l'utiliser et demande à celle-ci si elle n'aurait éventuellement pas un lien de parenté avec l'assassin et voleur recherché de toute part depuis toutes ces années. Il faut dire qu'il n'est pas le seul sur l'affaire car, de son côté, le maître Hong Da-Peng a à sa solde une horde de seize mercenaires qui, devancés quinze ans plus tôt dans le même projet, celui de dérober les dits bijoux, n'ont de cesse de tenter de lui mettre la main dessus. Tout ceci va alors s'entremêler, les soupçons de l'un entraînant les soupçons des autres, et tout ce beau monde va alors commencer à se combattre dans une même quête, celle de retrouver Fang Cheng-tian, se venger et récupérer ce qu'ils convoitent. Mais chacun ne sera pas au bout de ses surprises car la vérité n'est peut-être pas celle avancée...

 


Lo Wei met en scène Cheng Pei Pei et Yueh Hua qui sont rompus à l'exercice car ayant pas mal tourné ensemble (L'Hirondelle d'or / Princess Iron Fan / Dragon Swamp) et d'emblée ça se sent car, si le scénario est légèrement poussif quand même (mais moins qu'un "Big Boss" par exemple), l'un des gros atouts du film est ses acteurs et actrices impeccables et Lo Wei offre ici à Chang Pei Pei un rôle inoubliable de femme forte qui ne s'en laisse pas conter. A ce titre, toutes ses apparitions le fouet à la main marquent au point que si l'on garde longtemps après la vision du film une image, c'est bien celle-ci.

Le fouet étant une arme assez peu répandue, en tout cas dans le paysage du Wu Xia Piang, l'arme contribue étrangement à l'ambiance du film, et s'il n'apparaît pas de prime abord comme l'instrument le plus tranchant qui soit, on a pourtant droit à une succession de combats fort sympathiques, recelant même quelques belles trouvailles, comme lorsque Cheng intercepte l'épée de l'un de ses assaillants pour la projeter telle une fronde, explosant un adversaire au passage. Quand bien même on en aurait vu d'autres depuis, force est d'admettre que "ça le fait". Ca le fait d'autant plus, que de nombreux combats se déroulent de nuit, ce qui n'est pas sans conférer à cette "Ombre du fouet" un petit quelque chose de plus, disons pour résumer, une atmosphère à la fois romantique et crépusculaire.

 

 

Une fois de plus, on sera également surpris de penser au Grand silence de Corbucci (ce qui n'est pas la pire référence qui soit) lors des scènes dans lesquelles les personnages chevauchent à travers des espaces enneigés et, comme elles sont réussies également, on se régale pas mal et on se dit que quand même, l'addition scènes nocturnes plus scènes de neige plus actrice charismatique armée d'un fouet assure le spectacle. Dommage donc que certaines chorégraphies soient réglées de manière un peu expéditive, avec notamment tous ces assaillants qui semblent tourner en rond en arrière plan, ce qui n'est pas sans prêter à rire. Et niveau longueur de câble, on a vu mieux ajusté, car cela donne parfois un aspect un peu trop élastique aux mouvements des combattants, et l'on s'attend presque à ce que ces câbles élastiques les ramènent d'un coup d'un seul en arrière. Idem lors d'une scène dans laquelle trois assaillants lancent des bombes qui ressemblent davantage à des pétards à lancer aux poules qu'à de la bonne nitro qui exploserait tout, et c'en devient dans ces moments quelque peu ridicule.

Voilà donc pour "L'Ombre du fouet", spectacle sympa, honnête, très inégal avec du très bon (ou très beau) et du risible, mais qu'on aurait tort de bouder plus que cela. Ce film sans prétention débordante reste à découvrir, si ce n'est déjà fait.

 


Note : 6/10

 

Mallox
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