Mutinerie, La
Titre original: Riot
Genre: Thriller , Drame , Action
Année: 1969
Pays d'origine: Etats-Unis
Réalisateur: Buzz Kulik
Casting:
Jim Brown, Gene Hackman, Mike Kellin, Gerald S. O'Loughlin, Ben Carruthers, Clifford David, Bill Walker, Les détenus de la prison de l'état d'Arizona...
 

Le lieu : pénitencier de l’état d'Arizona.
L'état des lieux : des détenus punis et provisoirement mis dans la section d'isolement réussissent à capturer un gardien auquel ils prennent les clés de plusieurs cellules. Les détenus libérés ne tardent pas à ouvrir les geôles de leurs camarades. Le personnel administratif et hospitalier de la prison est mis aux arrêts par les détenus. C'est grâce à Cully Briston (Jim Brown) que le sous-directeur de la prison et ses assistants et gardiens ne sont pas abattus. Cully essaie de modérer la folie meurtrière de ses compagnons, en collaboration avec Red Fraker (Gene Hackman), le chef des mutins. Tous deux mènent le personnel prisonnier dans les sous-sols. Le rapport de force commence. La tentative d'évasion aussi...

 

 

Produit en 1968 par William Castle juste après "Rosemary's Baby", La Mutinerie est avant tout l'adaptation d'un roman de Frank Elli scénarisé par James Poe ; ce dernier scénarisera l'année suivante le célèbre roman de Horace McCoy, "On achève bien les chevaux". Le film suit un groupe de taulards bien décidé à s'évader et qui, pour ce faire, déclenche une émeute au sein de leur prison.

A la mise en scène, on retrouve Buzz Kulik, réalisateur ayant oeuvré principalement pour la télévision (voir par exemple Bad Ronald, sur notre forum) mais dont les travaux pour le grand écran ont tendance à être réduits au seul "Le chasseur", Steve McQueen aidant.
Il s'agit pourtant d'un metteur en scène intéressant dont on oublie trop souvent qu'il réalisa à la fin des années 60 et au début des années 70 une poignée de films solides, à la liberté de ton parfois inhabituelle pour les genres abordés. On citera l'étonnant La nuit des assassins/Warning Shot en 1967, suivi d'un non moins surprenant bien que parfois loufoque "Pancho Villa", scénarisé par Sam Peckinpah et Robert Towne, lequel précède cette étrange capitalisation du film de "prison", voire "d'évasion". Le plus étonnant finalement, à l'instar de "Le Fauve/Shamus", polar musclé et un brin distancié mettant en scène Burt Reynolds, c'est que quasiment aucun de ses films n'a acquis beaucoup de notoriété. Le fait est, ses oeuvres ne sortant pas en dvd - notamment en France où elles sont réduites à quelques diffusions intempestives sur certaines chaînes câblées -, que l'on tend à les oublier. (Le film est en revanche sorti chez Olive Films début 2011 après une libération tardive en 1993, en VHS, chez Paramount Home Video).

 

 

Pour en revenir un peu à Sam Peckinpah, cité ci-avant, il y a une filiation tentante à faire à la vision de ce Riot. Pour rappel, le premier long-métrage sur lequel le célèbre réalisateur a travaillé (comme troisième assistant) fut "Les Révoltés de la cellule 11" du non moins célèbre Don Siegel (un récidiviste qui réalisera "L'évadé d'Alcatraz" en 1979). Un boulot qui, selon le réalisateur lui-même, le marqua tout le reste de sa carrière pour une raison simple que l'on retrouve ici. Outre qu'il fut filmé dans une véritable prison (la prison d'état de Folsom pour le Siegel / Le pénitencier de l'état d'Arizona : le Yuma Territorial Prison State Park pour The Riot), les deux films ont en commun de se servir des gardiens et détenus comme figurants pour leur film. Bien entendu, la pratique n'était pas tout à fait nouvelle lorsque Don Siegel tourna ce qui est devenu depuis un classique du genre puisque d'autres réalisateurs tels que Jules Dassin avec Les démons de la liberté ou le moins connu Crane Wilbur pour Le Pénitencier du Colorado (1948) avaient déjà frayé les mêmes cellules (quant à ce dernier, sorti chez Artus Films). La chose deviendra du reste peu à peu courante et le nombre d’oeuvres réitérant le procédé, plus conséquent. On peut citer par exemple l'excellent The Glass House de Tom Gries, dont le tournage connut du reste quelques déboires spectaculaires, comme la prise d'otages d'un de ses principaux acteurs, Alan Alda.

 

 

Il faut bien l'admettre, La Mutinerie, tourné quatre ans avant ce dernier, ne possède pas sa force brute (Brute Force again donc...), malgré la similarité de leur message : des conditions de détention discutables pour le moins, des gardiens borderline, un directeur intraitable, une violence interne incontournable. Sur ce dernier point, le rôle de l'indien dangereusement dégénéré et toujours prêt à tuer, campé par un Ben Carruthers ("Shadows", Le peuple des abîmes, "L'inconnu de Shandigor", "Le convoi sauvage"...) venant de croiser Jim Brown sur le tournage des "Douze salopards", est l'un des maillons faibles du film : caricatural comme pas permis, non seulement il tranche avec l'aspect plus sobre de The Riot mais aussi, et bien que la justice, on le sait, ne soit pas une science exacte, il tient de l'évidence que sa place se situe dans un asile, bien sanglé, plus que dans n'importe quel pénitencier des États-Unis. Il sert donc avant tout de prétexte à une violence gratuite, à laquelle les autorités du pénitencier répondent par une violence elle-même excessive et sans détail aucun.
A propos d'acteurs qui se croisent, il est à noter également, et de façon plus anecdotique, que nos deux têtes d'affiche viennent aussi de se croiser en s'opposant dans Le crime c'est notre business de Gordon Flemyng.

 

 

Les concernant, il transparait facilement que la star de l'époque était plus Jim Brown que Gene Hackman. Bien que campant un personnage fort en gueule, le second se fait piquer la vedette par la "nonchalance musclée" du premier, aidé en cela par un Buzz Kulik qui le met complaisamment en avant, lui faisant la part belle, tant au niveau intelligence octroyée que pour l'issue qui leur est réservée. Il faut bien l'admettre aussi, le fort charisme que dégage Jim Brown à l'écran est pour beaucoup dans la réussite relative de La Mutinerie.
Ailleurs, et pour rester dans le domaine des acteurs, on reconnait quelques bonnes gueules : l'indispensable Mike Kellin, que les amateurs connaissent bien pour L'Etrangleur de Boston, Meurtres sous contrôle ou encore Massacre au camp d'été. Ce dernier est l'un des seconds plans servant le mieux le propos de The Riot ainsi que de faire-valoir de nos acteurs-vedettes. On évoquera aussi les présences de Gerald S. O'Loughlin ("De sang-froid"), qui parvient à susciter une certaine empathie en gardien, et enfin de Clifford David (Le "Résurrection" de Daniel Petrie, "The Exorcist III" de William Peter Blatty ou même "Signs" de Shyamalan), ici en infirmier homosexuel.

 

 

La Mutinerie demeure légèrement figé dans le temps par des artifices alors tendance : une violence finale un peu outrée et dépendante des préceptes contestataires et virulents récents, eux-mêmes initiés par Arthur Penn et son "Bonnie and Clyde", ainsi que par le western spaghetti dont Le Grand Silence (ceci est bien sûr plus manifeste encore dans son "Pancho Villa").
Ailleurs, The Riot bénéficie d'une bonne partition de Krzysztof Komeda ("Le couteau dans l'eau", "Cul de sac", Le bal des vampires... **) qui réutilise ici un bout de musique faite pour "Rosemary's Baby" mais dont un titre est surtout chanté deux fois par un certain Bill Medley, qui sévira plus tard en piaillant du gosier pour "Cobra" ou "Dirty Dancing".
A contrario, et à charge encore contre The Riot, un aspect trop romancé pour être honnête sinon vraiment crédible, d'autant que les panneaux s'affichent comme s'il s'agissait d'une histoire ayant réellement existé, expliquant ce qu'il advint ensuite de certains protagonistes.

Hormis cela, La Mutinerie est un drame à suspens qui peine à démarrer mais qui, peu à peu, trouve son rythme puis se regarde de façon très plaisante, sinon avec un réel intérêt. Kulik affirmait un talent, après La nuit des assassins, peut-être pas démesuré, mais au minimum un sens efficace et vigoureux de la mise en scène.

 

 

Mallox



** A propos du compositeur, très talentueux quant à lui, il décèdera juste après le tournage de façon accidentelle mais aussi de façon assez hallucinante : après une beuverie entre amis, celui-ci est tombé à terre, sa tête heurtant à deux reprises le trottoir (relevé une fois par l'un de ses amis qui, s'y prenant mal, le laissa chuter à nouveau). Il fut ramené ensuite chez lui, assurant que tout allait bien. Peu après encore, c'est aux urgences qu'il se retrouva avant que, très vite, on le déclare cliniquement mort. Il sortit, contre toute attente et au bout d'un moment, de son coma profond, quitta l'hôpital puis rentra à Varsovie où il mourut des suites de ses blessures.

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